Ce dimanche 7 novembre 2021, Jack Miller a répondu aux questions des journalistes depuis l’Autodrome International de l’Algarve à Portimão, au terme de la troisième journée du Grande Prémio Brembo do Algarve.
Nous sommes allés écouter (via un logiciel de téléconférence) les propos du pilote australien, qui a terminé la course en troisième position.
Comme à notre habitude, nous reportons ici les paroles de Jack Miller sans la moindre mise en forme.
Jack, vous avez livré une rude bataille en course, notamment avec Álex Márquez. Pouvez-vous nous parler de ce duel que vous avez mené face à lui ?
« Tout d’abord, je dois dire que Pecco Bagnaia a fait une très grosse course, avec vraiment un très gros rythme, et dès qu’il m’a décroisé à la sortie du premier virage j’ai bien senti qu’il n’avait qu’une envie : Attaquer comme un diable ! J’ai bien essayé de suivre son rythme, mais même comme cela je n’ai pas pu éviter qu’il s’échappe tour après tour. »
« Par la suite j’ai essayé de gérer les gommes en milieu de course, et je me suis remis à attaquer à environ huit tours de la fin, et c’est à ce moment que j’ai réussi à me défaire définitivement d’Álex, même si par la suite je me suis fait une belle frayeur dans le virage 7. J’étais prêt à devoir me battre jusqu’à la fin avec Álex, mais ensuite le drapeau rouge a été brandi. »
« Au final je suis très content pour l’équipe, et en particulier en ce qui concerne le titre des constructeurs que nous avons réussi à décrocher. A présent nous allons essayer de décrocher celui des équipes à Valence. Cela fait vraiment plaisir de finir la saison en étant aussi performants. »
« Cela fait plaisir de finir la saison en étant aussi performants »
Vous avez récemment déclaré que la Ducati n’était plus la même que par le passé, et qu’à présent il s’agit d’une machine très complète qui peut jouer la victoire sur tous les types de tracé. Le fait d’avoir une moto aussi complète a-t-il pu jouer dans l’obtention du titre chez les constructeurs ?
« Oui, c’est ce que je pense. Ducati avait déjà réussi à remporter le titre chez les constructeurs l’an passé, lorsque Andrea Dovizioso et Danilo Petrucci étaient aux manettes des motos officielles. Au final c’est vraiment un travail d’équipe car ces deux-là ont apporté leur contribution, au même titre bien sûr que Pecco Bagnaia, Johann Zarco ou moi. »
« La bonne chose avec Ducati c’est que nous avons toujours un pilote, que la course se déroule bien ou non, qui parvient au minimum à finir dans le top 4. Nous pouvons donc récolter des informations sur un peu toutes les machines, et c’est vraiment fantastique je pense dans notre processus de développement, cela nous aide. »
« Année après année nous devenons de plus en plus fort. L’an dernier nous avons remporté le titre chez les constructeurs et c’est de nouveau le cas cette année, et à Valence nous allons sans doute faire de même au championnat des équipes. Après un titre l’an passé, cela nous fera donc deux couronnes cette saison. On peut donc espérer poursuivre dans cette voie l’an prochain et viser le triplé avec le sacre chez les pilotes ! »
Vous restait-il suffisamment de gomme en fin de course pour votre bataille face à Álex Márquez, à supposer que la course serait allée à son terme ?
« Je pense que je n’aurais eu aucun problème, et je recherchais ce duel de toute façon. Quand ce type de bataille survient dans les tous derniers tours, vous avez toujours l’impression d’avoir remporté la course quelle que soit votre position si vous parvenez à devancer votre adversaire. »
Ducati a remporté aujourd’hui le titre chez les constructeurs. Quel rôle a joué la moto aujourd’hui, ainsi que ces dernières années avec toutes les améliorations qui lui ont été apportées ?
