De retour du Texas où ils ont respectivement terminé troisième et septième du Grand Prix MotoGP des Amériques, Fabio Quartararo et Johann Zarco sont passés par Paris pour la traditionnelle conférence de presse du Grand Prix de France qui se déroulera du 12 au 14 mai sur le circuit Bugatti du Mans.
Comme les années précédentes, cet événement s’est tenu sur une péniche des Bateaux Mouches amarrée sur les quais de Seine à proximité de la tour Eiffel, et, fatigués mais détendus, les pilotes se sont prêtés de bonne grâce au jeu des questions-réponses.
Après celles posées à l’intérieur du bateau (que vous pouvez voir ici) est venu le tour de celles énoncées par les journalistes présents, spécialisés ou non.
Fabio, le truc absolument nécessaire pour que tu fasses
un bon résultat ou pour que ta Yamaha fasse un bon résultat, c’est
que tu te donnes ce truc en plus au-delà des 100% ?
Fabio Quartararo : « C’est obligé,
c’est surtout les premiers tours ! Les 2 premiers tours, c’est le
plus important et je pense que sur la course Sprint, ça s’était
bien passé. Après, on a shooté. Sur la course normale, ça s’est
bien passé, mais je pense que, franchement, 80% de notre course, ça
se passe au premier tour. »
Et en qualif du coup ?
« Qualif et premier tour, c’est 90%, parce que le rythme, on
l’a toujours plus ou moins, mais c’est la qualif et le premier tour
qui sont très importants pour nous.
»
On t’a entendu, pendant le weekend, exprimer assez
clairement les limites qu’a ta moto par rapport au reste du
peloton. On a aussi entendu depuis le début de l’année, de temps en
temps, avoir une petite phrase de frustration sur le fait que ton
coéquipier n’est pas au même niveau, qu’il est pas devant, mais au
final, qu’est-ce qu’un coéquipier rapide pourrait apporter au
développement de ta moto, aujourd’hui, si elle a des limites de
fond ?
« On va dire que, sur le
développement, pas grand chose, mais je pense que ça peut aider, en
tout cas pour moi, pour voir où est vraiment la limite de la moto.
En Argentine, il avait fait une très bonne qualité sous la pluie
mais en termes de rythme il n’a jamais été vraiment beaucoup plus
rapide que moi. Et je sais qu’avec Maverick, ma première année chez
Yamaha officiel, la première demi-saison qu’il a faite avec moi, je
pense qu’on s’est vraiment aidé entre nous pour avoir une vitesse
plus élevée. Il y a peut-être même des circuits ou des virages où
il passe plus vite et donc j’essaie de passer plus vite et j’ai un
peu une idée de là où est la limite de la moto. Là, je me sens à la
limite partout mais peut-être que des fois, en allant ou en se
sentant même plus doucement, le chrono est plus rapide. Donc pour
moi c’est ça la plus grande différence. »
Tu disais après ce podium « je suis content mais
pas rassuré ». Qu’est-ce qui pourrait te rassurer
?
« Rassuré en regardant qu’on
peut vraiment se battre pour une très bonne qualif, et voir la
performance de notre moto. Là, je me suis fait passer par Marini
dans la ligne droite, 14 km/h de différence ! En sachant que
normalement on aurait fait un pas en avant sur la vitesse ! Donc
c’est quand même énorme, et sur sur moyenne de 20 tours à Austin,
je pense que si on compte le temps qu’on a perdu dans la ligne
droite, ça fait énormément de temps. Donc rassuré, je ne sais pas
quand on va l’être, mais, en tout cas, c’est important de
travailler et d’essayer de rester calme. »
Ce podium, il fait du bien : Ça te redonne un
petit coup de boost avant la tournée européenne ?
«
Oui, c’est sûr que ça fait du bien. On va dire qu’a Portimão,
on avait la vitesse mais en faisant un très mauvais départ et en
ayant du mal à faire des dépassements, ça a fait un un mauvais
résultat. En Argentine, le rythme était là, malgré que Nakagami m’a
tapé dedans et je suis reparti dernier. Donc voilà, un podium là,
ça fait du bien, mais comme je le dis, il manque encore plein de
choses pour vraiment être tout le temps devant. Mais petit à petit,
on peut faire de belles choses. »
Tu avais sous-entendu qu’on ne parlait pas encore
dans ton esprit de bataille pour le titre au vu de la moto, donc ce
podium ne change rien et n’est pas de nature à pouvoir viser le
titre…
« Pour l’instant, non, parce qu’en
plus de ça, je me sens bien mais il nous manque encore un petit peu
de vitesse pour vraiment se battre pour le titre. Pecco, il a 2 ou
3/10 de mieux nous, donc, tant qu’on n’ira pas chercher ces 2 ou
3/10, le championnat ne sera pas jouable. »
On sait que ça fait des années que le problème de la Yamaha
est pour doubler et se battre en paquet. Est-ce que tu dirais que
c’est une caractéristique intrinsèque du 4 en ligne face au V 4
?
