Livio Suppo est un homme au parcours édifiant dans le paddock. Il est arrivé chez Ducati après avoir travaillé pour Benetton en 1996 en catégorie 250 puis en 1998 également en 125 avec Marco Melandri, et en 1999. Il a été directeur d’équipe pour les rouges, fonction qu’il a poursuivi au sein de la puissante écurie Repsol Honda. Il est maintenant retiré du milieu et laisse libre cours à ses souvenirs… Qui sont autant de secrets d’arrière-cours révélés ! Il nous a levé le voile sur la fin de saison tumultueuse 2015 qui a scellé la relation entre Valentino Rossi et Marc Márquez. Voici à présent qu’il nous détaille l’arrivée de ce dernier au HRC…
Livio Suppo est arrivé chez Honda après de bons et loyaux services chez Ducati. Mais sa période rouge s’est terminée de façon un peu tendue, une situation qu’il détaille avec, comme fil conducteur, le cas Casey Stoner, qu’il retrouvera justement au HRC… « En 2009, Nakamoto, vice-président du HRC, m’a demandé de lui envoyer un CV, car ils recherchaient un manager pour le MotoGP. 2009 a été une année très difficile pour moi chez Ducati, car Stoner avait sauté trois courses à cause de problèmes physiques dus à une intolérance au lactose. J’ai défendu le pilote, également contre les attaques du sponsor. Bref, ce fut une période compliquée et l’idée de travailler pour HRC m’a fasciné. Je l’ai dit à Filippo Preziosi alors directeur technique Ducati et je suis allé à Tokyo à mes frais entre le Grand Prix d’Australie et celui de la Malaisie pour rencontrer le président de Honda. Ils m’ont proposé un contrat de 5 ou 10 ans. Ils me donnaient une grande confiance et j’étais convaincu. »
Installé chez Honda, Livio Suppo a travaillé pour attirer dans ses filets Casey Stoner. Une mission réussie : « nous étions les précurseurs de la mode de signature des contrats pour la saison suivante bien à l’avance » se souvient l’Italien. « Pour HRC, il était essentiel d’avoir Stoner et nous l’avons pris très tôt, dès Jerez en 2010. Casey n’était pas satisfait de la façon dont les choses se sont passées chez Ducati en 2009 et il voulait changer. De plus, en 2009 et 2010, il ne comprenait plus s’il ne pouvait plus aller vite ou si le manque de résultats était dû à la moto. Il a donc décidé de venir au HRC, la maison avec laquelle Doohan, son héros, avait conquis 5 championnats du monde. La condition était que toute son équipe le suive : si son équipe restait à Ducati, il y resterait. »
Ducati a donc été dépouillé et ce n’est pas l’arrivée de Valentino Rossi, lui aussi avec son équipe, qui a comblé le vide laissé… Mais l’Australien, en pleine gloire, a décidé de tout arrêter : « il a chamboulé les plans de Honda : nous pensions qu’il courrait pour nous pendant quelques années. En 2011, nous avions déjà signé avec Márquez, avec l’idée de former une équipe Márquez / Stoner. A Jerez en 2012, Nakamoto lui a fait une offre qui nous paraissait essentielle d’un point de vue économique. C’était vraiment beaucoup d’argent, mais il a dit non. Je pense qu’il était venu à l’exaspération de cette vie. »
Les choses ne tiennent donc qu’à un fil… Avoir un duo Stoner / Márquez était donc promis, mais le premier cité a bifurqué, laissant le champ libre au second… Qui aurait déjà dû être en place ! Suppo révèle en effet : « pour moi et pour Nakamoto, il avait déjà semblé en 125 et en Moto2 qu’il était un phénomène. Nous avons signé avec lui en 2011, avant qu’il ne se blesse en Malaisie. Alzamora voulait l’emmener directement en MotoGP, puis il s’est blessé et il n’en a plus jamais parlé, mais nous envisagions une solution pour 2012. Sa blessure a changé les plans de son manager. »
Heureusement Marc Márquez s’est remis et on connait la suite. Mais à bien lire Livio Suppo, sur Moto.it, on constate qu’à aucun moment Dani Pedrosa n’a été considéré. Son sort était scellé carrément dès 2011. La blessure de l’un, puis le départ de l’autre lui ont permis de poursuivre une carrière que Honda n’envisageait plus pour lui. On ne s’étonne plus trop, dès lors, de son bonheur actuel de faire bénéficier de son expérience l’usine KTM…