Le mois de juillet de Sylvain a été très occupé avec les 8 H de Suzuka et le développement de la Suzuki de MotoGP au Japon, jusqu’à dimanche dernier et au Grand Prix de la République tchèque que Guintoli a disputé en wild card. Bien sûr, l’agrément aurait été supérieur si deux côtes cassées n’étaient pas venu le faire souffrir. Mais il en aurait fallu plus pour l’empêcher de prendre son plaisir sur la GSX-RR en MotoGP.
Aux 8H de Suzuka, tu as pris la tête avec la Suzuki Yoshimura, mais alors que tu étais en troisième position, un attardé t’a fait chuter. Que s’est-il passé ?
« La première heure de course s’est très bien déroulée, malgré le départ sous la pluie. J’étais en bagarre pour le podium avec la Kawa et la Yam. Je me suis arrêté assez tôt pour faire monter des slicks car c’était la bonne stratégie. J’ai été en tête pendant un moment.
« Après la première heure, un pilote ne m’a pas vu à la sortie de l’épingle. On en a parlé ensuite. Je ne savais pas qui c’était, et je n’ai pas envie de le nommer car c’est un gars sympa. Il ne m’a pas vu et a fait une erreur : il a vu les drapeaux bleus et a regardé du mauvais côté. Il s’est élargi mais j’étais à son extérieur, il m’a percuté et je n’ai pas pu rester sur la piste.
« A partir de là, la course était morte. Je suis rentré au box, on a perdu 5 tours et à Suzuka ça va trop vite pour rattraper ça. On est remonté dans le top 10 final, mais le podium s’était envolé. »
C’est à ce moment-là que tu t’es cassé deux côtes ?
« Oui, c’est à ce moment-là. J’ai eu mal tout de suite, mais peut-être en raison de l’adrénaline, sur le coup je ne pensais pas que c’était cassé. Je me suis fait aussi mal à la jambe, mais c’était juste des contusions. Pour les côtes, je supposais que c’était une déchirure ou quelque chose comme ça, donc je suis reparti après et j’ai refait un relais d’une heure. Mais la douleur était là et je n’ai pu faire que deux runs pendant les 8 H. »
Tu disputes trois GP en wild card cette année à Barcelone, Brno et Motegi. Comment s’est déroulé ton Grand Prix de Brno avec deux côtes cassées ?
« Au niveau douleur, ça n’a pas été top. Le vendredi ça me faisait mal, et samedi matin j’ai vraiment souffert pendant la FP3. Je me suis dit qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas parce que ça me faisait trop mal pour que ce soit juste des contusions. J’ai fait une radio et on a vu tout de suite deux côtes cassées. Je savais pourquoi j’avais mal !
« Mais wild card en MotoGP, ce n’est pas souvent que tu as l’occasion de le faire. Je voulais participer au Grand Prix dans la mesure du possible et la Clinique Mobile m’a aidé avec des analgésiques contre la douleur. Finalement j’ai pu faire une course pas mauvaise. »
Et la journée d’essai du lundi ?
« On avait un programme d’essai chargé. J’ai fait une quarantaine de tours pour pouvoir boucler notre programme.
Quels sont les points forts de la Suzuki par rapport à ses concurrentes ?
« C’est tellement serré actuellement en MotoGP que d’un circuit à l’autre tu as parfois des variations de points forts et de points faibles ! Je dirais que d’une manière générale la Suzuki est une moto homogène. C’est une moto qui fonctionne bien partout, et très bien sur certains circuits. Son homogénéité fait que même quand on est en difficulté on n’est jamais loin du coche. »
Quatre podiums pour Suzuki en MotoGP jusqu’à présent cette année, donc plus de concessions en 2019. Est-ce un mal ou un bien ?
« C’est un bien. Suzuki est un des principaux constructeurs de la catégorie MotoGP. Suzuki est depuis longtemps en catégorie reine (ndlr : début des années 70 avec la RG 500) parmi les leaders, y compris depuis leur retour en 2015. Suzuki est un des acteurs principaux du MotoGP donc les concessions, on n’en veut pas ! 2017 a été une année difficile, mais même cette année, on n’a pas vraiment besoin des concessions. Donc les concessions qui s’en vont, c’est plutôt un bien. »
Comment aides-tu à développer une moto convenant à la fois à Alex Rins, Andrea Iannone et Joan Mir ?
« Le développement pour un constructeur leader est constant. Les différences ne sont jamais énormes et on travaille en fait sur des gains marginaux. Mon principal travail est de ne pas partir dans des impasses ou dans des directions qui vont à l’encontre de ces petits gains.
« Aujourd’hui, personne ne révolutionne. Il y a un règlement et on travaille sur le long terme et sur des gains marginaux également. Donc je ne développe pas la moto pour tel ou tel pilote. Je la développe pour qu’elle fonctionne bien de manière générale, pour qu’elle soit équilibrée. On ne part pas dans des délires pour rendre la moto meilleure pour un pilote ou pour l’autre. On travaille pour que ce soit une moto utilisable efficacement par tous les pilotes. »
Lundi soir après la journée de test, Alex Rins a dit avoir apprécié tes commentaires concernant le châssis comportant de la fibre de carbone. Ça amène un progrès réel ?
« Oui, c’est un développement sur lequel on travaille depuis quelque temps. C’est quelque chose que j’avais trouvé intéressant, donc on a continué à creuser l’idée. Quand Suzuki, le test team et moi déterminons qu’il y peut y avoir une amélioration quelque part comme les châssis avec la pièce en carbone, on continue d’y travailler, et pour moi ça a été une satisfaction car c’est quelque chose qui m’a plu tout de suite. Les deux pilotes l’ont maintenant adopté parce que ça leur apporte un plus, et c’est satisfaisant de constater que les deux pilotes titulaires apprécient nos directions de travail. »
Comment as-tu fait avec une température de piste de 65° à Motegi pour tester la GSX-RR de MotoGP ?
« Il fait toujours chaud en cette période de l’année au Japon. En juillet c’est la fin de la saison des pluies et c’est quand la chaleur vraiment arrive. Il fait toujours très chaud pour Suzuka, mais là on a eu des conditions particulières car un typhon a chamboulé la donne en amenant 3 à 4 jours de pluie non-stop. Il y a eu des inondations. La semaine suivante les records de température ont été battus et on a eu un test très chaud à Motegi avec une humidité énorme, un peu comme au GP de Malaisie, mais avec 10° de plus ! Les conditions étaient incroyables et extrêmes, mais on a fait un bon test. La moto fonctionne bien quand il fait vraiment très chaud. (sourire) »
Quel est ton programme pour 2019 ?
« Pour le moment ce n’est pas encore annoncé, mais ça va bientôt être fixé. Ce que nous construisons ensemble avec Suzuki depuis un an et demi me plait beaucoup. Mon programme va bientôt être défini à 100%. »
Photos © Suzuki