Paris a eu son Grand Prix motocycliste. Son histoire n’est pas inintéressante puisque, assez directement, elle a abouti à la construction du circuit Carole.
1972. Les années post-68 où moto rimait avec liberté. Une image jeune et positive (cela a bien changé) qui ne laissait évidemment pas insensibles les médias de l’époque, à commencer par les radios qui continuaient à surfer sur une vague initiée par « Salut les copains » ou les magazines pour les « jeunes » qui mariaient avec un certain succès moto et musique (Hit Magazine)…
Coup médiatique ou pas, le 22 octobre 1972 voit donc s’organiser le 1er Prix de Paris International de Vitesse à Rungis, situé en banlieue sud de Paris, avec l’aide de la radio RTL et du journal France-Soir. Une organisation qui a réuni la grande majorité des pilotes stars du championnat du monde pour venir rouler dans la banlieue parisienne, sur un circuit plutôt dangereux et sans réel intérêt autre que d’être proche des spectateurs. Les primes de départ et d’arrivées importantes pour l’époque (1700 francs soit 1500 euros pour une qualification en première ligne, 10 000 francs au premier à l’arrivée, soit 9000 euros d’aujourd’hui) n’y sont sans doute pas étrangères… rien pour aujourd’hui, mais bien important pour l’époque.
Après ce week-end unique, qui verra malheureusement la mort de Dave Simmonds, champion du Monde 125 en 1969, dans l’incendie de la caravane de Jack Findlay (pilote australien et vedette du film Continental Circus de Jêrome Laperrousaz) après l’épreuve, les motards parisiens prendront l’habitude de venir rouler à Rungis le vendredi soir, cette fois sans aucune organisation ni bottes de paille pour les protéger.
Les accidents mortels furent nombreux. Le dernier en date entraîna la fermeture de ces activités nocturnes et le prénom de la dernière victime fut donné au Circuit Carole ouvert en 1979 dans le nord parisien, sous l’impulsion d’Yves Mourousi, nommé « Monsieur moto » par le gouvernement de l’époque.
Mais pour en savoir un peu plus, laissons la parole à Sylvain Sanchez, un des organisateurs: « Après plusieurs promenades dans Rungis où nous avions réuni pilotes professionnels, journalistes sportifs et organisateurs, nous avons recherché un tracé qui correspondrait au type de course que nous voulions organiser. Chacun connaît la popularité des compétitions dites « Formule Unlimited » (Formule cylindrée illimitée) des pays anglo-saxons.
C’est cette formule que nous avons choisie. Pourquoi?
Il apparaît de plus en plus que les cinq classes (50cc, 125cc,
250cc, 350cc, 500cc) et bientôt une sixième avec la formule 750cc
du Championnat du Monde, est assurément un peu vieillotte. Elle ne
tient pas compte de l’évolution technique des machines, alors
que la distance des courses est toujours identique sur des tracés
de circuits qui n’ont pas changé. Cette année, au Grand Prix de
France à Clermont-Ferrand, KANAYA, en 250cc, tourne à la vitesse
record de 128,252 km/h de moyenne, alors que SAARINEN, avec une
350cc, tourne à 127,8 km/h et moyenne et AGOSTINI, sur sa 500
MV, à 126,2 km/h de moyenne. PARLOTI, avec une 125cc, tournera à
121,6 km/h de moyenne. Ces chiffres montrent bien que le système
des classes est désormais dépassé.
Notre souci a donc été d’organiser une grande compétition, mais
aussi un grand spectacle. La formule libre de 350ccà 750cc, qui
permet de réunir des machines de classes et de marques différentes,
pourra nous assurer le spectacle que nous attendons.
La grande course de Daytona, cette année, en est la preuve la plus
flagrante, où nous avons vu une moto de 350cc triompher de la
meute des 750cc (plus rapides et plus puissantes que cette
dernière).
Ce tracé, compte tenu de la formule choisie, a donc tenu à être
sélectif. Il peut se décomposer en deux parties égales:
– la première comporte huit virages, un « S » et une
courbe à petit rayon. Elle pourrait favoriser les machines de
cylindrée moyenne.
– la seconde se compose de deux lignes droites et d’une courbe a
grand rayon. Cette seconde partie pourraient favoriser les machines
de cylindrée supérieure.
Chacun, au point de vue machine, aura donc ses chances : le pilotage, lui, fera la décision. Le suspens nous sera assuré par le système des deux manches de vingt-cinq pilotes chacune, les vingt-cinq meilleurs temps se retrouvant en finale.
Pour parfaire cette journée, il nous a paru intéressant d’organiser également une compétition de la classe 250cc qui, cette année, dans le cadre du Championnat du Monde, a été du plus haut niveau de pilotage.
Enfin, les SIDE-CARS, dans la formule « jusqu’en 750cc », nous assurerons le spectacle qu’ils n’ont jamais manqué de nous donner.
Cette année, le PRIX DE PARIS INTERNATIONAL DE VITESSE est un départ vers cette épreuve reine que sont les « 200 MILES DE DAYTONA » que peut-être, l’année prochaine… »
Le discours est vendeur et les pilotes au rendez-vous. Jugez-en plutôt : Agostini, Read, Sheene, Mortimer, Duhamel, Offenstadt, Andersson, Simmonds , Palomo, Grant, Tchernine, Pasolini, Dodds, Bourgeois, Grassetti, Rougerie, Chevallier, Debrock, Apietto ne sont quelques noms parmi les engagés.
Le public était également présent en nombre. Les forces de l’ordre aussi.
Le programme complet est disponible sur le site de Bike 70.
La course de 20 tours des 250cc fut remportée par Renzo Pasolini sur son Aermacchi, devant Olivier Chevallier (Yamaha), Kent Andersson (Yamaha), Roberto Gallina et János Drapal.
La première manche de 45 minutes de la Formule Libre a vu la victoire de Kent Andersson (350 Yamaha) devant Phil Read (750 Norton) et Dave Simmonds (500 Kawasaki), alors que la seconde demi-finale a sélectionné Barry Sheene (350 Yamaha) devant Bruno Kneubühler (350 Yamaha) et Dave Croxford (750 Norton).
La finale de 45 minutes sacrera de nouveau Kent Andersson (350 Yamaha), cette fois devant Renzo Pasolini (350 Aermacchi) et Christian Bourgeois (350 Yamaha).
La course des Side-Cars fut remporté par le couple Chris Vincent / Mick Casey (750 Münch-URS) devant les duos Siegfried Schauzu / Wolfgang Kalauch (500 BMW) et George O’Dell / Bill Boldison (750 BSA).
Malgré son succès populaire, l’opération ne fut jamais renouvelée et ce 1er PRIX DE PARIS INTERNATIONAL DE VITESSE restera unique.
Place aux photos de nos différents contributeurs que nous remercions ici, ainsi qu’aux vidéos de Jean-Claude Jacq: