Devenir champion du monde MotoGP est loin d’être une
mince affaire. Au XXIe siècle, seulement huit pilotes ont réussi
cet exploit surhumain.
Fabio Quartararo, désormais plus grand pilote français de tous les
temps, fait partie de cette caste. Revenons sur les cinq
moments qui ont façonné son triomphe.
1) Grand Prix de Doha
La deuxième manche de la saison, disputée sur le circuit de
Losail, fut pleine de surprises. « El
diablo » avait débuté la saison fort convenablement (5e
place), mais dans l’ombre de la performance de son coéquipier
Maverick Viñales. Après une superbe remontée,
Fabio réussit à remporter la course au nez et à la barbe de
Johann Zarco.
Cette victoire est importante pour plusieurs raisons. Tout d’abord,
il s’agit de sa première pour Monster Energy Yamaha
MotoGP, mais au-delà de ça, il vient à bout de ses démons
de l’an dernier. Fabio apparaît plus mature que jamais et prêt à en
découdre. En gagnant, le français prévient tout le plateau.
Désormais, il pointe en deuxième position au général à quatre
unités de Zarco.
2) Grand Prix d’Espagne
Sur le papier, une 13e position n’est pas un grand résultat, vous
en conviendrez. Cependant, cette performance – c’est le terme – fut
primordiale dans son ascension vers le sommet. Après avoir mené la
course d’une main de maître, distançant considérablement les
Ducati, Fabio se met à brusquement ralentir. Panne
mécanique ? Problème électronique ? Que nenni.
D’un seul coup, Quartararo est pris d’une douleur immense au bras
droit, symptôme caractéristique du syndrome des loges. Son rythme
s’effondre de tour en tour, jusqu’à franchir la ligne d’arrivée
13e. Ce jour-là, rester en piste et se faire dépasser sans arrêt
nécessitait un mental à toute épreuve. L’âme du champion,
comme nous l’avions caractérisée après course.
Cet épisode, aussi triste soit-il, reste un tournant de la
saison 2021.
3) Grand Prix de France
Ce n’est un secret pour personne : Le mouillé et les conditions
changeantes ne sont pas le point fort de Fabio
Quartararo. C’est, en partie, ce qui avait causé sa chute
au classement fin 2020. Pourtant, tout grand champion doit pouvoir
affronter les caprices de Dame Nature. La météo du Mans,
capricieuse, n’a pas épargné les pilotes du mondial cette année. À
la surprise générale, « El diablo » s’en sort
admirablement bien malgré le profil du weekend, et monte sur le
podium à domicile.
Les heures sombres de 2020 sont derrière lui. En plus de cela,
Fabio se voit hériter de la première place du classement
provisoire, un point seulement devant Francesco
Bagnaia. Une nouvelle ère, débutée en Sarthe, est sur le
point de commencer.
4) Grand Prix d’Italie
Pour gagner, il faut des perdants. Cette notion
simple mais si cruelle est pourtant primordiale. L’adversaire
désigné de l’officiel Yamaha était donc Bagnaia, auteur d’un très
beau début de saison (trois podiums mais toujours pas de
victoires). Le circuit du Mugello est particulier, il s’agit là de
l’épreuve reine du championnat, celle qu’il faut gagner. Depuis
toujours, les Italiens ont à cœur de faire bonne figure à la
maison.
Dès l’extinction des feux, Pecco s’envole et prend le
commandement. Autoritaire, il pousse énormément devant
Fabio, mais commet une erreur irréparable. Dans Arrabiata 2,
l’officiel Ducati perd l’avant et tout espoir de contenir le
français par la même occasion. D’une manière «
Lorenzo-esque »,
Quarta’ remporte le Grand Prix d’Italie et colle un 25-0 à son
concurrent direct au championnat.
Il s’agit, sans aucun doute, du tournant de la saison. Le «
momentum » a changé, et rien ne semble pouvoir freiner
Fabio. Le mental de Bagnaia est logiquement touché, lui qui ne
devait surtout pas craquer. D’ailleurs, il ne montera plus sur le
podium pendant quatre courses et devra attendre le deuxième round
autrichien pour refaire parler de lui.
5) Grand Prix d’Émilie-Romagne
52 points d’avance, trois manches à disputer. Première
balle de match. Malgré une qualification désastreuse sur
un asphalte traître au possible (13e puis 15e), Fabio ne subit pas
la pression. En effet, Tout repose sur les épaules de Bagnaia,
poleman pour la quatrième fois consécutive. Sous la menace de
Marc Márquez, l’italien, chez lui de nouveau, doit
envoyer des tours parfaits sans flancher.
De son côté, Fabio nous offre un beau spectacle, remontant les
concurrents un à un, tout en ne commettant pas la moindre erreur.
Une fois dans le bon groupe, il parvient à se hisser
confortablement en 5e position, sans pouvoir espérer mieux.
En une seconde, tout bascule. Dans la cassure à gauche suivant
Curva del Carro, Pecco chute lourdement, de la
même manière que Jack Miller un peu plus tôt.
Miguel Oliveira était lui aussi tombé (oublié par
la réalisation), ce qui propulsait notre héros troisième mais peu
importe : Il était champion du monde quoi qu’il arrive, même en ne
finissant pas.
Ce magnifique effort (peut-être sa plus belle course cette année)
conclut une saison exceptionnelle de régularité, de maîtrise et de
force mentale. Ceci promet une saison 2022 haletante avec,
espérons-le, un retour du Marc Márquez que nous
aimons tant.
Photo : Michelin Motorsport