La nouvelle du retrait des couleurs Petronas du paddock des Grands Prix à la fin de cette saison était connue, cependant, il manquait toujours le sceau officiel pour définitivement clôturer le dossier. Il est arrivé durant le jeudi qui était la veille de ce Grand Prix de Grande Bretagne qui marque ce week-end la douzième manche du championnat. Le message est assez poignant et surtout il pose quelques questions. Du genre comment un team privé qui peut être fier d’un parcours qui l’a amené notamment à mettre un de ses pilotes second au championnat MotoGP peut se retrouver soudainement démuni et déçu à ce point ?
Sur le sujet de l’écosystème du paddock des Grands Prix, deux événements récents méritent attention. Dans le sens de l’avertissement. Ainsi, nous avons une structure VR46 qui devait montrer en MotoGP avec un soutien financier historiquement conséquent dans le milieu et qui se transforme au fur et à mesure des jours qui passent en mise en place d’un team privé où il faudra, comme partout ailleurs, garder un œil sur son budget. Dans le cas de Petronas c’est pire. Voilà un pétrolier malaisien qui faisait le plein de trois écuries réparties dans les trois catégories du promoteur Dorna qui tire sa révérence. Et coupe donc le robinet.
Razlan Razali, qui est en première ligne de cette ambition malaisienne, est dur avec lui-même en mentionnant dans son communiqué l’échec de ne pas avoir fait monter un de ses compatriotes au sommet de la hiérarchie des Grands Prix. Il est vrai que Petronas se voulait une filière. Cependant, sans cette enseigne, il n’y aura pas eu Fabio Quartararo, et sans doute jamais avant encore longtemps une équipe satellite Yamaha n’aurait remporté autant de succès. En 2020, il y en a eu six en quatorze courses et Morbidelli, son pilote, est le vice-champion en titre. Si Petronas se retire et que l’ambiance semble être celle de la déception, ce n’est donc pas du fait des résultats.
En revanche, les positions de Lin Jarvis pour Yamaha à l’égard de cette équipe n’a jamais été chaleureuse. Elle a toujours été identifiée ostentatoirement comme cliente alors que sous d’autres cieux on définit ce type de structure comme des partenaires. Une reconnaissance que Razali voulait. Au lieu de quoi, on lui présentait la facture pour une M1 plus évoluée, à un prix plus élevé qu’une proposition faite par Yamaha à une aventure VR46 qui était encore dans les limbes et où tout restait à prouver, à un moment où Petronas avait clairement démontré ses capacités.
Petronas devait aussi trouver des jeunes et les affirmer. Quartararo en est l’exemple réussi, mais ensuite, Yamaha a installé Rossi et lors des deux derniers Grands Prix d’Autriche, il a fait équipe avec un Crutchlow de 35 ans. Il finira sans doute la saison avec un Dovizioso du même âge. A l’addition des deux fiches d’état civil, les couleurs malaisiennes se présenteront comme la structure ayant la moyenne d’âge la plus élevée. Quant à Morbidelli, Lin Jarvis a déjà annoncé sa montée dans l’équipe usine, oubliant ainsi Razali qui est techniquement encore son patron puisque l’italo-brésilien a un contrat Petronas.
Cela fait beaucoup et c’est immérité au vu des résultats sportifs constatés en seulement trois ans de MotoGP. Razali dit que l’aventure va continuer sous d’autres formes et que ce nouveau dispositif sera révélé à Misano le 16 septembre. Mais ça ne concernera que le MotoGP. Les personnels des Moto3 et des Moto2 sont biffés. Ce sera aussi sans doute avec Yamaha, mais ce n’est pas encore officiel. Côté pilote, la rumeur penche pour un duo Dovizioso, qui devrait finir la saison aux côtés de Rossi à partir d’Aragon, et Darryn Binder venu directement du Moto3.
Quant à Petronas, nous verrons comment l’intensité de sa haute implication en Formule 1 dans la meilleure écurie du plateau va s’orienter. Si elle diminue, c’est qu’il y aura aussi eu une raison économique dans son désengagement en MotoGP. Dans le cas contraire, c’est que quelque chose a mal été appréhendé politiquement parlant et cela devra être identifié et analysé par Dorna qui voit un généreux partenaire le quitter.
