Avant le Grand Prix d’Italie, l’officiel Ducati
s’affirmait comme l’un des principaux favoris pour le titre, tenant
même la dragée haute au golden boy Fabio Quartararo. A-t-il tout
perdu sur ses terres ? Analyse.
En MotoGP, une chute est rarement grave si elle ne
provoque pas de blessures physiques. En revanche, certaines
laissent des traumatismes psychologiques, en raison de la dureté de
l’impact ou du contexte crucial.
C’est le sujet du jour. En commettant une erreur « stupide »,
d’après ses dires, Francesco a peut-être perdu toute chance de
titre au Mugello. Révisons rapidement le début de
saison pour mieux comprendre le phénomène.
Bagnaia, espoir de Ducati usine, commence
idéalement sa saison en terminant 3e lors de la
manche d’ouverture, puis deux fois 2e au Portugal
et en Espagne. Les rouges sont clairement les meilleures machines
de la grilles, fonctionnant sur différents profils de circuit
(c’est évident à Losail mais ça l’est moins à
Portimão ou à Jerez). «Pecco »
maîtrise son sujet et gagne en régularité.
Au Mans, il franchit la ligne quatrième, après une course pleine
de rebondissements. Nous considérons ceci comme un bon résultat.
Puis vient le
Mugello. Comme vous le savez, le circuit toscan est
unique. Le Grand Prix d’Italie est sans doute la manche la plus
attendue chaque année, celle qui vaut « plus que les autres », à
l’image du Grand Prix de Monaco en F1 si vous
préférez.
Après la tragique disparition de Jason Dupasquier,
certains pilotes furent plus touchés que d’autres et c’est tout à
fait normal. Nous ne jetons pas la pierre à Francesco. Cependant,
pendant la course, une erreur de concentration le fit chuter, alors
qu’il occupait la tête.
Tomber est une chose. Tomber devant les tifosis, à la maison, où
une victoire Ducati est expressément attendue, le circuit est très
favorable à la Desmosedici, c’en est une autre. Le
genre d’erreur qui coûte cher, psychologiquement parlant.
Seulement un point séparait Fabio de Pecco avant cette présente
manche. Voir triompher Quarta’ a dû être difficile à encaisser pour
le pilote italien. Depuis, Bagnaia affiche une belle régularité,
mais plus un seul podium et un rythme de course loin des
favoris.
Lors de la conférence de presse catalane, lire dans les pensées
de Pecco était aisé. Le doute a pris le dessus.
Une fois qu’une once de doute traverse l’esprit de tels
compétiteurs, habitués à la gagne depuis tout petit, il est très
difficile de revenir au moins pour un championnat. Plus que l’état
physique, la confiance est la clé de tout
succès.
Un moment, une chute peut tout faire basculer. Ce fut aussi le cas
pour
Casey Stoner, au Grand Prix des USA
2008, « vaincu » aux yeux de tous par
Valentino Rossi. Même les esprits les plus coriaces
connurent telle mésaventure, à l’image de Jorge
Lorenzo lors de la saison 2014.
Tous les psychologues vous le diront : Seule la personne concernée
possède les ressources (ou pas !) pour revenir d’un échec. La
marque des grands champions n’est pas de gagner quand tout
s’aligne, mais de faire face à l’adversité psychologique et/ou
physique. Naturellement discret, Bagnaia fait ce
qu’il faut pour marquer des points précieux malgré l’envolée de
Quartararo.
Revenir de 47 points à la mi-saison est quasiment
impossible d’autant plus que la forme « d’El
Diablo » est ahurissante. Le sport nous apprend aussi que
beaucoup de choses peuvent se passer en neuf courses. Troisième du
championnat, rien n’est fait. Seul lui est maître de son
destin.
Évoquer rapidement Ducati est essentiel. Vous l’avez peut-être
remarqué, mais la firme est clairement moins forte depuis quelques
courses. Cela pourrait bien être corrigé sur le Red Bull
Ring.
Bagnaia doit profiter de cette pause pour se recentrer sur lui-même
et faire le plein de confiance. Ne l’enterrez pas tout de
suite, car si son compteur de victoire s’ouvre en
Autriche, il pourrait bien attaquer cette fin de saison en
outsider mort de faim, autrement dit très
dangereux pour le championnat.
Photo de couverture : Michelin Motorsport