Paolo Ciabatti, ci-devant le directeur sportif de Ducati, s’est offert une conversation au coin du feu en cet hiver 2022 avec Manuel Pecino sur sa chaîne YouTube. L’Italien rappelle bien sûr l’importance de ce millésime dans l’histoire de sa marque, mais il signale aussi qu’il ouvre le défi de la confirmation qui sera l’objectif en 2023. Il évalue ses forces en rappelant que, chez Ducati Corse, on a souvent tout prévu, sauf ce qui allait se passer et que seule l’histoire a décidé. Il a aussi un mot sur Honda dont il identifie la faiblesse dans l’incroyable force de son leader Marc Marquez…
C’est un exercice dont ne se lasse pas Paolo Ciabatti et qui consiste à faire le bilan de cette saison 2022 pour Ducati. Une année magique s’il en est pour la marque de Borgo Panigale : « la saison a été super importante, nous avons remporté les deux titres » rappelle-t-il en incluant celui du WSBK. « En MotoGP, c’était plus compliqué parce que nous avions assez mal commencé la saison avec Bagnaia, mais nous n’avons jamais perdu la foi ».
Paolo Ciabatti mentionne que l’attente a été longue car les prémices de ce triomphe se sont révélées dès 2013 avec Andrea Dovizioso et Andrea Iannone… : « Nous avions changé et étions devenus compétitifs ». Oui mais voilà, il y avait un phénomène qui faisait systématiquement barrage… « Nous étions toujours deuxième. Le problème était de partager l’ascension avec celle de Marc Marquez, qui était incroyable ».
Alors, Jorge Lorenzo a été recruté pour bousculer la hiérarchie. Et rien ne s’est passé comme prévu : « quand nous avons décidé de signer Lorenzo, nous pensions que nous étions prêts à gagner le Championnat du Monde. Mais tout a fonctionné différemment car c’est Dovizioso qui s’est battu pour le titre jusqu’au bout. Avec Jorge, tout a commencé trop tard », souligne Ciabatti sur Motosan.
Et le malentendu s’est ensuite répété : « Ducati pense toujours à avoir deux pilotes compétitifs pour remporter le championnat du monde. En 2021 on pensait à Miller pour gagner, et à Pecco pour apprendre… » et on sait ce qu’il est advenu. De fait, pour 2023, il se garde bien de faire un pronostic, se contentant de ce constat sur son nouveau duo Pecco Bagnaia Champion du Monde en titre et Enea Bastianiani : « maintenant, nous avons l’équipe la plus forte, mais la plus difficile à gérer ».
Paolo Ciabatti : « Honda s’est beaucoup appuyé sur le talent de Marc Marquez et en faisant ça, ils ont perdu le cap«
Avoir ces deux Italiens véloces et ambitieux dans le même box en 2023 sera une tâche difficile pour le directeur sportif de Ducati. Ciabatti se souvient aussi de tout ce qui s’est passé cette saison et de la bagarre entre les deux : « les pilotes sont égoïstes, et si un jeune pilote peut gagner avec une équipe compétitive comme Gresini… il y a des moments où le pilote ne pensera pas à ce qui est important pour Ducati, mais plutôt à ce qui compte pour lui et son équipe ».
Paolo Ciabatti parle aussi de ses autres pilotes sur la Desmosedici promettant notamment à Jorge Martin un bel avenir dans les courses sprint. Et puis il y a l’arrivée d’Alex Marquez chez Gresini. Une recrue intéressante, même s’il reconnait que Ducati avait pensé à quelqu’un d’autre… « Nous avons commencé à parler à Miguel Oliveira. Nous avons également examiné la situation de Raul Fernandez. Je pense qu’Alex est un bon pilote pour Gresini et je pense qu’il va surprendre. Je pense qu’il ne parlera pas beaucoup avec son frère ». Qui n’est autre que Marc, rappelons-le.
Justement, Marc Marquez… Ciabatti l’identifie comme la grande force mais aussi le fléau de Honda. Il explique : « il se donne toujours à 100% et le battre est un bon objectif. Nous préférons gagner avec un Marc Marquez au championnat. Je ne sais pas quelle moto il aura, mais il y a une jeune génération qui va très vite. Voir que deux marques italiennes sont parmi les meilleures en MotoGP est assez rare. Je pense que Honda s’est beaucoup appuyé sur le talent de Marc, et en faisant ça, ils ont perdu le cap », conclut-il. Avec cette approche, la mention de Ciabatti sur le fait que Ducati a toujours cherché à avoir deux pilotes compétitifs en son sein prend toute sa dimension.