Chez Ducati, on a définitivement tourné la page Andrea Dovizioso qui avait été le taulier du box de Borgo Panigale durant huit saisons. Gigi Dall’Igna a réouvert en 2021 un chapitre de l’aventure de la marque en faisant pratiquement table-rase du passé et en rajeunissant les effectifs. Un pari risqué puisque, lorsque la saison a commencé, aucun des deux nouveaux pilotes officiels pas plus que les deux pensionnaires de Pramac ne pouvaient revendiquer un succès sur la machine italienne en Grand Prix. Au vu du bilan de cette année, l’audace a été récompensée. Ce qui permet de solder le passif Dovi, ce dont ne se prive pas Gigi Dall’Igna. Comme quoi il y avait un problème…
Lorsque Ducati a présenté en début d’exercice ses nouveaux effectifs pilotes, le message était fort : on passe à autre chose. En effet, point de Dovizioso et plus de Petrucci pour assurer une certaine continuité. Place aux jeunes, et aux nouveaux venus dans le clan de Borgo Panigale. Pour une approche rafraichie et des relations nouvelles. Mais avec une question : l’enthousiasme ainsi provoqué serait-elle suffisante pour faire oublier le relatif manque d’expérience ?
On connait aujourd’hui la réponse : Ducati a remporté le titre Équipes et Constructeurs, Johann Zarco a été le meilleur pilote privé et Bagnaia a terminé deuxième du Championnat du Monde. Dans les 18 Grands Prix, il y avait au moins un pilote Ducati au premier rang et on note un total de sept victoires (38%) et 24 podiums (44%). Seul Marini n’est pas entré dans cette comptabilité et, au final, seul le titre des pilotes a manqué.
Mais surtout, un nom se démarque, celui de Pecco Bagnaia. Le protégé de Valentino Rossi a eu besoin de 13 courses en 2021 pour obtenir sa première victoire en MotoGP, mais lorsqu’il l’a fait, il est devenu presque imbattable. Sa fin de saison parle d’elle-même : il a remporté quatre des six dernières manches, terminant à seulement 26 points du champion du monde.
Un parcours qui amène forcément à une comparaison avec son aîné de compatriote, Andrea Dovizioso… Ce dernier a remporté plus de courses que Bagnaia en 2017, soit six, lorsqu’il s’est approché le plus près du titre, terminant à 37 points derrière Marc Marquez. Le triple vice-champion du monde a marqué plus de points que les 252 de son cadet : 261 en 2017 et 269 en 2019, mais à cette occasion, il y avait un Grand Prix de plus. Les moyennes sont donc pratiquement identiques. De plus, Pecco a signé six pole positions, le même nombre que Dovi a inscrit… En huit ans chez Ducati.
Des statistiques qui n’ont pas échappé à Gigi Dall’Igna auquel a été souvent servi la soupe à la grimace à la cantine Ducati lorsque Dovi était un convive. A présent, il boit du petit lait… « Pecco a fait un travail incroyable : dans la seconde moitié de la saison, il était probablement le meilleur, il a remporté 4 des 6 dernières courses, et cela aurait pu être 5. Il s’améliore continuellement d’année en année, et il n’a pas encore atteint le niveau maximum ».
Ducati : « en 2020 il n’y avait plus la confiance mutuelle, en 2021 la confiance était absolue »
Le directeur général de Ducati ne se contente pas de féliciter son pilote. Il prend aussi son parcours comme l’idée maîtresse d’une démonstration destinée à solder la période Dovizioso… Sa remarque sur l’embellie de ses troupes constatée cette saison est à ce titre édifiante : « il n’y a jamais une seule réponse, il faut travailler sur plusieurs aspects. En 2020 nous étions arrivés au bout d’une histoire, il n’y avait plus la confiance mutuelle pour arriver à certains résultats. En 2021 c’était complètement différent, il y a une confiance absolue des techniciens dans les pilotes et vice versa : cela fait la différence. La moto s’est certes améliorée, mais il y a aussi l’apport des pilotes ».
Il ajoute : « le pilote est toujours important, la technologie importe peu si vous n’avez pas un pilote capable de faire la différence. Je crois qu’il en sera de même à l’avenir aussi ». Gigi Dall’Igna enfonce le clou lorsqu’on lui fait remarquer que, peut-être, jamais une Ducati n’aura été aussi polyvalente que lors de cette saison, vu que cinq de ses six pilotes en lice ont été vus sur les podiums MotoGP. Il répond ainsi : « en réalité, même dans le passé, nous avons fait d’excellentes courses avec différents pilotes tels que Iannone, Petrucci, Miller, Bautista : ce n’est pas seulement cette saison que nous avons pu être rapide avec plusieurs de nos pilotes. Disons que la moto s’est toujours améliorée en adaptabilité aux différentes pistes et styles de pilotage ». Jamais, dans son argumentation, et notamment cette dernière, Andrea Dovizioso n’est cité. Mais il est dans tous les esprits.