Lorsque Jorge Lorenzo a tous les outils en main, c’est à la serpe qu’il taille son chemin. Alors dominateur, on lui affuble un marteau puisqu’il enfonce la concurrence. Mais lorsque ce n’est pas le cas, on le prendrait presque pour une pince. Autant de situations que le Majorquin a connues cette année, faisant de sa saison un parcours en dents de scie.
Jorge Lorenzo, il ne faut pas s’en cacher, connaît une campagne compliquée. Trois victoires certes, cinq podiums, sans doute, mais aussi deux abandons et, surtout, deux derniers Grands Prix catastrophiques. En deux échéances subies sous une météo capricieuse à Assen et au Sachsenring, le triple Champion du Monde Yamaha a lâché pas moins de 38 points à un rival Marc Márquez au contraire imperturbable.
Au moment de marquer la mi-saison, le Majorquin regrette 48 longueurs de retard sur le double titré du HRC qui a pris une option pour un troisième sacre. Por Fuera peut paraître aussi fort que fébrile selon le temps qu’il fait et ses sensations avec le pneu avant Michelin. Un grand écart qui ne rassure pas pour la suite des événements tandis que l’équipier de Valentino Rossi a déjà chuté huit fois cette année.
Jamais Jorge Lorenzo n’a connu une telle série d’accidents. Rien que pour le seul Grand Prix d’Allemagne, il est tombé trois fois, soit autant que sur l’ensemble de ses saisons 2010, 2010 et 2015. Jusqu’à cette échéance 2016, il ne s’était jamais retrouvé plus de cinq fois les quatre fers en l’air. Les records de gamelles de 2011 et 2012 seront cette fois battus.
Autant de faits qui minent un moral et érodent une concentration dans une ambiance de départ vers l’usine Ducati où commencera une nouvelle aventure. Est-ce à dire qu’il faut exclure d’ores et déjà la Yamaha frappée du 99 de la course actuelle pour le titre ? Son homme de terrain Wilco Zeelenberg exclut cette possibilité : « Jorge est un quintuple Champion du Monde et il connait une mauvaise passe qui mine sa confiance. Mais il ne se cherche pas d’excuses pour autant. Il dit clairement qu’il n’a pas de sensations et que s’il attaque plus, il va tomber. En Allemagne, il a chuté trois fois. Donc on ne peut pas dire décemment qu’il n’essaie pas, qu’il a lâché l’affaire. Nos relations sont solides. Nous gagnons et nous perdons ensembles ».
Là-dessus, le même Zeelenberg analyse sur crash.net : « Jorge pilote beaucoup avec l’arrière de la moto et pour ça il a besoin de bien sentir son pneu avant. On a vu lors des dernières courses qu’il n’usait pas son pneu avant. Jorge a un style de pilotage très fluide mais parfois le pneu avant a besoin d’être agressé, d’être stressé pour être efficace ». Un manque d’osmose dont la cause est le pilote : « le souci vient de son style de pilotage car c’est bien lui qui souffre le plus. Son style est vraiment particulier mais il est aussi diablement efficace et très précis lorsqu’il sent exactement où est la limite ».
Pendant ce temps, Valentino Rossi le binôme, s’adapte : « Vale a fait de belles courses, dont celle d’Assen malgré son accident. Il ne serait pas si loin au classement s’il avait connu plus de réussite. La moto n’est donc pas mauvaise. Mais un pilote a besoin de bonnes sensations. Le style de Vale permet certaines choses que le style de Jorge ne permet pas ». Des sensibilités incontournables qu’il sera intéressant d’évaluer sur la Ducati dès l’année prochaine.