Pol Espargaró est arrivé chez Honda en signant il y a maintenant 18 mois un contrat à l’entête Repsol les yeux fermés. L’Espagnol n’avait alors évalué que le poids de l’histoire que ces couleurs représentaient en MotoGP, et il a ainsi quitté KTM où il était un pilote officiel ayant quasiment vu naître la RC16, mais en regardant Brad Binder et Miguel Oliveira concrétiser avec. Sa greffe sur la RC213V se révélera être hélas de l’ordre du rejet durant deux saisons consécutives. En chutant plus souvent qu’à son tour et en régressant dans la hiérarchie, il est tombé de si haut qu’il est tout heureux de revenir à son point de départ autrichien. Il lui reste six courses avant d’en finir avec ce qu’il faut avouer un échec personnel dans un ensemble HRC en plein naufrage…
Pol Espargaró fait partie de ces pilotes sur la grille de départ actuel du MotoGP qui attend avec impatience la fin de la saison. Elle avait pourtant bien commencé avec un podium au Qatar. Mais dès la manche suivante à Mandalika tout est allé de Charybde en Scylla. Lors des sept dernières courses, il n’a marqué que deux malheureux points. Il végète, avant d’affronter le Grand Prix d’Aragon de ce week-end, à une anonyme 17è place au championnat. Pire, avec ses 42 points marqués, il reste derrière son équipier Marc Marquez qui n’a pourtant plus participé à la moindre course depuis fin mai…
Sur motogp.com, il raconte ainsi son cauchemar éveillé, estampillé HRC : « j’attendais beaucoup de cette saison, en particulier à cause de la façon dont s’était déroulée la présaison et à cause du résultat au Qatar. Je n’ai pas chuté en présaison, j’étais parmi les plus rapides sur toutes les pistes. Puis les problèmes ont commencé. A Mandalika, ils ont changé les carters, et là j’ai eu un choc, je me suis demandé ‘qu’est-ce qui se passe ici ?’, je n’ai rien compris » raconte le pilote de 31 ans.
Pol Espargaró : « Honda a beaucoup souffert par le passé, mais cette année a été quelque chose d’extraordinaire »
Il poursuit : « Honda a beaucoup souffert par le passé, mais cette année a été quelque chose d’extraordinaire. Beaucoup de jeunes pilotes sont arrivés et il y a plus de Ducati sur la grille, et cela complique encore plus la situation. Il est difficile de se qualifier devant à faire une bonne course. De plus, la moto ne fonctionne pas bien et nous n’avons pas de nouvelles pièces pour améliorer la situation ».
Sur ce point, il apporte cette réflexion qui a fait florès dans le paddock et qui veut démontrer que la philosophie de travail des Japonais n’est plus adaptée au niveau actuel de la compétition, élevé par la démarche européenne en termes de développement d’une moto : « tout semble aller très lentement Quand tu dois tellement penser à quelque chose, ça prend du temps, et en compétition ça veut dire passer par des courses et perdre, perdre, perdre… et c’est très frustrant. Quand les Japonais t’amènent quelque chose, tu sais qu’ils ont eu le résultat qu’ils attendaient. C’est comme ça qu’ils fonctionnent ».
Une situation qu’il subit, mais Pol Espargaró tient à signaler que personne, chez Honda, ne lui reproche quoi que ce soit. Au contraire, la marque assume sa part dans cette déchéance, au point qu’elle lui a proposé un plan B : « j’ai eu l’opportunité de continuer avec Honda, et c’est pourquoi je leur porte beaucoup de respect. Ils savent que cette moto ne marche pas bien, et c’est pourquoi ils n’ont pas mis tout le poids sur mes épaules comme pour dire « tu n’es pas assez bon, tu quittes le projet ». J’avais l’opportunité de continuer, ils m’aimaient, mais j’ai choisi autre chose ». La lassitude l’a ainsi emporté, comme avec Alex Marquez qui a fui en direction de Gresini pour une Ducati, tandis que dans le cas d’Ai Ogura, on en est au refus d’obstacle.
L’an prochain, Pol laissera donc sans regret sa place à Joan Mir, qui rejoindra l’équipe Repsol Honda parce que Suzuki a décidé de quitter le championnat du monde MotoGP. Le frère cadet d’Aleix commencera un nouveau projet sous un auvent GASGAS Factory Team au sein de l’équipe Tech3 qui ne lui est déjà pas étranger. Et pour cause… Sous la couleur rouge et le nouveau nom se cache une RC16 orange bien connue : « c’est une moto avec laquelle je sais que je peux être rapide, je connais toutes les personnes qui seront avec moi et qui feront l’impossible pour que je sois rapide. J’irai là-bas avec l’objectif d’être le meilleur GASGAS, et le meilleur au sein de KTM » se réjouit-il déjà.
Après avoir roulé pour Yamaha, KTM et Honda, Pol Espargaró est convaincu qu’il a beaucoup à apporter au projet Mattighofen pour améliorer la RC16, un prototype qui, cette année ne s’est pas démarqué au-dessus de ses concurrentes non plus : « j’arrive avec un peu plus d’expérience avec d’autres usines, je sais aussi comment cette moto est née et comment elle a grandi. Je pense que je peux apporter plus que de la vitesse et des résultats, comme à faire une meilleure moto », termine l’Espagnol, à la recherche d’un second souffle.