Le weekend de Grand Prix qui vient de se dérouler sur le circuit du Mugello en Toscane aura confirmé les tendances révélées lors des précédentes manches de cette palpitante saison 2023.
En termes d’audience tout d’abord, puisque le circuit commence à retrouver sa fréquentation d’antan. En effet, le départ de Valentino Rossi conjugué à la crise du COVID en 2020 a failli compromettre, ou du moins fut-ce un temps évoqué, sa présence au calendrier des saisons à venir. Certes, cela aurait été dommage pour l’Italie et ses tifosi qu’un tel concentré de passion et de spectacle ne se déroule plus au Mugello.
C’est également représentatif de l’engouement global du public pour la catégorie MotoGP qui bénéficie à plein des efforts de la DORNA pour promouvoir le show.
La confirmation des protagonistes qui devraient fort logiquement concourir pour le titre suprême fut actée.
Ducati et Francesco Bagnaia tout d’abord qui tirent véritablement les marrons du feu : L’opus 2023 de la Desmosedici est l’arme incontournable pour vaincre, surtout aux mains du champion du monde 2022. Pecco confirme qu’il a la tête sur les épaules et assume pleinement son statut de leader de la catégorie. Carton plein à ce titre : Pole position, vainqueur de la Sprint du samedi et vainqueur du GP dimanche. Qui dit mieux ? Personne, forcément.
Enea Bastianini, enfin de retour, aura su malgré sa faiblesse physique terminer neuvième des deux épreuves Sprint et GP. Honorable !
Cela étant, les autres pilotes de la marque ne furent pas mal lotis, à commencer par le team satellite Prima Pramac Racing richement doté des mêmes montures. Ainsi Jorge Martín n’était pas loin en conquérant de haute lutte la 3e place en sprint et la 2e place du podium le lendemain. Une très belle performance qui confirme la montée en puissance et la grande maturité de l’Espagnol, qui ne se limite plus désormais aux seuls coups d’éclats. Pour un peu, ses velléités de titre ne paraissent plus si saugrenues…
Johann Zarco, en digne coéquipier de Martín, récupère la 4e position de la Sprint et monte sur le podium en 3e position le lendemain. Magnifique ! Au risque de se répéter concernant le Français, il ne lui manque plus grand-chose : ses départs sont meilleurs, son agressivité et sa capacité à trouver le rythme sont désormais acquis, reste l’étincelle. Quoiqu’il en soit le travail paie et Johann en récolte les fruits au championnat avec un Top 5.
Au sein du team Mooney VR46, satisfaction en demi-teinte : Marco Bezzecchi, bien que toujours dans le Top 2 du championnat, ait réussi la Sprint en terminant deuxième mais passe à côté du GP dimanche. Alors qu’on le pressentait challenger l’officiel Ducati, il marque un peu le pas dans la constance. Luca Marini continue à performer dans la douleur, mais efficacement, avec une quatrième place, perdant l’accès au podium après une âpre bataille contre Zarco.
Le travail paie aussi chez KTM :
Brad Binder conforte son nouveau statut de prétendant au titre : Ultra agressif, désormais meilleur en qualifications (son point faible jusqu’alors), il est toujours là et prêt à saisir la moindre opportunité. Sa 5e position au GP empêche d’ailleurs Ducati de faire un Top 5. Il faut dire qu’il est bien aidé : Sa machine, dotée d’une mécanique surpuissante conjuguée à une nouvelle aéro, lui « donne des ailes » comme dirait son sponsor : 366.1 Km/h en vitesse de pointe et record absolu de la discipline…
Jack Miller, opiniâtre et talentueux, continue son adaptation à vitesse grand V de la machine orange, mais toujours avec les travers qui le caractérisent : des départs canons mais un essoufflement en courses.
Augusto Fernández et Jonas Folger, bien qu’en deçà de leurs exploits manceaux, n’auront pas démérité en ralliant systématiquement l’arrivée, avec même un point pour l’Espagnol 15e du GP dominical. La marque autrichienne, stakhanoviste dans l’effort, possède une machine qui semble désormais attirer toutes les convoitises. Fabio Quartararo lui-même loue ces impressionnantes performances aux mains de Brad Binder. Comble de l’ironie : KTM se verra probablement (et sous peu) victime de son succès avec une filière de pilotes ultra-productive parmi lesquels il faudra choisir. Honda et Yamaha ne sauraient en dire autant !