En attendant, voici les derniers mots sur cette aventure Petronas formulés par Razlan Razali et Johan Stigefelt.
Razlan Razali commence : « nous avons eu un parcours exceptionnel ces dernières années. Depuis un petit début en 2015, nous avons fait un grand pas en 2018 lorsque nous avons obtenu l’entrée dans la catégorie reine et construit une équipe MotoGP à partir de zéro. En 2019, nous étions sur la grille et à seulement après quatre courses de notre saison de débutant, nous étions au premier rang. Dans la septième course, nous étions déjà sur le podium. En 2020, nous avons obtenu la première victoire en course d’une équipe satellite Yamaha en MotoGP depuis plus de 20 ans et avons terminé deuxième au classement général des équipes et des pilotes. En 2021, nous avons couru avec le plus grand pilote de tous les temps, Valentino Rossi. C’est une histoire incroyable ».
Le retrait de Petronas a un impact sportif et économique dans une conjoncture tendue
« L’équipe disputera sa dernière course à Valence et nous remercions tout notre personnel, nos pilotes, nos fans et nos partenaires pour leur soutien » a-t-il poursuivi. « En particulier, nous remercions Petronas, sans qui rien de tout cela n’aurait été possible. Ensemble, nous avons poussé la marque Petronas et l’expertise malaisienne au premier plan et donné une exposition et une couverture sans précédent à la marque, dépassant de manière exponentielle toutes les attentes . »
« Nous remercions également le Sepang International Circuit pour sa prévoyance et son soutien aux talents émergents malaisiens sur une longue période. Notre rêve commun était qu’un pilote malaisien se batte pour le podium du Championnat du Monde MotoGP. Malheureusement, nous n’avons pas été en mesure d’y parvenir dans la courte vie de notre équipe, mais nous avons eu un énorme succès à d’autres égards. Notre dernière saison n’est pas encore terminée et nous continuons à viser les meilleurs résultats possibles dans les trois classes. Merci à tous », a-t-il conclu.
Johan Stigefelt a ajouté : « merci à Petronas pour l’opportunité qu’il nous a donnée au cours des trois dernières années et pour tout ce que nous avons accompli ensemble. Je suis triste que nous n’ayons pas pu continuer ce projet car nous avons créé une grande équipe dans les trois catégories du championnat du monde en très peu de temps et notre vision était qu’il s’agissait d’un projet à long terme. Nous avons travaillé avec des gens incroyables, des pilotes fantastiques et avons bénéficié du soutien de partenaires formidables et de fans formidables et nous leur exprimons notre sincère gratitude ».
« Merci aussi au Sepang International Circuit avec lequel la relation remonte à 2015 » a-t-il rappelé. « Ensemble, nous sommes passés d’une petite équipe de deux pilotes Moto3 à l’une des plus grandes équipes ayant jamais existé dans le paddock MotoGP. Je suis fier d’avoir fait partie de ce voyage et sans le Sepang International Circuit, cela n’aurait pas été possible. En tant qu’équipe, nous avons remporté notre première victoire, en Moto3, au Mans avec John McPhee en 2019 et nous avions déjà obtenu notre première pole position MotoGP au GP d’Espagne avec Fabio Quartararo à Jerez la même année. Nous avons remporté six victoires en MotoGP avec Fabio et Franco Morbidelli en 2020. Nous gardons de fabuleux souvenirs des trois dernières années, mais maintenant nous nous tournons vers le reste de cette saison pour terminer l’année de la meilleure façon possible ».
« En particulier, je tiens vraiment à remercier tous les membres des équipes Moto2 et Moto3, ce ne sont pas seulement des collègues mais sont devenus de véritables amis ces dernières années. Il m’est très difficile de dire au revoir à toutes ces personnes, d’autant plus qu’elles ont toutes été essentielles à notre succès et à la structure que nous avons bâtie ensemble au fil des années. Je veux tous les remercier. Nous avons un nouveau projet passionnant pour l’avenir. Nous restons dans le paddock MotoGP avec de nouveaux maillots à porter. Mais nous en reparlerons plus tard. Pour l’instant, nous avons les courses restantes de la saison 2021 à courir aussi fort que possible. Merci à tous ».