Fin 2018, Hervé Poncharal et l’équipe Tech3 se sont lancés dans le challenge de quitter Yamaha pour KTM, un challenge très osé puisque le constructeur autrichien ne possède que 2 ans d’expérience en catégorie reine, et, qu’en conséquence, ses RC16 sont pour le moment un peu moins performantes que la plupart de leurs adversaires.
Et ne le cachons pas, les premiers tests à Valence et Jerez n’ont pas été très rassurants, les productions de Mattighofen se révélant de façon logique adaptées à Pol Espargaró, donc un peu brutales et rétives (voir les propos de Guy Coulon à ce sujet).
Depuis, le département compétition de l’usine KTM a pris en considération l’arrivée de cette nouvelle équipe et proposé une copie déjà corrigée lors des tests MotoGP qui viennent de se terminer à Sepang.
Il était donc intéressant de recueillir le point de vue d’Hervé Poncharal à ce sujet, et nous l’en remercions.
Hervé, pouvons-nous faire un premier point de la situation, au terme de ces essais à Sepang ?
Hervé Poncharal : « oui, on peut faire un premier point, et je suis très heureux de vous annoncer que ce point est très positif pour la maison Red Bull KTM Tech3, parce que même si on savait que les premiers tours de roue qui ont eu lieu fin 2018 à Valence et à Jerez était une découverte d’un matériel radicalement différent, et une découverte de la classe MotoGP pour notre pilote Rookie Miguel Oliveira, on était quand même un peu perplexe par rapport à l’écart qui nous séparait des leaders. De plus, les pilotes n’avaient pas beaucoup d’informations qui remontaient de la moto, notamment du train avant, ce qui ne leur procurait pas une pleine confiance pour piloter et attaquer sur la moto. Mais malgré le peu de temps qu’il y a eu entre début décembre, début de la trêve hivernale, et ces essais qui ont eu lieu tout début février en Malaisie, je dois tirer un grand coup de chapeau à tous les ingénieurs de chez KTM qui travaillent sur le programme MotoGP, parce qu’on a maintenant un matériel qui est en énorme progression et un matériel qui nous a donné un sentiment complètement différent avec lequel les pilotes ont la capacité de pousser fort et d’emmener mais la moto dans ses derniers retranchement pour pouvoir non seulement aller plus vite, mais aussi être plus précis dans les commentaires techniques. Donc un grand coup de chapeau à eux pour ce qu’ils ont fait, et un grand merci pour avoir l’ouverture d’esprit d’avoir écouté ce que leur ont dit nos 2 pilotes plus, je pense, Johann dans l’écurie officielle, et ce que leur ont demandé Nicolas Goyon et bien évidemment Guy Coulon qui a le bagage technique qu’on lui connaît, et qui sait ce qu’une moto de course doit être et doit délivrer comme sensations à son pilote ».
Donc un premier bilan positif…
« Hyper positif ! On est très excité et hyper positif. On a beaucoup travaillé durant ces 5 jours d’essais, non seulement les pilotes mais aussi les mécaniciens qui étaient sur le circuit de 8 heures du matin jusqu’à 23 heures, dans la chaleur, le bruit, et sans jamais s’arrêter sauf pour une pause d’un quart d’heure pour avaler vite fait un morceau sur le pouce. Mais comme toujours, quand les résultats avancent et que les chronos évoluent, 2’02.1 le premier jour, 2’02.0 le deuxième jour et 1’59 le troisième jour, ça recharge les batteries et ça fait oublier une grande partie de la fatigue ».