« Je pense que nous sommes vraiment très chanceux, car nous avons un excellent pilote essayeur en la personne de Michele Pirro, qui est là depuis pas mal de temps désormais. Il abat une quantité de boulot incroyable en coulisses, car tous les éléments que nous recevons et que nous essayons ont déjà été filtrés par lui. »
« Par ailleurs nous disposons de nombreux jeunes talents avec Jorge Martín, Enea Bastianini, Luca Marini… Pour ma part je roule sur une Ducati depuis 2017 [sic, Miller a commencé à rouler en 2018 sur Ducati chez Pramac, il évoluait encore sur une Honda RC213V de l’équipe Marc VDS en 2017] et j’ai pu vraiment voir la moto évoluer au fil des années, et je peux vous dire qu’entre mes débuts avec Ducati et aujourd’hui c’est le jour et la nuit. »
« Il faut aussi souligner tout l’investissement de Ducati dans le projet. La marque est pionnière en tout : elle a été la première à utiliser des ailerons, la première à mettre en place le ride-height device, la première à utiliser le launch device… Ducati repousse constamment les limites, et les autres ne font que suivre, donc c’est fantastique de faire partie d’une structure comme celle-là, et de lui apporter un nouveau titre chez les constructeurs, et comme je l’ai dit pourquoi pas également un sacre chez les équipes à Valence. »
« Ducati est pionnière en tout : ailerons, ride-height device, launch device… »
Lors de la course Moto3 nous avons été témoins d’une manœuvre très dangereuse d’un pilote, qui fera ses débuts la saison prochaine en MotoGP [Darryn Binder a en effet accroché l’arrière de la moto de Dennis Foggia, ce dernier qui défendait ses chances de titre face à Pedro Acosta dans la catégorie des quarts de litre]. Pensez-vous que ce type d’accident puisse remettre en question la sécurité l’an prochain dans la catégorie ?
« Que voulez-vous que je vous dise ? Il m’est arrivé la même chose qu’à Darryn par le passé… »
Joan Mir le coupe : « Franchement ce n’était pas la même chose… »
Miller : « Tout le monde peut faire des erreurs. Tu fais référence à nos nombreux contacts en piste cette saison. Un contact, c’est une chose, et je comprends la différence, et je suis tout à fait d’accord sur le fait qu’il faut qu’il y ait une marge, et ce qui s’est passé aujourd’hui n’est vraiment pas bien, que ce soit pour Dennis Foggia qui a perdu le titre, mais aussi pour Pedro Acosta, car ce n’était sans doute pas la meilleure façon de remporter le championnat pour lui, surtout après la formidable saison qu’il a réalisée. »
« Il avait beaucoup de marge par rapport à ses adversaires en fin de course, et je pense que cela lui a retiré un peu de la saveur d’une victoire décrochée au terme d’une âpre lutte. C’est vrai que ce qui s’est passé aujourd’hui est très étrange, mais ce genre de chose peut arriver. Je ne suis pas inquiet ni d’un tempérament très anxieux, et même si le MotoGP est un autre monde comparé aux autres catégories, je ne pense pas que nous devions nous inquiéter de cela [de la venue de Darryn Binder dans la catégorie reine l’an prochain], car nous faisons tous des erreurs. »
« Je ne pense pas que nous devrions nous inquiéter de la venue de Darryn Binder en MotoGP l’an prochain »
« C’est vrai que Darryn est un pilote un peu sauvage. Je peux vous dire que la pression de passer directement du Moto3 au MotoGP est énorme, et que ce n’est qu’un avant-goût du défi qui l’attend [Miller est le seul autre pilote à avoir aussi fait le grand saut entre les quarts de litre et la catégorie reine, en 2015, ndlr]. »
« Mais il ne faut pas perdre de vue qu’on a vu Valentino Rossi faire la même erreur après tous ses titres, donc personne n’est à l’abri de ce genre de bévue, il faut bien se mettre cela dans la tête. Tout le monde est en train de tomber sur Darryn car l’accident a impliqué l’un des prétendants au titre, mais dans les faits cela arrive plus ou moins lors de chaque weekend de course. »
« Entre ma première Ducati et celle d’aujourd’hui, c’est le jour et la nuit »
« Si on reprend les deux courses de suspension de Deniz Öncü, je ne suis pas non plus d’accord avec cette sanction, car je pense qu’il n’était pas le seul fautif dans l’accident d’Austin. Il y en a d’autres qu’il aurait également fallu renvoyer à la maison, mais c’est une autre histoire. Si vous regardez tout ce qui se passe sur les réseaux sociaux entre Jaume Masiá et Andrea Migno par exemple, alors vous prendrez conscience de ce qui se passe dans ces catégories. »
« Pour être honnête, je pense qu’une limite d’âge ne va rien changer à l’affaire, car la plupart des gars qui commettent ces erreurs ont bien au-dessus de 18 ans. Au final ce n’est pas une histoire d’âge mais de tempérament ainsi que de respect que vous portez aux autres pilotes qui sont en piste avec vous. Si on reprend ce qu’il s’est passé entre Joan Mir et moi, nous entretenons une bonne relation, et au final il ne m’a jamais sorti de la piste. On a bien eu quelques échanges tendus suite à quelques passes d’armes, mais au final nous avons toujours été capables de nous assoir l’un à côté de l’autre et de rester cordiaux et bons amis. »