L’histoire entre Yamaha et Viñales est donc terminée. La façon prématurée, comme polémique, dont elle s’est conclue amène forcément une réflexion dans l’entreprise sur la question de savoir comment on en est arrivé là. Lin Jarvis, responsable de la gestion de ce dossier depuis le départ au vu de ses responsabilités chez Yamaha dans le paddock, fait sa réflexion. Avec d’ores et déjà cette conclusion : on ne l’y reprendra plus.
Lin Jarvis le reconnait : l’affaire Viñales n’est pas anodine chez Yamaha. Et c’est même devenu un cas concret pour la postérité et sans doute une jurisprudence : « depuis, nous nous demandons si nous n’avons pas signé le contrat trop tôt », admet le directeur de course de Yamaha dans un entretien à Speedweek. « En juin 2021, nous avons été confrontés à une situation dans laquelle un pilote sous contrat depuis deux ans souhaite partir. Nous avons analysé si nous avions commis une erreur dans notre processus. Nous voulons éviter d’être confronté une seconde fois à un scénario similaire. Mais à l’époque, l’accord avec Maverick était la meilleure décision ».
La politique Yamaha dans le recrutement risque donc de changer. En ce moment, il y a deux écoles dans le paddock : Ducati qui aime renouveler annuellement ses baux. Ou Honda avec Marc Marquez fidélisé jusqu’en 2024 ce qui est aussi le cas de Brad Binder chez KTM. Mais le problème avec Viñales a peut-être été que le contrat a été paraphé top tôt. Cela étant dit, comme le précise Jarvis, on est toujours plus malin après…
Il faut donc rappeler le contexte de l’accord aujourd’hui prématurément terminé : Viñales avait bien terminé la saison 2019 à la troisième place derrière Márquez Dovizioso, il avait remporté deux courses et cinq autres podiums : « pour cette raison, Maverick avait la possibilité de passer chez Ducati dans l’équipe d’usine pour 2021 et 2022 », se souvient Lin Jarvis. « Il y avait une offre forte de Ducati sur la table. Et nous savions tous à quel point Maverick peut être fort. Dans le même temps, le déménagement de Valentino à Petronas était prévu pour 2021. Sans Vale, Viñales aurait pu devenir le nouveau chef d’équipe en 2021. On pensait qu’il était toujours éclipsé par Valentino, après son départ de la Factory Team, Maverick pouvait frapper un grand coup en 2020… Mais cela ne s’est pas produit ».
Jarvis : « parfois, vous gagnez avec de telles décisions, parfois vous perdez »
En revanche, Fabio Quartararo a déboulé lors de la même période. Avec les connaissances actuelles, Yamaha aurait-il pris la même décision et prolongé le contrat de Viñales de deux ans en janvier 2020 ? « Rétrospectivement, nous pouvons dire que nous ne prendrions peut-être plus cette décision. Mais c’est difficile à dire. Si Maverick avait maintenu cet élan après sa première victoire au Qatar en 2021 et remporté trois autres courses, tout le monde aurait convenu que nous avions pris la bonne décision il y a un an et demi. Il faut aussi noter que personne ne se doutait de la pandémie à l’époque. Personne ne savait que la saison 2020 ne commencerait qu’en juillet. Il y a tellement de choses qui ont influencé ce qui s’est passé ».
Il sera donc difficile de tirer des conclusions de ce qui s’est passé dans ce contexte mouvant pour en définir des actions correctives. Fataliste, Jarvis termine : « parfois, vous gagnez avec de telles décisions, parfois vous perdez ».