Mercredi et jeudi, les pilotes MotoGP ont pris possession du circuit de Jerez pour le deuxième test officiel de pré-saison 2019. Une dernière occasion pour les constructeurs de mettre au point leur machine avant de reprendre la piste à Sepang en février prochain.
Voici l’essentiel de ce qu’il faut retenir.
Ducati toujours à la pointe de la recherche
L’usine de Borgo Panigale a dévoilé plusieurs nouveautés techniques visibles sur la Desmosedici, à commencer par un appendice aérodynamique placé à l’arrière de la selle destiné à apporter de l’appui.
Parmi les autres curiosités, la firme transalpine a également étrenné un système installé entre l’étrier de frein arrière et la biellette de suspension. Selon certains, ce mécanisme n’est autre que celui déjà éprouvé par le passé sur de nombreuses motos, de course mais aussi de série, qui permet d’asseoir les suspensions au moment de la prise des freins et d’éviter les mouvements parasites. Jack Miller, Danilo Petrucci et Alvaro Bautista auraient d’ailleurs réalisé leur meilleur tour avec ce dispositif.
Danilo Petrucci, bien que moins rapide le jeudi, conclut ce test avec le deuxième chrono au classement combiné : « Je suis satisfait de ce test, mais également de celui à Valence », a confié l’Italien en fin de journée. « Je me suis montré très rapide hier, en particulier en pneus usés. Nous avons essayé beaucoup de choses sur la moto et évalué plusieurs solutions. Nous avons essayé un nouvel arrière. Le feeling était un peu plus mauvais aujourd’hui. En fin de journée, nous avons passé un pneu neuf pour évaluer les conditions de piste. En essayant beaucoup de choses, il était difficile de se maintenir en 1’37. J’ai beaucoup souffert pour rester en 1’38. Mais nous sommes toujours là et c’est de bon augure pour la suite. Je suis content, mais nous devons patienter jusqu’à Sepang. J’ai souvent été rapide avec des températures basses. Si j’y suis également rapide, nous pourrons alors voir plus grand. Je crois que nous avons compris beaucoup de choses aujourd’hui. »
Classé septième et deuxième pilote Ducati, à deux dixièmes de Takaaki Nakagami, son coéquipier Andrea Dovizioso souligne que les chronos d’un test ne sont pas significatifs : « Après trois ans avec les Michelin, je pense que tout le monde a compris que les chronos à la fin d’un test ne veulent rien dire », a expliqué le vice-champion du monde. « Surtout lorsque les pilotes sont très proches. Ce n’est pas très important. Il y a plusieurs façons d’aborder un test : certains se donneront à 99 % et d’autres à 80 % en essayant des pièces. Nous ne disposons pas de beaucoup de pneus et vous devez vous décider pour les utiliser à faire un chrono ou pour faire une comparaison de pièces. »
Dovizioso a néanmoins profité de ces deux journées pour confirmer son feeling de Valence, bien que touché à la main gauche suite à une chute mercredi en fin d’après-midi : « Les pièces que nous avons comparées ici nous offrent le même feeling qu’à Valence. Nous n’avions pas une toute nouvelle moto, nous avions des choses à essayer et nous devions donner les bons retours, mais nous devons en faire plus. »
Honda veille au grain
Avec Takaaki Nakagami auteur du meilleur temps, Honda compense l’absence de Cal Crutchlow. Au guidon de la RC213V d’usine du Britannique, le Japonais a établi la référence en 1’37.945, le jeudi soir. « Nous avons comparé différents amortisseurs et différents links pour améliorer l’adhérence à l’arrière, et c’est pourquoi nous avons réalisé le meilleur temps. C’est la meilleure façon de finir la saison », confiait-il dans son débriefing, « Marc a un talent particulier, donc j’essaie d’apprendre de lui ».
Troisième, Marc Marquez dressait un bilan positif de ses deux jours à Jerez. « Nous nous sommes davantage concentrés sur les détails et d’emblée le feeling a été bon ce matin », a-t-il expliqué. « Nous avons passé du temps pour essayer quelques pneus médiums et durs et nous avons évalué quelques nouvelles choses. Certaines mises à jour ont été bonnes, d’autres moins. Nous avons amélioré le moteur et nous devons continuer de travailler sur ce point ainsi que sur le châssis. »
Pour le septuple champion du Monde, il est désormais temps de
prendre soin de son épaule gauche. « Opération la semaine
prochaine et récupération tout l’hiver. C’est une longue
convalescence, et je ne serai peut-être pas à 100 % en
Malaisie. Mais j’aurai février et mars pour travailler mon
physique. »
Marc Marquez a essayé de nouveaux ailerons, tout comme son coéquipier Jorge Lorenzo qui n’a pas encore le droit de s’exprimer devant la presse.
