Il est clair que lorsque l’on fait l’évaluation des forces en présence en MotoGP au terme de cette saison 2021, la balance penche ostensiblement du côté de Ducati. C’est même un revirement historique si l’on veut bien se souvenir qu’il n’y a pas si longtemps, la Desmosedici n’était la moto que d’un seul pilote, Casey Stoner. Aujourd’hui, elle est chevauchée par six champions, qui seront deux de plus en 2022, qui ont des styles de pilotage différents et qui ont les mêmes chances de grimper sur le podium. Pendant ce temps, Honda n’est rien sans Marc Marquez et Yamaha ne serait pas grand-chose sans Fabio Quartararo. Gigi Dall’Igna, qui a permis au constructeur italien d’en arriver là, boit du petit lait en voyant ses paris tourner à la réussite. Et ils sont au nombre de trois…
Rouler une Ducati n’était pas vraiment prisé parmi les pilotes du paddock il y a seulement quelques saisons, mais force est de constater que, pour la prochaine, tout le monde en veut une ou à peu près la même. Une situation qui fait sourire Jack Miller, qui a connu le temps des vaches maigres, et plonge dans la perplexité celui qui en a eu une pendant huit ans, Andrea Dovizioso. Mais chez l’artisan de ce retournement qui est Gigi Dall’Igna, la même conjoncture décoche un large sourire que sa barbichette ne cache pas.
L’incontournable de Ducati Corse a identifié ses trois points d’appui qui lui ont permis de grimper jusqu’au sommet. Il y a d’abord l’audace technique. Des ailerons au déflecteur arrière en passant par le dispositif d’aide au départ qui est maintenant un correcteur d’assiette à la demande, ce n’est rien de dire que le constructeur de Borgo Panigale a bouleversé l’approche du développement d’une moto et forcé ses concurrents à retourner à leurs chères études. Des dispositifs qui n’avaient qu’un seul but : « si vous partez de l’avant, c’est beaucoup plus facile de faire une bonne stratégie, c’est la clé de la course » dit-il. « Nous avons travaillé dur pour essayer de trouver un moyen de prendre de bons départs ».
Ducati : « une bonne moto doit donner au pilote la possibilité d’utiliser sa machine comme il le souhaite«
« Nous avons commencé avec une idée très simple il y a deux ans, et tous les six mois, nous avons ajouté quelque chose de nouveau pour améliorer notre système. Il y a des circuits où c’est très important, d’autres où ce n’est pas si important » ajoute Dall’Igna. « Le seul problème est que la réglementation dans ce secteur est très stricte et nous permet d’utiliser uniquement des systèmes mécaniques, pas d’électronique. Au début, ce n’était pas facile de trouver un moyen de le faire fonctionner ».
Et cela marche si bien aujourd’hui que tous les adversaires y sont venus. Voilà pour la technique. Mais il y a aussi l’aspect humain : « nous avons commencé à travailler avec tous ces jeunes pilotes, je pense que c’était quelque chose d’important, ils ont un esprit différent. Ce sont eux qui m’obligent à faire mieux », a expliqué le directeur général de Ducati Corse à motogp.com. Et dans ce groupe d’élites, il y a un élément qui se démarque, et qui apparaît comme le troisième élément : « il est clair que Pecco Bagnaia utilise un style de pilotage différent des autres pilotes Ducati. C’est très spécial, car il utilise 100% de pneu avant ».
Dall’Igna termine sa démonstration avec une conclusion lourde de sens lorsque l’on compare la situation du clan italien avec celle des rivaux japonais : « chez Ducati, nous avons différents styles de pilotage, je ne pense pas qu’ils faillent travailler dans une seule direction. Une bonne moto doit donner au pilote la possibilité d’utiliser sa machine comme il le souhaite et je pense que notre moto peut le faire dès maintenant. La Ducati ne fait plus peur aux pilotes ». Un sentiment qui est aujourd’hui largement partagé dans le paddock par les pilotes des autres marques…