Comme nous en avons très régulièrement le plaisir, Hervé Poncharal nous a partagé ses différents points de vue sur l’actualité de ses équipes en championnat du monde.
En attendant d’accueillir les gagnants de notre prochain jeu-concours à Misano, le boss du team Tech3 récapitule cette première demi-saison 2019, nous lâche un petit scoop sur la KTM RC16 et se projette dans l’avenir…
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Puisque vous parlez de progression technique, nous allons conclure avec cela. Ce qui est le plus visible vu de l’extérieur, c’est bien sûr le bras oscillant en carbone qui équipe dorénavant les RC16 de vos 2 pilotes. Êtes-vous satisfait du rythme d’évolution de vos machines, et ce fameux bras en carbone apporte-t-il un réel plus, ne serait-ce au moins dans l’esprit de son pilote ?
Hervé Poncharal : « Alors, s’il y a une chose
qui, entre guillemets, me frustre, c’est qu’aujourd’hui les 4 motos
ne sont pas aux mêmes spécifications. Je le comprends et ce n’est
pas du tout de la colère mais c’est de la frustration. KTM
travaille d’arrache-pied et on en a déjà parlé. Ils ont des
concessions techniques donc ils peuvent tester plus, développer
plus, modifier certains paramètres de la moto alors que les autres
constructeurs ne le peuvent pas, donc ils utilisent cette
possibilité à fond. De toute façon, il est bien normal que les
premiers servis soient les pilotes qui sont les plus capés,
c’est-à-dire ceux de l’écurie officielle qui sont Johann Zarco et
Pol Espargaró. Ils ont depuis Le Mans un bras en carbone couplé
avec un nouveau moteur. Et pour en avoir discuté avec les
techniciens, le bras carbone donne un meilleur ressenti au niveau
du grip à l’arrière, une meilleure compréhension de ce qui se passe
quand on tourne la poignée de gaz, et surtout il permet de garder
un pneumatique plus frais qu’avec un bras en aluminium sur la 2e
moitié de la course. Donc les performances chutent nettement moins
sur la 2e moitié de la course qu’elle ne le faisait avant. Et là,
je vais peut-être me faire tirer les oreilles… Mais c’est ça. On
l’a vu avec Miguel Oliveira qui a eu son premier bras en carbone à
Assen et avec Syahrin qui l’a eu dès l’Allemagne. Par contre,
couplé avec le nouveau moteur, c’est là que ça délivre le maximum
de son plus. Donc on attend d’avoir le nouveau moteur mais je ne
peux pas vous dire quand on l’aura : je sais qu’ils font le maximum
pour que cela soit le plus tôt possible. C’est évident qu’il y a
certains paramètres techniques que l’usine a, et que nous on n’a
pas, et qu’il y a certaines choses que va recevoir l’usine qui vont
arriver ensuite lors des prochaines courses chez nous. C’est bien
normal mais ça reste quelque part une frustration. Parce que quand
on sait que les autres ont quelque chose que l’on n’a pas, on a
toujours tendance à penser que c’est un avantage énorme ! Et quand
on l’a, on se dit que finalement c’est un petit plus mais que ce
n’est pas ça qui va faire gagner 2 secondes. Mais il y a beaucoup
de choses qui se passent dans la tête, et quand les techniciens y
croient, cela engendre une attitude positive qui influe également
sur le mental des pilotes. C’est clair ! Et c’est très important
!
Je suis quasiment certain qu’en 2020, les 4 motos, c’est-à-dire
Zarco, Espargaró, Binder et Oliveira, seront en permanence avec les
mêmes évolutions. Cette année, il s’agissait pour KTM de la
première saison avec une équipe satellite en MotoGP et ils
développent à tout-va. Les sous-traitants techniques sont à fond,
et il y a parfois des problématiques pour construire suffisamment
de pièces pour toutes les motos. Il faut fournir les 4 motos de
l’équipe officielle, plus les pièces de rechange, avant de pouvoir
penser à fournir Tech3. Il y a donc une organisation nouvelle qui
est en train de se créer pour qu’on puisse faire face avec les
sous-traitants, les fournisseurs et en interne à l’usine, pour
qu’il y ait une capacité suffisante dès 2020 pour que les 4 motos
soient en permanence avec les mêmes spécifications. Et ça c’est
quelque chose de très excitant pour nous, parce que c’est toujours
pareil : quand ton pilote voit que le pilote d’à côté à une
nouveauté, ça lui met directement un petit coup au moral si lui
n’en dispose pas ! Même si on la pense bien souvent plus importante
que ce qu’elle n’est dans la réalité. Mais le mental est très
important. Si le pilote part gonflé à bloc à la FP1, c’est toujours
plus positif que si le pilote part en se disant « bof, il n’y a
rien de nouveau alors que les autres ont quelque chose ».
Merci à vous pour ces informations, et merci évidemment aussi pour accueillir chaque année les gagnants de notre jeu-concours : c’est toujours un cadeau incroyable pour eux…
« Sans savoir qui c’est aujourd’hui, on souhaite la bienvenue aux gagnants du concours et on leur montrera autant que faire se peut de visu tout ce que je vous ai expliqué verbalement pendant cette brève interview ! ».