Il faut croire que les anciens de chez Honda ne gardent décidément pas de bons souvenirs d’une période qu’ils espéraient pourtant prolifiques, au vu de la réputation et de l’histoire de la marque en Grand Prix. La déception en est autant plus grande que l’expérience vécue sur la RC213V a été de l’ordre de la galère. Alex Marquez, qui se réjouit à présent de sa nouvelle Ducati, ne manque pas une occasion pour égratigner son ancien blason, en insistant sur le fait qu’il est à présent bien loin de ce qu’il était. Mais il n‘est pas le seul. Pol Espargaró, revenu dans le giron KTM cette année, ne s’en prive pas non plus, la preuve…
Lorsque Pol Espargaró a quitté KTM presque sans préavis pour rejoindre les rangs de Repsol Honda, il était convaincu que ce serait pour y vivre l’apothéose de sa carrière. Au lieu de ça, après deux saisons calamiteuses qu’une 12è puis une 16è place au championnat ont confirmé, il ne s’est pas fait prier pour s’échapper du box HRC et revenir à sa base de départ autrichienne. L’expérience qu’il retire de ces deux saisons perdues est douloureuse, mais pas seulement pour lui. Ce qu’il a vu chez Honda, et qu’il met sur la place publique, interpelle sur ce qui se passe dans l’antre du premier constructeur mondial, au point de se demander si tout cela a encore un sens de poursuivre ainsi.
Sur crash.net, on lit ainsi ses propos assez durs pour Honda : « tout se résume au manque d’enthousiasme et de travail des ingénieurs, qui auraient dû régler la situation à l’époque » dit-il puis il ajoute : « ce n’est pas que j’ai été maltraité, mais je suis très frustré par la situation ». Et la situation est la suivante : « avec la blessure de Marc Marquez, Honda a décidé d’arrêter l’évolution de la moto. De plus, il faut ajouter les problèmes que nous avions déjà tandis que les autres marques continuaient d’évoluer. Or, techniquement, c’est un sujet qui appartient aux ingénieurs et techniciens spécialisés, car ce sont eux qui connaissent les raisons pour lesquelles une pièce fonctionne ou non ».
Pol Espargaró : « j’ai vu beaucoup de tranquillité et de détente en temps de crise et de manque de contrôle, et cela m’a beaucoup dérangé »
« Nous ne savions pas comment le réparer ou nous n’avions pas les outils pour le faire » ajoute-t-il avant d’inquiéter vraiment sur l’état d’esprit et la motivation des Japonais qui prennent apparemment leur situation de crise avec un coupable détachement : « tu vois que tu ne vas pas bien, qu’il y a beaucoup d’attentes et que tu ne peux rien faire car personne ne t’aide, et tu es pieds et poings liés. Ça ne s’arrange pas, tu n’as pas de nouvelles pièces pour renverser la situation et ça te désespère parce que tu ne vois pas d’issue ».
Mais c’est avec ces arguments que Pol Espargaró porte le coup de grâce : « j’ai vu beaucoup de tranquillité et de détente en temps de crise et de manque de contrôle, et cela m’a beaucoup dérangé ». Il envoie aussi ce message subliminal : « vous apprenez à qui vous pouvez faire confiance et à qui vous ne pouvez pas ». Puis il termine : « c’était frustrant et très dur. Être chez Repsol Honda est un privilège, très peu de pilotes sont choisis pour porter ces couleurs. Je me voyais avec l’obligation d’être la personne qui mènerait un projet comme celui-ci avec Marc Marquez, mais ce n’était pas le cas. Au lieu de ça, il y a eu de mauvais résultats, de la méfiance et de nombreuses chutes ».
Pol Espargaró a été remplacé à son poste par le Champion du Monde 2020 de MotoGP Joan Mir tandis que chez LCR Honda, c’est l’autre ancien de chez Suzuki Alex Rins qui a pris le guidon de la RC213V en lieu et place d’Alex Marquez. On leur souhaite, dans un premier temps, du courage et de la détermination…