«
Sincèrement, sur ça, je n’ai aucune expérience. Je n’ai aucune
expérience sur V 4 ou 4 en ligne, parce que j’ai toujours roulé
avec une moto avec les cylindres en ligne, donc savoir les
différences, je ne sais pas. Mais en tout cas, ce que je vois,
c’est que les Ducati marchent beaucoup plus vite que nous, les
Aprilia et pratiquement toutes les motos qui sont sur le peloton
MotoGP aussi, donc, si c’est la solution pour vraiment aller plus
vite, je pense qu’il faut le faire. Mais après, je sais qu’en
course le plus important, c’est avoir la capacité de faire un
dépassement, et en ce moment, on ne l’a pas et c’est ça qui nous
manque. »
Qu’est-ce que le Grand Prix de France a de si
particulier quand on est un pilote français ?
«
Le public ! C’est la chose la plus impressionnante. L’année
dernière, j’étais quand même énormément surpris de voir le nombre
de supporters, le nombre de personnes qui nous soutient, donc c’est
surtout ça plus que qu’autre chose. En plus, Claude sait vraiment
bien organiser un Grand Prix, et pas parce que c’est le Grand Prix
de France, mais je pense que c’est le Grand Prix où il y a le plus
de choses à faire le samedi soir : Il y a vraiment un très beau
spectacle, il y a des concerts. Pour les spectateurs, je pense que
c’est un des spectacles les plus beaux. »
Et pour les pilotes ?
«
Pour les pilotes, voir en tant que pilote français, c’est voir
le public. Comme je l’ai dit, c’est quelque chose
d’impressionnant. »
Tu le classes numéro un aussi ?
« Oui ! Après, c’est sûr que peut-être qu’un pilote
espagnol préfère Jerez, ou pas, mais en tout cas, en tant que
pilote français, c’est quand même incroyable de voir tout ce
soutien de tous les supporters. Mais en pensant en tant que fan, je
pense que le Grand Prix de France est un des plus beaux. »
Justement, en tant que pilote français, vous avez une
pression particulière de résultats ?
« On l’a toujours ! On veut toujours bien faire, des fois
même trop. Mais en tout cas sur les dernières années, c’est vrai
que j’ai tenu assez bien cette, ce n’est même pas une pression mais
on va dire ce stress. Mais voilà, cette année, c’est le millième
Grand Prix, je n’ai jamais gagné sur le territoire français, donc
il va falloir essayer de gagner cette première victoire en
France. »
Quelle importance a le test de Jerez qui arrive dans 2
semaines ?
« Alors, sincèrement, ça
ne va pas être très important parce qu’on n’a pas beaucoup de
choses à essayer. Donc c’est sûr que ça sera très important de voir
s’il y a quelques petites différences. Je sais que Cal teste
aujourd’hui et demain, ou demain et après-demain, à Aragón. Il va
déjà essayer ce qu’on doit essayer pour le test à Jerez; mais
malheureusement, ça ne sera pas de très gros changements.
»
Laissons de côté l’actualité. Avant le départ, une fois
sur la grille et dans le box, même si tu écoutes de la musique, il
y a forcément du stress. A quoi penses-tu précisément ? Y a-t-il de
l’appréhension ?
« On va dire que ça dépend des fois. Parfois, il y a des
moments où on est stressé, et parfois on ne l’est pas du tout. Je
ne sais pas pourquoi. Mais je ne pense à rien d’autre qu’à essayer
de faire un très bon départ et à essayer de se battre pour le
meilleur résultat possible. Mais je n’ai rien d’autre de précis en
tête.
La peur, non ! Il n’y a pas de peur. Après, c’est sûr qu’après
la première course sprint à Portimão, sincèrement c’était un peu la
foire. Je me suis dit « là, on va terminer tous en miettes
! » et finalement il y a eu quatre blessés. Mais Portimão,
franchement c’était spécial parce qu’on y avait fait les tests, on
était tous prêts et on est parti à fond dès le début. C’était une
course où il n’y a pas eu de peur, mais au bout d’un moment je me
suis dit qu’il y en avait un qui allait se foutre en l’air et qui
allait se faire vraiment mal. Cela a été le moment le plus chaud de
cette saison.»
As-tu un rituel avant le départ ?
« Non. Je mets juste toujours
le gant gauche avant le gant droit, et à chaque fois qu’on va sur
la grille, à peine arrivé et je repars au box. Je reste cinq ou six
minutes au box et je repars sur la grille. »