On parle aujourd’hui d’un monde qui a changé à cause d’une pandémie, mais on n’oublie qu’il avait déjà commencé à se modifier avec une urgence écologique qui a précédé la crise sanitaire. Tout le monde veut le bien de la planète, mais lorsque cet objectif sort de la saine intention citoyenne pour devenir un enjeu politique et économique, on change la donne. L’écologie punitive est née, avec sa fiscalité et ses stigmatisations. La couleur verte réouvre des heures noires de l’Histoire où il faut se déterminer pour un camp en mettant de côté sa libre-pensée. On entre en résistance ou on collabore. La dernière solution est évidemment plus confortable. Le monde des Grands Prix n’y échappe pas. La preuve.
Les messages pour une compétition propre s’accumulent en ce moment dans le paddock des Grands Prix. Récemment, Michelin a annoncé son ambition d’avoir 100% de matériaux durables dans tous ses pneus à horizon 2050. Cette ambition verra une première concrétisation en 2030 avec un objectif de 40% de matériaux durables à l’échelle du Groupe, en ligne avec le plan stratégique Michelin In Motion.
Dans le championnat de MotoE, en tant que laboratoire d’innovation, Michelin Motorsport est même en avance par rapport à cet objectif 2030 : pour la saison 2021, les pneus bénéficient déjà de 40% de matériaux durables dans les pneus arrière et de 33% dans les pneus avant. Michelin utilise un large spectre de matières biosourcées et recyclées pour la fabrication de ses pneus pour la MotoE, notamment : écorces d’orange et de citron, résine de sapin, huile de tournesol, sève d’hévéa, pneus usagés de camionnettes et de voitures, acier des ferrailles…
Des pneus à base de pelures d’orange et de citron, voilà qui sensibilise et ouvre des horizons. L’atmosphère des courses sera peut-être enrobé d’un délicieux arôme d’agrumes avec des motos au cadre en guimauve et aux carénages dotés d’ailerons en réglisse. Les box seraient aussi en pain d’épice. Cela étant dit, l’essence s’annonce également comme un prochain délicieux élixir. La mise au point de carburants durables a été annoncée comme une priorité.
Que penser ce ces démarches et de cette communication ? Difficile à dire dans une période de transition. Pour le moment, ça ne convainc pas grand monde et ça ne satisfait personne. Mais la ligne politique est définie : la FIM, l’IRTA, la MSMA et Dorna Sports ont commencé à travailler sur le recentrage des objectifs de durabilité à long terme du Championnat du Monde FIM MotoGP. Toutes les parties s’accordent sur l’importance de la durabilité à la fois au sein du Championnat et dans le monde entier, et conçoivent une voie pour rendre toutes les classes du Championnat du Monde FIM MotoGP plus respectueuses de l’environnement. ce qui n’empêche pas les mêmes d’encourager la sortie de terre de nouveaux circuits, comme celui de Mandalika dont il serait intéressant de présenter le bilan carbone.
MotoGP : et demain, ce sera silence on tourne ?
Mais l’impératif est là et sur la ligne d’arrivée de cette course, on imagine qu’il sera prononcé l’arrêt de mort du moteur à combustion. Heureusement, le MotoE est déjà là. Les tribunes ont été réduites au silence, puisque vide d’un public qui n’est plus autorisé. Demain, aucun bruit ne viendra de la piste. Sur ce point, Lin Jarvis, l’homme de Yamaha a déclaré : « les émotions sont très importantes pour notre sport, et c’est le son et la vitesse. Ce phénomène, généré par un moteur à combustion interne, est difficile à reproduire ». Néanmoins, le Britannique est convaincu que le championnat du monde moto va également évoluer à moyen et long terme : « la tendance est à venir de toute façon. J’estime que nous verrons le développement de nouvelles technologies de propulsion en cinq ans ».
« Le sport moto n’est pas le problème, il fait partie de la solution », assure de son côté Pau Serracanta, directeur général du MotoGP. « La vérité est que nous parlerons à l’industrie des moteurs électriques et des différents carburants. Cela ne sera pas décidé par Dorna. L’industrie nous conduit dans la bonne direction. Nous essayons d’acquérir autant d’expérience que possible. Le MotoE est une expérience fantastique. J’ai toujours été un amateur d’essence, mais les courses de MotoE sont fantastiques », insiste-t-il, faisant référence aux courses de sprint courtes et durement disputées.
« Bien sûr, il n’y a pas de bruit de moteur » dit le responsable qui, en développant sa remarque lève le voile sur le format de la compétition de demain… « Mais si vous regardez les courses à la télévision et écoutez un commentateur, ce n’est en fait pas un problème. Nous verrons comment nous pouvons tous façonner l’avenir avec l’industrie de la moto ». Les grandes messes populaires dans les cathédrales à ciel ouvert que sont les circuits dans une ambiance survoltée et bruyante sembleraient donc à ranger au rayon des souvenirs. Cela a commencé avec les distanciations imposées par la pandémie. Mais que l’on se rassure, et même si on ne le sait pas encore, on décide pour notre bien…