Sur le mur de son bureau, Aki a fixé une photo où deux pilotes d’alors de son team, Johann Zarco et Brad Binder, célébraient les titres de Champions du Monde 2016, respectivement en Moto2 et Moto3, avec Marc Márquez, le Champion du Monde de cette saison-là en catégorie MotoGP. Márquez avait auparavant gagné son premier titre de Champion du Monde dans l’équipe d’Ajo en 125 cm3.
« Márquez est une grande vedette, et l’Espagne un pays important pour la moto. C’est là-bas qu’il y a les meilleures courses nationales dans le monde. Le Championnat du Monde Junior se déroule essentiellement en Espagne », expliquait ainsi Ajo. Il soutient financièrement en Espagne le jeune Finlandais Rico Salmela, 12 ans, qui court depuis 4 ans à l’étranger.
« Nombreux enfants d’Europe du sud commencent les courses à 3 ou 4 ans. On investit sérieusement dans leur carrière déjà avant qu’ils aient 10 ans. Si on veut arriver au sommet il faut participer aux courses de bon niveau très jeune, par exemple en Espagne », précisait Ajo.
Son fils Niklas a couru en Championnat du Monde en tant que professionnel pendant six ans. Il a arrêté sa carrière de pilote à 21 ans. Maintenant il est responsable de l’équipe Moto3 d’Ajo. Il travaille aussi comme responsable technique pendant les courses du pilote japonais Kaito Toba de l’équipe Ajo.
« Les pilotes sont de plus en plus jeunes et de plus en plus légers. Le poids joue en rôle significatif », estimait Ajo.
Est-ce que c’est un sport qui favorise les casse-cou ? « Pas mal de gens croient que les pilotes sont un peu fous. Pourtant en général, les meilleurs pilotes sont les plus calmes, mais ils sont prêts à tout sacrifier pour atteindre leurs objectifs. Nombreux pilotes de pointe n’ont même pas une petite-amie régulière pendant leur carrière parce qu’ils veulent se concentrer sur l’essentiel. La passion fait oublier la peur. La volonté de gagner est si forte », décrivait Ajo.
Si la passion se transforme en insolence et fait prendre trop de risques, le patron de l’équipe doit intervenir. « Avec mon expérience j’essaie de calmer le jeu et d’arranger les choses. Souvent je suis aussi un psychologue. »
Aki Ajo a fait sa formation pour son futur travail sans le savoir pendant sa jeunesse. Son père et son oncle courraient dans des rallyes, mais Aki ne s’intéressait depuis toujours qu’aux deux roues, même s’il n’y en avait pas chez lui.
« Au début mes parents ont même essayé de me protéger de la moto ». A 12-13 ans Aki commençait à acheter et réparer des cyclomoteurs qu’il revendait en mettant des annonces dans un journal régional. C’est ainsi qu’il a pu avoir assez d’argent pour acheter sa première moto pour courir en motocross.
« J’étais spécialiste de la marque Solifer. J’avais une dizaine de cyclomoteurs, des Solifer et des Tunturi. Mon intérêt envers les deux roues était si fort que je participais à des courses dans les champs contre des garçons plus âgés que moi. C’est ainsi que j’ai dû grandir comme par hasard envers mon rôle de directeur d’équipe. »
Cependant, gérer une équipe internationale n’est pas toujours facile. « Quand l’argent fait son apparition, le jeu devient plus brutal. Mais cela apporte aussi de l’intérêt. Je ne peux pas dire que je me suis fait escroquer, mais j’ai appris à être attentif. Dans ce sport on trouve des acteurs divers. Dans ce boulot, il faut être extraordinairement dur. »
Ajo fait tourner l’équipe dans les catégories Moto2 et moto3 avec quatre pilotes et un budget annuel d’environ 4 millions d’euros. Les pilotes sont rémunérés. Il emploie une trentaine de personnes dont la plus part en sous-traitance.
« Le concept de la MotoGP est sain. Les budgets sont plus bas que dans le sport automobile. Il faut que le budget soit bien géré pour bien gérer le sport. La technique est une dépense importante, mais les frais de personnel et de voyage sont une partie importante du budget, car les courses se déroulent partout dans le monde. Cette année il y a moins de frais à cause de la pandémie Covid-19, car les courses ont lieu en Europe. »
A suivre cette année chez Ajo, Tetsuta Nagashima, leader provisoire du mondial Moto2 juste après le premier GP qui a eu lieu au Qatar, ainsi que son coéquipier Jorge Martin, de même qu’en Moto3 Raul Fernandez et Kaito Toba. Ce sont cette année les quatre mousquetaires venus du froid.
Photos © Gold and Goose et Sebas Romero pour KTM, Red Bull, Motogp.com / Dorna, Ajo Motorsport
Source : Ari Pusa pour Helsingin Sanomat
Traduction : Irmeli Debarle