A propos des marques nippones, commençons par Honda dont la bérézina fut magistrale : Álex Rins et Marc Marquez, forts de leurs exploits respectifs en qualifications, laissèrent un temps croire qu’un retour était possible. Las, même si l’on peut s’attendre à tout avec Márquez, ce dernier échoua finalement samedi en Sprint avant de chuter le lendemain en GP. Ses efforts, bien qu’indéniablement valeureux, étaient désespérés face à la supériorité adverse. Son geste de dépit une fois à terre après avoir perdu l’avant de sa machine en dit long. Honda n’a plus 36 solutions si ce n’est trouver au plus vite le remède miracle, au risque de perdre le seul magicien qu’ils possèdent.
Joan Mir quant à lui n’a jamais fait illusion sur cette moto et s’est discrédité lui-même par son incapacité à s’adapter. La chute de trop dès la Q2 et une nouvelle blessure finissent de l’enterrer au sein du HRC. Étant désormais dernier du championnat, la messe en ce qui le concerne semble dite.
Álex Rins, seul et brillant vainqueur Honda de l’année sur la RC213V à Austin, fut dès les essais la nouvelle victime du très controversé format Sprint où il laisse une jambe dans la bataille : Fracture tibia/péroné et absent de fait lors des deux prochains grands prix. Ce n’est surement pas Takaaki Nakagami qui le remplacera pour faire briller la marque ailée, tant la transparence de ses résultats interroge sur la légitimité de sa participation au championnat.
Yamaha, l’autre emblématique constructeur japonais, a également fort à faire pour l’avenir : son champion 2021 Fabio Quartararo semble s’enfoncer inexorablement. Il applique d’anciens réglages pour retrouver ses sensations d’antan (sans pour autant les retrouver), se perd en conjectures sur le choix de ses mentors, dénonce les stratégies de son team pour expliquer ses contre-performances… Bref, rien ne va plus. Quand en plus Franco Morbidelli, son anonyme coéquipier en 2022, lui dispute les résultats en course (10e devant Fabio dimanche) on ne sait plus que penser.
Terminons enfin par Aprilia, l’autre constructeur italien qui tente toujours de prouver qu’il faut désormais compter avec lui. Beaucoup de sable dans les rouages malheureusement, et d’abord sur le plan humain : Aleix Espargaró, qui a manifestement oublié qu’on ne téléphone pas en conduisant (même un vélo), s’est salement endommagé le talon en pratiquant son sport favori. Ballot, d’autant plus que ce n’est pas la première fois qu’il se blesse à cette partie désormais fragile de son anatomie. Résultats malgré tout honorables en courses en serrant les dents (8e en Sprint et 6e en GP), mais moins que ce qu’il aurait été logique d’espérer au regard de sa prestation de l’année dernière où il avait fini troisième du GP.
Maverick Viñales fait du Maverick : Une petite contrariété et rien ne va plus dans sa tête, avec les mauvaises performances qui en découlent.
Miguel Oliveira, chez RNF Aprilia, aura fait ce qu’il a pu, mais reste encore bien diminué en l’état. Raúl Fernández enfin questionne clairement sur ses capacités dans la catégorie tant il semble incapable de s’y adapter. Certes, un syndrome des loges assez sévère ne l’aura pas aidé mais cela n’explique pas tout. Incroyable de voir à quel point ce prodige des catégories intermédiaires s’est pour l’instant brulé les ailes au firmament du sport moto. Il est urgent pour lui de convaincre sous peine d’un départ prématuré.
Rendez-vous au Sachsenring où, gageons-le, Marc Márquez fera tout pour l’emporter sur l’un de ses circuits fétiches. Les enjeux étant importants pour tous les teams, nous ne sommes manifestement pas au bout de nos surprises !
Résultats du Grand Prix d’Italie MotoGP au Mugello :
Crédit classement : MotoGP.com