Les avis différent chez Yamaha
Les pilotes officiels Yamaha n’avaient grosso modo qu’une seule tâche durant ces deux journées en Andalousie: choisir lequel des deux nouveaux moteurs ils utiliseraient l’année prochaine. Maverick Vinales s’est fort bien comporté en s’adjugeant le troisième chrono le jeudi, ce qui, en toute logique, le rend très satisfait. « Nous avons conservé un très bon rythme car nous avons utilisé beaucoup de pneus usés et je suis heureux car, à la fin, quand j’ai attaqué sur un tour, la moto a plutôt bien répondu. Je sais que nous pouvons beaucoup améliorer le châssis, mais pour le moment, nous nous concentrons beaucoup sur le moteur. Pour moi, c’est assez clair et nous verrons ce que nous allons dire et faire après le meeting », a déclaré le pilote espagnol qui a effectué 78 tours et anticipe déjà les prochains essais, « L’important était de trouver base de réglages et, pour la Malaisie, oui, je pense nous devons un peu améliorer la vitesse de pointe car c’est important sur les longs circuits. Nous avons besoin de plus de motricité et c’est encore notre point faible, mais je pense que globalement nous avons une moto vraiment compétitive. Nous voulions seulement essayer le moteur. Les chronos étaient là, très réguliers, en gros 38 ou petits 39, et je pense que c’est très bon. »
A l’inverse, son célèbre coéquipier a tiré le signal d’alarme dès le mercredi après avoir terminé la séance en 17e position à 1,6 seconde de la tête. » La direction est plutôt claire pour faire le choix entre les moteurs mais, de ce que je ressens, cela ne fait pas énormément de différence. Selon moi, cela doit être clair pour Yamaha que ce n’est pas suffisant. Selon moi, si nous courions demain, nous serions 5e, 6e, 7e, et peut-être 4e s’il y avait une chute devant. Mais nous ne nous battrions pas pour la victoire », a déclaré Valentino Rossi.Ayant gagné une seconde le deuxième jour, le discours de l’italien se fait un peu plus mesuré mais conserve néanmoins a même conclusion que la veille: « Je pense qu’avec le moteur que nous avons essayé aujourd’hui, c’est assez facile de prendre la décision. Aujourd’hui, nous avons travaillé et cela a été un peu mieux, en particulier en ce qui concerne le rythme. Mais pour moi, nous avons beaucoup de travail à faire si nous voulons essayer d’être compétitifs face aux Honda et aux Ducati, mais aussi aux Suzuki. J’espère donc que Yamaha va continuer à forcer pour nous donner quelque chose de mieux en février ».
Suzuki prépare une année sans avantages
Chez Suzuki, on n’a pas vraiment fait la chasse au chrono, voulant profiter de chaque minute pour travailler en vue de la saison prochaine. Les deux pilotes du constructeur japonais figurent dans le Top 15 et, malgré une chute le mercredi pour Alex Rins, celui-ci a dressé un bilan très positif de ces essais: « Ces deux journées ont été très positives parce que nous avons tout essayé, nouveau châssis, nouveau moteur, et nous avons fait beaucoup de comparaisons. Hier, j’étais plus concentré sur le châssis et aujourd’hui sur le moteur. Ce matin, nous avons commencé avec le châssis 2018 et les nouvelles spécifications du moteur, et nous avons essayé toutes les suggestions que les ingénieurs ont faites; c’était très positif. Nous n’avons pas encore finalisé le moteur, mais les ingénieurs y travailleront. On a travaillé très dur et on a l’impression qu’on peut avoir une moto très compétitive. »
Finaliser le moteur est primordial pour Suzuki qui perd ses avantages (nommés concessions) l’année prochaine, et ne pourra plus développer son 4 cylindres en ligne en cours d’année. Joan Mir et Sylvain Guintoli ont donc été également mis à contribution.
