Joan Mir souffrirait-il d’un manque de reconnaissance né de la malédiction d’avoir été Champion du Monde au terme d’une saison vécue sous le joug de la crise sanitaire ? Celle-ci sévit toujours, mais l’étau s’est desserré en 2021 offrant 18 courses plutôt que 14 et avec une expédition outre-mer en prime. Et puis Marc Marquez a été là la plupart du temps. Du coup, la couronne 2021 de Fabio Quartararo semble autrement plus scintiller que celle qu’a ramenée l’Espagnol à une usine Suzuki qui ne l’avait plus touchée depuis 20 ans. Et ça l’agace.
Le talent de Joan Mir est incontestable, cependant, il semble que cela ne suffise pas pour l’identifier spontanément parmi les cadors du MotoGP. Le paradoxe est d’autant plus cruel qu’il est tout de même déjà Champion du Monde de la catégorie, et qu’il est même doublement couronné, puisqu’il l’a été en Moto3. En cinq ans, son parcours parle de lui-même. Et pourtant, on en cause à peine. Il faut dire aussi qu’il ne compte qu’une seule victoire et que son arme est plus la régularité que la domination. En 2020, Mir avait une moyenne de points de 12,2 en 14 épreuves. Au cours de la dernière saison, le pilote de 24 ans a obtenu une moyenne de 11,6 en 19 courses.
Il fait aussi avec la moto qu’il a et qui ne lui permet quasiment jamais de s’élancer de la première ligne sur la grille de départ. Un détail qui est loin d’en être un dans le MotoGP d’aujourd’hui. Mais tout de même, l’équipier d’Alex Rins ne comprend pas pourquoi il n’est pas plus mis en lumière… « Ma vie n’a pas changé autant qu’elle aurait pu l’être » dit-il sur Motorsport-total en faisant le bilan des douze mois qui ont suivi son sacre. « J’ai eu de la chance ou de la malchance d’être devenu champion du monde l’année de l’apparition du Coronavirus. Le côté médiatique n’était pas aussi important qu’une année normale ».
Il ajoute : « j’étais très triste d’être devenu champion du monde devant des tribunes vides. J’ai ça avec moi. Je sais que si je gagne à nouveau ou si je roule au plus haut niveau encore quelques années, la reconnaissance augmentera car il y aura plus de fans dans les tribunes. Cette année, de plus en plus de normalité est revenue, mais pas encore complètement » dit-il. « C’est vrai que je suis devenu plus célèbre, mais pas autant que ça ». En 2021, le Majorquin a terminé troisième du classement général, sans victoire.
Joan Mir et le désir mutuel avec Suzuki : « si je perds ce sentiment, je partirai immédiatement«
Joan Mir s’étonne aussi que ce manque d’intérêt ait également touché son employeur Suzuki : « le fait que Suzuki ait gagné pour la première fois en 20 ans n’a pas été apprécié. Peut-être ne suffit-il pas de gagner une fois. Si nous nous battons une fois de plus pour le titre, la reconnaissance sera peut-être plus grande ». Il y a donc bel bien un sujet « reconnaissance » chez un Joan Mir en uniforme Suzuki. Et s’il partait ailleurs ? Une question à traiter car l’Espagnol a envoyé des signaux au marché des transferts révélant qu’il était également ouvert à la discussion, comme son successeur au championnat Fabio Quartararo.
D’ailleurs, les deux hommes ont des discours sur l’item assez semblables. Voici la version Joan Mir : « j’ai 23 ans et je me suis amélioré à chaque saison. J’ai encore une longue carrière devant moi et je n’ai pas remporté le titre mondial vers la fin de ma carrière. Je suis entré en MotoGP et boum ! ».
« Il y a bien sûr une marge de manœuvre, mais il est important que Suzuki veuille ce que je veux. Tant que je crois que Suzuki me veut et que j’y crois, je serai là. Si je perds ce sentiment, je partirais immédiatement. Pour moi, il est important que nous travaillions tous les deux dans la même direction ». Les négociations sont décidément en cours partout en ce moment, en MotoGP.