Pourquoi se rendre à Carthagène, dans le sud de l’Espagne, pour assister à un entraînement du pilote MotoGP Johann Zarco sur une moto de série ? A priori, le voyage est long, fatigant et coûteux, et le roulage, sur une moto de série soumise à des normes phoniques draconiennes dues à la récente fermeture du circuit, bien moins spectaculaire que sur son habituelle Honda RC213V du team Castrol LCR. Alors pourquoi ?
Parce que justement, on est à l’opposé des Grands Prix, dont le timing effréné a naturellement souvent tendance à rendre les pilotes aussi stressés que pressés d’abréger les rencontres avec les médias. Mieux, alors que le MotoGP est par définition une discipline sportive complètement individualiste, le roulage à Carthagène était, à l’exact opposé: une magnifique initiative de Johann Zarco qui n’a pas hésité à mettre de sa poche et à prendre de son temps pour aider d’autres pilotes francophones.
Ainsi, si nous avons pu voir de très belles bagarres entre le numéro 5 et Barry Baltus, nous avons particulièrement apprécié de voir Johann Zarco consacrer du temps, beaucoup de temps, non seulement pour donner des conseils aux jeunes espoirs français, mais aussi les suivre en piste, soit en étant derrière pour étudier leur pilotage, soit en étant devant pour leur montrer la bonne trajectoire. À noter d’ailleurs que cette très belle et si rare attitude était partagée par Lucas Mahias qui, par exemple, a particulièrement aidé Bartholomé Perrin.
Messieurs, tout simplement « chapeau ! », et un grand merci d’avoir pu partager ces moments avec vous, y compris le soir au restaurant où tous les pilotes étaient présents et ont pu approfondir leurs échanges dans une ambiance très conviviale. Nous allons donc faire de notre mieux pour reporter dans nos colonnes les propos de chacun des participants à travers une très longue série d’interviews, agrémentée de quelques surprises…
À tout seigneur, tout honneur, et nous commençons aujourd’hui par les explications de Johann Zarco sur les motivations qui ont engendré cette très belle expérience. Suivront évidemment bien d’autres facettes, et de cette expérience espagnole, et de l’actualité du pilote MotoGP.
Johann, on est ici à Carthagène, où tu as loué le circuit, et où tu as invité une quinzaine de pilotes français. C’est une superbe initiative, un super geste, alors pourquoi ?
Johann Zarco : « Oui, c’est un super geste, mais en fait j’ai cherché des roulages avant Noël, là dans le sud de l’Espagne, parce que j’avais envie de rouler avec la CBR. Je sais que cette CBR 1000, elle me donne des bonnes sensations, et j’arrive un peu à pouvoir bosser, le relâchement, et chercher des trucs à haute vitesse quand même, parce qu’en termes de moto d’entraînement, c’est celle qui va le plus vite, comme ce qu’était la Panigale à l’époque Ducati. Et en cherchant des roulages, je vois que je ne trouve pas ce que je veux dans les dates où je suis dispo. J’ai envoyé un email car je savais que Carthagène c’est un prix abordable pour louer la piste seulement pour moi. Et du coup, je me fais un entraînement de qualité où j’ai la piste libre dans les heures que je veux. Je n’ai pas besoin de rouler 15 minutes, ou s’il y a un drapeau rouge tu roules 12 minutes et ensuite tu attends une heure et demie. Enfin, je le fais de temps en temps mais ce n’est pas très qualitatif.
Là, je me suis dit “ C’est l’hiver, il y a au moins des heures de soleil à prendre. Du coup, je roule quand je veux”. Et quand je me suis fait ça, je me suis dit dans un premier temps “Ah bah tiens, c’est cool, j’ai pu louer la piste”. Ils ont répondu à l’email et les prix étaient vraiment corrects, hein, c’était 3500 Hors Taxe la journée, avec justement le staff médical et tout: ça reste très correct, et c’est pour ça qu’en fait, si tu prends une journée et ensuite tu fais payer les gens, mettons 200 € la journée, tu t’y retrouves vite sur des petites pistes comme ça. Jerez, ça sera beaucoup plus cher et je sais que le Mugello, ça peut atteindre des 40 000 la journée des fois. Donc de 3500, tu passes à 40 000 (rires). Oui, mais ça ça donne déjà une idée de ce que ça peut être, et je me suis dit ”Bon, moi je m’offre ça, pour m’offrir un bel entraînement de qualité”. Et après, je me suis dit ”Ben pourquoi pas faire plaisir à l’équipe JZ5 ?”. Une fois on l’avait fait à Brissac, je leur avais mis à dispo les Supermotards, tout ça. On avait pu rouler ensemble et on avait passé une super journée. Et là, je me suis dit “On fait pareil, mais avec les plus grosses motos, ou même on descend les Supermotards”. Et ensuite, en voyant la disponibilité de chacun, je me suis dit ”Ben tiens, je vais aussi faire bénéficier ça à des pilotes français”, Honda ou pas.
En priorité sans doute les pilotes Honda, mais ceux que j’aime bien et ceux qui me disaient “Tiens, ça serait sympa si on pouvait rouler ensemble un moment donné”, genre Martin Renaudin que j’apprécie beaucoup. Il m’avait dit “Ça peut être cool si on peut s’entraîner un peu ensemble pour me booster”. Et moi j’avais dit “Avec plaisir”. Du coup, là je me suis dit “Ben tiens, c’est le moment”, mais malheureusement, il n’avait pas de moto, il n’a pas pu venir. Après, ça permettait aussi de booster des pilotes comme Hugo De Cancellis et Corentin Perolari, qui sont, on va dire, mes deux pilotes que j’essaie d’aider. Mais finalement, eux non plus, n’étaient pas disponibles, car Corentin est au Japon avec Alan Techer pour faire un test avec la F.C.C., ça c’est très bien, et Hugo est en train de passer son brevet d’État, je crois, pour pouvoir être entraîneur moto, donc il était occupé.
Alors on a commencé à envoyer un peu l’information, pour les jeunes pilotes de la fédération. Après, j’ai dit ”Moi, ça me plairait de connaître le pilote qui va faire la Rookies Cup, David Da Costa », pour peut-être essayer de créer un lien, le voir davantage, parce que je sais qu’avec les pilotes français de la Rookies Cup, je n’ai finalement jamais eu de lien pendant les Grands Prix. Après, je suis très très occupé, mais peut-être que si j’ai déjà créé un lien, si je vois des choses, je peux aider à donner des indices pendant la saison 2025. Du coup, à voir. Et là, c’est Seb (Sébastien Moreno) qui a géré ça, et je pense qu’on pouvait avoir 25 pilotes de disponibles ici sur le circuit. On s’est dit ”Si on est une quinzaine, c’est bien”, et finalement, oui, il y en a 10 qui ont pu venir.”
A suivre très vite…
Johann Zarco Carthagène
Johann Zarco Carthagène
Johann Zarco Carthagène