Johann Zarco roulera donc sur une Ducati en 2020 en MotoGP. Elle sera aux couleurs d’Avintia – qui n’étaient cependant pas les préférées du Français au départ – ce sera une GP19 et non une GP20, et l’annonce officielle est attendue dans les heures qui suivent. Un épilogue qui consacre la réussite d’un incroyable pari lancé par un homme qui n’a jamais douté de lui-même et de ses capacités. Une audace qui mérite d’être soulignée, une conviction qu’il ne faudra jamais oublier. Respect…
Il y a un an, Johann Zarco endossait le statut de pilote officiel KTM, avec tous les avantages qui vont avec, à commencer par un salaire conséquent. Un aboutissement en MotoGP. La suite consiste, généralement, à faire perdurer cette situation qui, en elle-même, donne le signe d’une carrière aboutie.
Mais Johann Zarco n’est pas de ce bois-là. Son approche, son caractère le rendent incontestablement moins accessible que la fraîcheur d’un Fabio Quartararo. Il en serait même antipathique avec cette impression d’insatisfaction permanente qui tétanise son entourage dans le box. Cependant, cet aspect montre aussi un homme transparent, franc, tant dans ses gestes que dans ses mots. Dans un environnement lissé, Johann Zarco est une aspérité qui peut déranger. Et de laquelle on s’écarte.
Une situation qui ne serait pas tolérable si l’homme n’assumait pas pleinement ses convictions. Or, justement, Johann Zarco assume. Il ne sentait pas bien chez KTM, il voyait que le projet RC16 ne lui conviendrait jamais, alors, plutôt que de donner le change par des déclarations creuses, redondantes, et finalement hypocrites, il a regardé ses patrons en face et il leur a dit qu’il stoppait là l‘expérience. Il renonçait ainsi à l’œuvre d’une vie, claquant la porte de la caste des nantis officiels, pour se retrouver sans rien.
Johann Zarco avait décidé sans préméditation, sans plan B en tête, mais avec le cœur et la hargne d’un pilote certain de son potentiel. Un suicide professionnel ? Tous les indices étaient réunis pour en arriver à cette fatale conclusion. C’est alors que Yamaha est arrivé avec un bon contrat de pilote test, au vu des circonstances. Dans le même temps, chez Honda, une RC213V se retrouvait orpheline d’un Nakagami parti se faire opérer d’une épaule. Là encore, le choix du Français a pétrifié : plutôt que d’une mission sûre et pérenne, le double Champion du monde se lançait pour une pige de trois Grands Prix à l’issue incertaine.
Lors de ces trois apparitions, il s’est remis en selle, malgré deux chutes en course et seulement une 13e place conquise. Cependant, chez Honda, il n’a pas été celui que l’on a privilégié pour succéder à Jorge Lorenzo. La route choisie tournait à la voie sans issue.
Jusque-là seul à faire face à son destin dans le paddock et sur la piste, Johann Zarco a reçu le renfort à Valence d’un Claude Michy dévoué à la cause de ses compatriotes. L’organisateur du Grand Prix de France a mis en exergue le talent de Johann et a été écouté par Ducati. La firme de Borgo Panigale a compris qu’intégrer un pilote ayant roulé avec une Yamaha et récemment avec une Honda pouvait être utile à son programme Desmosedici, dont la priorité est maintenant le châssis. De même, prendre Zarco, c’est aussi avoir un bon pilote avec soi plutôt que contre et au profit de la concurrence.
L’histoire s’achèvera donc de façon heureuse. Claude Michy a apporté la touche finale essentielle à ce parcours à haut risque qui a cependant été choisi et assumé de bout en bout par le pilote Johann Zarco. Tout le monde l’identifie à présent comme un homme qui sait ce qu’il veut, que sa démarche dans le milieu est dictée par la seule motivation sportive. Son expérience montre aussi que le MotoGP reste une histoire d’homme, que l’on peut rester maître de son destin en décidant pour soi, librement. Respect champion.