« C’était une journée très dure aujourd’hui. Nous étions vraiment concentrés sur l’essai des nouvelles pièces parce que nous devons tout préparer pour l’hiver afin que les gars au Japon puissent continuer leur travail là-bas. La journée a été plutôt positive, nous avons essayé un peu de tout et fait quelques comparaisons et cela a été utile. Nous n’étions pas concentrés sur les temps au tour aujourd’hui, c’était plus pour moi d’essayer le moteur. Nous avons beaucoup de bonnes informations à envoyer au Japon. J’ai l’impression de m’améliorer à chaque séance, je dois encore m’habituer à piloter la grosse moto, mais ça se passe bien », a déclaré le rookie Joan Mir à l’issue de la deuxième journée, tandis que le pilote d’essai français précisait: « Ce test nous a été très utile lorsqu’il s’agit de définir la voie à suivre pour l’année prochaine. La perte des concessions a rendu notre travail au cours de ces journées d’essais d’autant plus pertinent qu’une fois le choix du moteur réglé, ce sera évidemment le cas. Nous avons tous beaucoup travaillé pendant ce test de Jerez, et nous sommes très contents du travail que nous avons fait. Ma moto va me manquer pendant les deux prochains mois ! Mais nous avons beaucoup accompli avec les essais et comme nous l’avons vu en 2018, le travail des essais est vraiment payant sur la piste. »
Zarco prend ses marques chez KTM
Les représentants KTM ont été plus discrets à Jerez, avec Pol Espargaro menant les motos autrichiennes avec le 17e temps. Johann Zarco, 19e, a continué de travailler au guidon de la RC16. « J’ai commencé mon quatrième jour sur KTM avec un meilleur niveau », expliquait le Français. « J’ai mieux contrôlé la moto et nous avons quelque peu progressé. Nous avons ensuite essayé différentes choses et différentes motos, et nous avons obtenu de bonnes réponses. Nous avons rencontré un problème technique et les mécaniciens ont pris du temps pour tout résoudre sur la moto. Mais comme je l’ai dit, mon feeling progresse et durant mon dernier run, j’ai signé un chrono à seulement un dixième de mon meilleur temps. Je me sens mieux sur la moto et j’ai pu essayer de progresser sur plusieurs tours. Lorsque nous ne progressons pas, nous parvenons à améliorer notre régularité et cela signifie que nous grandissons, mais cela prend du temps. »
Parti à la faute à deux reprises à Valence, le pilote tricolore n’a commis aucune erreur en Andalousie : « J’ai passé un cap en termes de pilotage et j’ai pu donner de bons retours ». Et Zarco d’ajouter : « Copier le style de Pol n’est pas la solution pour gagner des courses. Je peux m’en inspirer pour certains points. Je suis au début d’une nouvelle ère pour grandir en tant que pilote. J’évolue dans une belle équipe et cette opportunité tombe à point nommé, car j’ai assez de maturité pour rester calme. »
Avant de s’offrir quelques jours de repos, Zarco a quelques rendez-vous sur son planning avant de reprendre l’entraînement début janvier. « Il faut continuer de s’entraîner comme si tu pouvais gagner. Il faut savoir apprécier le moment présent. »
Les rookies s’illustrent
Dans le clan des rookies, Francesco Bagnaia s’est montré incisif à Jerez au guidon de sa GP17. Le Champion du Monde Moto2 en titre s’est adjugé le neuvième temps et s’est dit ravi de son adaptation à la catégorie reine. « Le feeling a progressé tour après tour », a-t-il souligné. « Je suis également ravi, car nous avons amélioré les phases de freinage en comparaison au premier jour. Nous avons encore une marge de progression, mais nous sommes sans nul doute dans la bonne direction. »
Pointé au sixième rang de la hiérarchie en milieu d’après-midi, Fabio Quartararo a poursuivi son apprentissage en progressant à chaque sortie. Si le freinage a été l’aspect qui l’avait le plus surpris à Valence, à Jerez, c’est plutôt la vitesse de pointe : « À Valence, nous avions la possibilité de rester derrière la bulle jusqu’au freinage. Ici, à peine sortie d’un virage, on a très peu de temps », souriait-il le mercredi. « En comparaison au Moto2, c’est super court ! » Le Niçois a toutefois nettement progressé jeudi en gagnant près de six dixièmes. « Je me sens de mieux en mieux sur la moto », soulignait-il. « J’ai adapté ma position de pilotage pour contrer les wheelies et j’ai également appris à utiliser le frein arrière. »
Pour améliorer son style, Quartararo sait qu’il peut compter sur le soutien de son team manager, Wilco Zeelenberg, posté en bord de piste aux côtés de son ami de longue date Torleif Hartelman, le coach de l’équipe Petronas. « Je n’ai pas commis d’erreur, je ne suis pas tombé. » Le pilote Yamaha, ravi de ses débuts en MotoGP, a toutefois encore un peu mal à se montrer très rapide sur un tour, un peu comme en Moto2, « mais je suis régulier, notamment en pneus usés. » D’ici la reprise à Sepang, Quartararo passera quelques jours aux États-Unis pour suivre un programme d’entraînement en compagnie de Jack Miller et de Marcel Schrötter.
Rossi et Cadalora, c’est terminé
Luca Cadalora, coach en bord de piste de Valentino Rossi depuis trois années, a pour sa part décidé de tirer sa révérence. Le triple champion du monde, lassé par les voyages, a pris la décision de rester chez lui. Valentino Rossi, qui n’a plus figuré sur la première marche du podium depuis Assen l’an dernier, pourrait faire appel à l’ancien pilote Idalio Gavira, déjà coach de la structure VR46.
Classement test MotoGP à Jerez J.2:
Classement test MotoGP à Jerez J.1:
Crédit classements : MotoGP.com