En MotoGP comme ailleurs, les petits sous-entendus font parfois les grandes histoires. Ainsi, chez Yamaha, au sujet de la constitution du couple Rossi–Lorenzo. On se souviendra que le premier cité avait mal vécu l’engagement du jeune Majorquin, au point de dresser un mur pour bien séparer son côté du box de l’autre. Maintenant qu’il y a prescription, avec le départ à la retraite du moins âgé des deux, Lin Jarvis revient sur cet épisode en rappelant que c’est bien le Doctor qui en a été le déclencheur…
Le passage de Jorge Lorenzo sur la planète MotoGP a laissé des traces. Et écrit une partie de l’histoire. Il a remporté les 44 victoires et les trois derniers titres mondiaux de Yamaha. De 2008 à 2016, l’Espagnol a piloté pour la marque japonaise. Le directeur de l’équipe Lin Jarvis se souvient de son poulain devenu pur-sang : « si vous me demandez comment je le décrirais en un mot, je prendrai celui de têtu. » Il ajoute : « il était dur envers lui-même, dur envers ses adversaires et un grand champion. »
Kenny Roberts, Eddie Lawson, Wayne Rainey et Lorenzo ont chacun remporté trois titres mondiaux avec Yamaha. Valentino Rossi a été quatre fois champion avec la marque au diapason. En 2008, Lorenzo a remplacé Colin Edwards, qui rejoignait le team satellite Tech 3. Por Fuera n’a pas raté son arrivée avec une pole position et une victoire après trois Grands Prix.
Mais pourquoi ce recrutement ? « C’est une histoire intéressante », raconte Jarvis. « Valentino nous a rejoints en 2004 et nous avons remporté deux championnats et avons presque remporté le titre en 2006. Valentino envisageait sérieusement de passer au sport automobile et il risquait de nous quitter. »
« Nous avons donc dû chercher quelqu’un qui puisse succéder à Valentino, ce qui n’était bien sûr pas facile. Vous avez besoin d’un talent extraordinaire et d’un instinct de tueur, comme nous l’avions vu chez Jorge dans les catégories intermédiaires. C’est ce qui a attiré notre attention sur lui et nous avons entamé des pourparlers » ajoute Jarvis.
Après ses trois premières courses en MotoGP, Lorenzo était en tête du classement à égalité avec Dani Pedrosa. « Il semblait qu’il était imbattable », se souvient Jarvis. « Puis il a eu ce grave accident en Chine où il s’est cassé les deux chevilles, mais il n’a pas abandonné le meeting. Nous l’avons poussé vers la moto dans un fauteuil roulant et il a terminé quatrième. »
Après la Chine, lors de la course suivante, de nouveaux accidents et blessures se sont produits. Dans la seconde moitié de la saison, seuls deux autres podiums ont suivi. Lorenzo a récupéré. En 2009, il a été en lice pour le sceptre et en 2010 pour la première fois champion du monde. Dans les premières années, il y avait beaucoup de duels sur et en dehors de la piste avec son coéquipier Rossi.
« Nous avons remporté le Triple Couronne trois fois de suite et il y avait de l’émulation. Ce n’était pas facile. Le coéquipier était le plus grand rival quotidien. J’ai beaucoup appris au cours de ces années et je pense que Jorge aussi ainsi que Valentino ont beaucoup appris » commente Lin Jarvis.
2012 et 2015 ont été suivis par deux autres titres mondiaux. Lorenzo est à ce jour le seul pilote à avoir remporté un titre sous l’ère Marquez. « C’est un perfectionniste et il cherchera toujours la limite », précise Jarvis. « Il était spécial et il est l’un des meilleurs champions que nous ayons vus en MotoGP ».
Cette carrière réussie est maintenant terminée. Pour Jarvis, ce retrait n’a pas été une surprise : « Jorge a eu beaucoup de problèmes cette année et lors des courses à l’étranger, il a constaté qu’il lui manquait quelque chose et qu’il n’avait pas confiance en la moto. »