Comment un team en MotoGP gère son pilote lorsqu’il est blessé ou revient de blessures encore diminué ? Une question d’actualité depuis que Marc Marquez se retrouve à nouveau inapte avec le retour de la diplopie. Une conséquence de sa violente chute lors du warm-up du Grand Prix d’Indonésie sur un tracé de Mandalika d’où il était tombé déjà à trois occasions. Cette fois, le forfait était au bout de la souffrance, avec une commotion cérébrale. Au sein des équipes, comment gère-t-on ces situations ? Comparaison n’est pas raison, mais les événements qui ont concerné Jorge Martin lors de son retour à la compétition au Grand Prix de Catalogne et les échanges immortalisés par la série « MotoGP Unlimited » lève le voile sur ce côté obscur de la force…
Pour comprendre ce qui va suivre, il faut expliquer quel était l’état de Jorge Martin dans ce Grand Prix de Catalogne 2021. Le pilote Pramac Ducati faisait son retour 48 jours après son terrible accident à Portimao où il avait pris près de 25G. Et au moment de l’impact 26,5G. « Un truc de dingue » dit lui-même l’Espagnol. « Il n’y a pas mal de monde qui se demande comment je peux être ici après une chute aussi violente. A l’hôpital j’avais des plâtres de partout. Mais 5 semaines plus tard je remontais déjà sur la moto ».
Jorge Martin s’est remis de huit fractures. Lors de la visite médicale d’aptitude passée devant le Docteur Charte, on entend ces propos : « il y a deux semaines j’étais en chaise roulante et là on a refait le muscle. Je veux tester, sans m’enflammer, être à l’écoute de mon corps… » « Et ne pas hésiter à s’arrêter » ajoute aussitôt le toubib. Une précision qui aura son importance…
Pendant le week-end, le même Docteur Charte est allé aux nouvelles de Jorge Martin dans le box Pramac : « comment il va ? » demande-t-il et c’est Fonsi Nieto de l’équipe qui lui répond ainsi : « ça va il gère du mieux qu’il peut. J’ai discuté avec lui et on lui a bien dit que le plus important c’est qu’il se sente à l’aise sur la moto. Et qu’il ne doit surtout pas hésiter à s’arrêter en cas de besoin. Je pense qu’on peut lui faire confiance ». Un discours bienveillant qui est aussi à retenir…
MotoGP Unlimited : « tu vas leur montrer que tu en as dans le pantalon, et tu vas donner ton maximum«
Jorge Martin termine son samedi épuisé : « demain je leur demanderai de m’injecter des antidouleurs. La course va être dure, super dure ». Puis le dimanche, il tombe pendant le tour de formation. « Quand il revient il faut que l’on essaie tous de rester calme » entend-on au sein du team après la scène de la chute.
De retour dans son box, Jorge Martin est dépité : « fallait que ça tombe sur moi ». Mais il est vite repris en main. Et là, on oublie l’ambiance bienveillante des jours précédents. Un cadre de l’équipe s’agenouille devant le pilote et lui prodigue ce discours : « ne dis pas ça. Ce sont des expériences qui te serviront pour la saison prochaine. Repense à tous les mauvais moments que tu as surmontés depuis que tu t’es blessé. Regarde où tu en es aujourd’hui. Tu as bossé comme un malade, tu t’es entrainé malgré les douleurs. Tu vas sortir de ce box, tu vas leur montrer que tu en as dans le pantalon, et tu vas donner ton maximum. Tu vas te mesurer à tous les autres, et à la fin de la course, tu pourras chialer sous ton casque parce que tu auras souffert ».
Le jet de l’éponge n’a jamais été une option ni une demande formulée au pilote qui finira 14e et épuisé ce Grand Prix de Catalogne. « J’ai besoin de sucre, dépêche physiquement je suis mort » soufflera Jorge Martin en descendant de sa Ducati. Sous les félicitations de l’équipe Pramac quand même. Les pilotes moto sont des gladiateurs, et considérés comme tels.