Il ne s’agit pas d’un pilote en vogue, mais Thomas Lüthi
poursuit son petit bonhomme de chemin en mondial. Croyez-le ou non,
le Suisse a l’un des plus longs parcours de l’histoire, discutant
avec Jack Findlay et Ángel Nieto. Depuis 2002, Tom arpente les
circuits en quête de succès. Revenons sur une carrière aujourd’hui
bien entamée, qui laisse un arrière-goût amer.
Né dans le canton de Berne en 1986, le petit Thomas se passionne
instantanément pour les pocket bikes. Ne vous y trompez pas, malgré
l’absence de circuit FIA/FIM sur le territoire, la Suisse n’en
reste pas moins un grand pays de sports mécaniques.
L’Helvète se transforme en machine à gagner sur les petites motos.
En 2002, Tom se place admirablement bien en championnat allemand et
européen. Ainsi, il est invité à participer à quelques wildcards en
125cc.
Le team Elit Grand Prix jette son dévolu sur la
star montante. Vous connaissez mieux l’équipe sous le nom de
Paddock Grand Prix (qui court aussi sous le nom
Emmi Caffe Latte ou Interwetten),
celle qui hébergea le Suisse pendant 13 années consécutives.
La sauce ne prend pas immédiatement, mais en 2005, un déclic change
la vie du jeune Tom. Pourvu d’une Honda RS125R
moins performante, il se met à jouer la victoire tous les weekends.
Il sort vainqueur d’une confrontation légendaire avec Mika
Kallio et s’empare du titre mondial
125cc.
L’histoire est en marche. Malheureusement, l’absence de belles
propositions en Moto2 le pousse à prendre une décision rarissime
dans l’histoire des Grands Prix modernes : Remettre en jeu son
titre 125cc.
Cette fois, il ne peut lutter contre Álvaro
Bautista et tombe même à la huitième place du championnat.
La montée en 250cc est tout de même programmée, toujours chez
Paddock GP. Lüthi est capable de belles performances, mais la
régularité lui manque. Un trait qui le poursuivra jusqu’en
2021.
En 2010, la Moto2 fait son apparition à la place de la
250cc. Les moteurs Honda 600cc uniformisés permettent donc
aux concurrents de se battre à armes égales. La première saison de
l’histoire de la catégorie est intéressante car elle met en avant
une pléiade de châssis. Faire le bon choix est
crucial.
Paddock opte pour le Moriwaki,
qui s’avère être une bonne pioche. La cellule japonaise sera titrée
en fin d’année grâce aux efforts de
Toni Elías, ex-vainqueur de Grand Prix. Lüthi conclut
l’année en quatrième position mais toujours sans victoire en
catégorie intermédiaire.
Le changement pour Suter s’avère être une
meilleure décision encore. Les saisons 2011 à 2017 se ressemblent
étrangement. Lüthi est en mesure de remporter des courses,
comme au Mans, son circuit favori, mais aussi de
tomber dans les tréfonds du classement deux semaines plus tard.
Ainsi, il est toujours dans le groupe des favoris mais jamais il
n’arrive à inquiéter réellement le champion du monde. «
Cette année, c’est la bonne » est une rengaine
souvent entendue à propos du pilote suisse. Finalement, jamais ce
titre ne vint.
Double vice-champion du monde 2016-2017, il ne peut pas jouer avec
Johann Zarco ou Franco
Morbidelli. Désillusion sur désillusion. Doucement mais
sûrement, Tom attaquait sa 17e saison en 2018, une année pas comme
les autres.
À 31 ans, son rêve se réalise enfin. Il est engagé en MotoGP pour
un an au sein de l’équipe EG 0,0 Marc VDS. Après
tant d’années sur les mêmes cylindrées, nous pouvions nous attendre
à une acclimatation difficile. Mais pas autant.
L’exercice 2018 est un véritable cauchemar. 0 points marqués,
dernière place du classement. Pendant ce temps, son coéquipier
Franco Morbidelli réalise une performance honnête
en 15e place, accompagnée du trophée de rookie de l’année.
La douche froide contraint Lüthi à redescendre en Moto2,
chez Dynavolt Intact GP, pour 2019. Bis repetita.
Étonnamment, il réalise sa meilleure saison en carrière mais ne
peut rien faire face à Álex Márquez et Brad
Binder. Thomas a réglé ses problèmes de régularité mais ne
gagne pas suffisamment de course pour être candidat à la
couronne.
Ce n’est qu’en 2020 que Lüthi marque le pas.
Depuis l’année dernière, il semblerait que le suisse soit en bout
de course. Il ne faut pas oublier que tenir une carrière si longue,
surtout quand l’on a été exposé aux blessures, est un
accomplissement remarquable. Peut-être est-ce sa dernière année en
mondial, 19 ans après la première. Quoi qu’il en
soit, Lüthi méritera un bel hommage à l’annonce de sa
retraite.
Photo de couverture : Sascha Wenninger