Lors de la présentation 2019 de l’équipe Ducati MotoGP à Neuchâtel, Luigi Dall’Igna, General Manager Ducati Corse, a évoqué les restrictions aérodynamiques qui interviennent en 2019.
Luigi Dall’Igna : « D’un point de vue aérodynamique, le règlement 2019 est aussi plus restrictif. Aussi bien parce qu’il empêche de moduler les carénages en enlevant ou en ajoutant des pièces au carénage, mais aussi parce qu’il réduit la taille totale du carénage. Je m’attends donc à ce que l’appui aérodynamique soit plus faible que sur la moto 2018. Néanmoins, j’espère qu’après avoir changé le règlement aérodynamique pendant 2 années consécutives, nous sommes maintenant arrivés à une stabilité des règles qui est le seul moyen de réduire les coûts en MotoGP ».
Eduardo Lenoci, le responsable du développement aérodynamique de Ducati, a ensuite pris la parole et, comme d’habitude, nous vous proposons ici une traduction de l’intégralité de ses propos.
Eduardo Lenoci : « Quand j’ai
commencé à travailler chez Ducati il y a presque six ans, ma
formation et mon expérience étaient basées sur la F1 et les
voitures de course. Vous pouvez constater par exemple qu’il y a
beaucoup d’argent investi dans le développement de l’aérodynamique
en Formule 1. Ce que nous avons appris de ce monde et transféré à
mon expérience ici chez Ducati, c’est par exemple une approche
différente en termes d’utilisation d’outils spécifiques pour
identifier les bons outils et les utiliser de manière
appropriée.
Si vous considérez l’aérodynamique et la
dynamique du véhicule, les deux ensemble, il y a une coopération de
nos ressources qui nous est très utile pour comprendre toutes les
solutions différentes que nous étudions et testons pour développer
la moto ».
Vous avez mentionné des outils spécifiques. Quels sont-ils ?
« Par exemple, nous avons introduit l’utilisation
massive de la CFD, qui est Computational Fluid Dynamics,
c’est-à-dire la simulation mathématique de ce qui se passe autour
de la moto en termes d’aérodynamique. Dans le passé, nous
développions les motos en soufflerie, donc nous utilisions donc une
maquette grandeur nature, composée de composants existants, de
pièces détachées de motos existantes par exemple.
En
utilisant la CFD, il y a quelques avantages. Par exemple je peux
vous dire que d’un côté la quantité énorme de données issues des
simulations aide les ingénieurs à comprendre avec une connaissance
approfondie ce qui se passe sur la moto en termes d’aérodynamique.
Parce que dans la soufflerie, on ne peut pas voir la répartition de
la pression, ni les flux ou la répartition des contraintes à la
surface de la moto. Alors que vous avez ceci avec la CFD. Donc
lorsque vous allez en soufflerie, vous ne devez faire que du
travail d’optimisation, ce qui est aussi important que le
développement de nouveaux concepts. D’un autre côté, vous
n’avez pas besoin d’attendre que les pièces existantes soient
montées sur la moto pour servir de modèle, et vous pouvez donc
commencer votre développement plus tôt
qu’auparavant ».
Que pensez-vous de vos adversaires, en matière d’aérodynamique ?
« Eh bien, si vous regardiez une grille de départ lors
d’une course MotoGP il y a cinq ans, vous pouviez voir que les
carrosseries de nos concurrents se ressemblaient beaucoup. Et
peut-être que certaines d’entre elles n’avaient pas été changées
depuis des années. Puis, ces dernières années, beaucoup de détails
aérodynamiques ont commencé à être montés, même sur les motos de
nos concurrents, des appendices étranges et des choses comme ça. Et
même en fonction du pilote.
Donc d’un côté, je peux vous dire que nous en sommes heureux,
parce que nous avons commencé au tout début et que nous avons
peut-être eu raison de faire cet investissement en argent et en
temps.
D’un autre côté, c’est aussi motivant pour nous, parce que cela
vous donne la pression de pousser un peu plus loin le niveau de
développement et les nouvelles idées à venir ».
Quels sont les challenges à venir, en tenant compte du règlement ?
« Comme Gigi l’a mentionné auparavant, la
réglementation a été modifiée au cours des deux dernières années en
ce qui a trait à ce qui était disponible et possible en termes de
nouvelle aérodynamique. Bien sûr, en tant qu’ingénieurs, nous
aurions aimé que ce genre de changements vise à améliorer les
performances, mais parfois ce n’est pas le cas, alors il s’agit
simplement de réduire ou de limiter, par exemple pour réduire les
coûts, comme cela s’est produit auparavant.
Mais mon opinion est qu’il y a beaucoup de domaines à explorer
en termes d’aérodynamique et, en tout cas, notre méthodologie que
nous allons utiliser sera la même et nous permettra d’avoir la
chance de faire face aux nouveaux défis, peu importe d’où ils
viennent ».
Les Ducati exposées lors de la présentation 2019 étaient dotées des derniers appendices aperçus lors des tests hivernaux, et Gigi Dall’Igna a confirmé que « nous testerons comme d’habitude le nouveau carénage au Qatar, immédiatement avant la course d’ouverture de la saison » .