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En sports mécaniques, MotoGP ou pas, Michelin ou pas, tout est toujours de la faute des pneus ! Quand un pilote tombe, « c’est la faute des pneus », quand un pilote ne va pas vite, « c’est la faute des pneus », quand un pilote ne gagne pas, « c’est la faute des pneus » ! Et quand un pilote gagne, c’est évidemment grâce à son talent et il en retire tout le mérite…

C’est par cette caractéristique, certes compréhensible mais ô combien injuste, que nous avons débuté notre entretien avec Piero Taramasso, le manager de la compétition deux-roues de Michelin, car autant nous sommes profondément et totalement admiratifs du talent de chacun des pilotes de Grand Prix, autant nous sommes nous sommes aussi totalement abasourdis par la complexité de la gestion des pneumatiques, des éléments de haute technologie qui nécessitent un savoir-faire d’une précision chirurgicale, depuis leur conception et leur choix jusqu’à leur utilisation finale.

Dans cette interview, nous reviendrons également sur le Grand Prix d’Autriche disputé sur le Red Bull Ring, dont le record a volé en éclat à plusieurs reprises avant d’être pulvérisé par Jorge Martin, puis nous aborderons le prochain GP à Aragon, dont le revêtement refait garde ses mystères…

Retrouvez la première partie de l’entretien ici.


Et à l’avant ? 
Piero Taramasso : « A l’avant, les pneus avant soft et médium étaient les mêmes que l’année dernière, où ils étaient le médium et le dur. Et ce qu’on a apporté, c’était un nouveau pneu avant durqu’on appelle Hard+, qu’on avait validé à Sepang et au Qatar. Donc ça c’était un nouveau pneu, vraiment un nouveau mélange qu’on a introduit en 2024 et qu’on avait déjà amené sur les Grands Prix à Jerez, Barcelone et Mugello. On l’a reproposé en Autriche et il a été testé largement par des KTM, Pol Espargaro et Pedro Acosta, par Bastianini, Bezzecchi et pas mal de pilotes le vendredi. Ils l’ont essayé pour voir ce que ça donnait, parce que la température de piste était 46 ou 47° à ce moment-là, donc c’était approprié de le tester. En fait ce pneu, sur ce circuit particulier, il
fonctionnait bien en support, freinage moto droite. Côté droit, sur l’angle, ça allait bien, et là où c’était un peu délicat, c’était à gauche, parce que la configuration du circuit en Autriche fait qu’il n’y a que trois virages à gauche. Donc à gauche, il était à la limite du fonctionnement, et c’est pour ça qu’il n’a pas été choisi, ni pour la sprint, ni pour la course. Mais c’était juste lié à la configuration du circuit et ce nouveau pneu avant Hard+, on va l’amener en Asie, à Sepang, en Thaïlande, à Mandalika, sur des circuits plus symétriques, et on s’attend à ce qu’il fonctionne bien là-bas. » 

Si ce n’est pas un secret, peut-on connaître les écarts de température de gomme entre le côté droit et le côté gauche en Autriche ? 
« Alors ça dépend des pilotes, mais tu peux avoir une différence de température d’une dizaine de degrés. Pour te dire la vérité en course, le dimanche, il y avait deux pilotes qui pensaient partir avec, Luca Marini et Enea Bastianini. Eux, ils voulaient l’utiliser en course, et probablement qu’il aurait bien fonctionné, parce que quand tu es en course, que tu pousses tout le temps sur l’avant, que tu as le réservoir d’essence plein, là tu arrives à maintenir le pneu tout le temps sous contrainte et c’est plus facile de le garder en température. Et si en plus tu es dans l’aspiration des motos, c’est encore un point en plus qui t’aide à maintenir la température. Donc il aurait sûrement mieux fonctionné en course le dimanche, mais au dernier moment, comme les températures étaient descendues à 46 ou 47°, c’était un poil juste. Si on était resté sur les 50°, je pense que les deux pilotes seraient partis avec, donc il ne manquait vraiment pas grand chose pour qu’il puisse fonctionner correctement. » 

MotoGP Michelin

Ça rejoint encore la difficulté de votre travail ! On ne se rend pas compte à quel point les choses sont fines et à quel point les pneus peuvent varier de température pour un oui ou pour un non… 
« Oui, c’est très très fin. Juste pour te dire, même le rythme en course, ça se joue beaucoup sur la température du pneu : si tu roules 2 dixièmes plus vite sur un tour, tu as 10° en plus dans les pneus, et si tu es 2 deuxièmes plus lent, tu perds 10°. C’est pour te dire comme tout est vraiment à la limite, comme je disais tout à l’heure. Tout est très fin et il faut que tous les éléments s’alignent parfaitement pour avoir la perfo optimale. Mais avant cela, on doit fournir des pneus sûrs, ça c’est la première qualité, et après il y a la performance. Après, on cherche la constance, mais vraiment la première qualité, la première caractéristique de nos pneus, c’est qu’ils sont sûrs. Là-dessus, il n’y a pas de négociation, on ne peut pas transiger là-dessus ! Donc avant de les amener sur un circuit, on garantit que nos pneus sont sûrs. Et après, oui, pour les raisons que vous avez évoquées, il y a parfois des pilotes qui en trouvent certains délicats, ou d’autres qui disent qu’ils ont un peu à la limite, ils utilisent différents mots. C’est vrai que chacun a son vocabulaire, sa façon de parler, et il faut faire juste attention à ce qu’ils disent et ne pas mal l’interpréter.
Pour revenir au premier sujet dont on parlait, honnêtement cette année je ne suis pas frustré par ce que disent les pilotes. Au départ, peut être, les premières saisons, oui, on était frustré, parce que les pilotes étaient très négatifs. Mais cette année, ils sont corrects et si jamais il y avait quelque chose qui n’allait pas, j’accepterais les critiques constructives. Mais ce que j’aimerais, en même temps, c’est que quand les pneus fonctionnent très bien, et ils le font souvent, ils le disent, qu’ils disent du bien, comme le fait Hervé Poncharal, il dit du bien, comme Luca Marini, qui souvent dit du bien et que les chronos réalisés, c’est grâce à Michelin. Mais bon, souvent les pilotes sont plus pour mettre en avant la moto, ou d’autres choses, mais honnêtement je ne le prends pas mal. Ça fait partie du jeu, on le connaît, et c’est pour ça que le manufacturier pneus doit avoir les épaules larges (rires).”  

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 Le prochain Grand Prix a lieu à Aragon, où le revêtement a été resurfacé…  
« Oui, on va à Aragon où ils ont mis un nouvel asphalte partout. On n’a pas fait de tests, donc on amène des spécifications supplémentaires, des pneus un peu plus rigides. Sur les nouveaux asphaltes, souvent tu peux trouver deux sortes de problèmes, soit de l’usure prononcée, soit tu peux générer beaucoup de température, en fonction que le revêtement est plus ou moins agressif, plus ou moins ouvert. si les cailloux sont plus ou moins espacés. Et donc  tu peux voir ou beaucoup d’usure ou beaucoup de température, et donc on se prépare un peu à un weekend ”chaud”, comme on dit (rires). » 

Et vous aurez donc des pneus en plus ? 
« Oui, on amène donc 3 spécifications à l’arrière, avec des gommes assez rigides pour pallier à ça, si il y a beaucoup de température ou beaucoup d’usure. » 

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