D’autant que, outre les motos qui ont évolué dans le bon sens, Miguel Oliveira est un autre motif de satisfaction. Il n’a peut-être pas fait un coup d’éclat comme un autre Rookie, Francesco Bagnaia, mais, comme vous l’avez dit, il a bien progressé chaque jour…
« Il y a 2 ans, à la première séance d’essais 2017, je vous avais dit qu’on avait trouvé un phénomène par ce qu’on était en osmose avec notre nouveau pilote qui était Johann Zarco. À cette époque, Guy Coulon, qui est quelqu’un de très particulier et aime la connivence avec son pilote, avait très bien démarré avec Johann. Et là, franchement, je peux vous confirmer que lui et Miguel donnent l’impression de se connaître depuis beaucoup plus longtemps que la réalité de leur collaboration. Guy, et je peux parler en son nom, l’adore déjà ! Vraiment. Et la réciproque est vraie. Miguel est quelqu’un d’assez réservé et d’assez timide, mais n’a pas arrêté de nous remercier et de nous dire qu’il se sentait bien. Depuis qu’il nous a quitté à la fin des essais, et cela fait à peine 24 heures, il nous a déjà envoyé plusieurs petits messages pour nous dire combien il était content et combien il avait hâte d’être à la prochaine session de roulage. Donc oui, on a déjà une bonne osmose et une bonne entente qui, je pense, ne fera que croître avec ce pilote. Il est bluffant parce que sous des airs peut-être moins charismatiques ou peut-être moins hyper doué que peuvent le paraître certains, il fait un sacré travail, en donnant des directions techniques précises et en étant toujours excessivement cool. Si un changement de réglages sur une moto prend une heure, jamais il ne montre un signe d’énervement. C’est vraiment quelqu’un qu’on est en train de découvrir et qui est pour l’instant très enthousiasmant, et surtout bluffant par rapport à la manière dont il roule. Parce que il n’est quand même qu’à 3/10 du leader qui est Johann Zarco et à 2/10 du pilote le plus expérimenté KTM qui est Pol Espargaró. Son coéquipier, qui a quand même une année de MotoGP derrière lui, n’a pas existé pendant ces 5 jours de tests à Sepang… ».
Est-ce que, à vue de la progression durant ces tests, vous pouvez déjà vous fixer un objectif pour 2019, où est-ce encore trop tôt ?
« Concernant Miguel, tout pilote fort du Moto2 qui monte en MotoGP vise avant tout le titre de Rookie. Miguel est vice champion du monde Moto2 derrière Bagnaia, et il est vainqueur de la dernière course Moto2 à Valence. Donc évidemment, le titre de Rookie pourrait être l’objectif numéro 1. Mais il ne faut pas rêver et il faut ouvrir les yeux : il y a 3 autres Rookies très forts qui s’appellent Francesco Bagnaia, qui dispose d’une Ducati officielle et on a vu comment les Ducati fonctionnent, Fabio Quartararo, qui aura une Yamaha M1 2019 et dont on connaît le talent, il sera très fort et redoutable, et Joan Mir qui est sur une machine qui ressemble beaucoup à la Yamaha de par sa conception, donc facile d’accès et très performante. Donc le titre de Rookie pourrait être l’objectif, mais même si on ne l’a pas abandonné avant le début des hostilités, ça sera compliqué. Je pense que si dans un premier temps, sur les premières courses, on pouvait être à chaque fois dans les points, ce serait pas mal. Cela peut paraître peu ambitieux, mais quand vous regardez la grille, que vous regardez les écarts, c’est sans doute réaliste. Donc oui, l’objectif est de se retrouver dans les points lors des 3 premières courses, et c’est surtout, non seulement sur un tour chrono pendant la qualif, c’est essayer d’être le plus près possible en course des 2 locomotives qui sont nos repères, qui s’appelle Pol Espargaró et Johann Zarco. Parce que Miguel va aussi avoir à découvrir la moto sur la durée d’une course, c’est-à-dire 45 ou 50 minutes. Ça, ça sera vraiment significatif de ce qu’on va pouvoir faire est de comment on se situe par rapport à Johann et Pol sur les 3 premières courses, Qatar, Argentine et Texas. Et même par rapport à Hafizh (Syharin), par ce qu’il a un petit peu tâtonné et galéré à Sepang, mais je pense que c’est quand même un pilote qui a montré qu’il était rapide sur une MotoGP. Il s’est battu jusqu’à la dernière course avec Morbidelli pour le titre de Rookie 2018. Il va se réveiller. Donc pour nos 2 pilotes, l’objectif est bien entendu d’être dans les points, mais surtout essayer d’être le plus près possible de Johann et Pol, puisqu’on a les mêmes motos qu’eux, ce qui n’était pas le cas dans l’organisation précédente ».
A suivre…
MotoGP, Test Sepang J3 : chronos
1 | 9 | Danilo Petrucci | Ducati GP19 | 1:58.239 | ||
2 | 63 | Francesco Bagnaia | Ducati GP18 | 1:58.302 | 0.063 | 0.063 |
3 | 43 | Jack Miller | Ducati GP19 | 1:58.366 | 0.127 | 0.064 |
4 | 4 | Andrea Dovizioso | Ducati GP19 | 1:58.538 | 0.299 | 0.172 |
5 | 12 | Maverick Viñales | Yamaha M1 | 1:58.644 | 0.405 | 0.106 |
6 | 35 | Cal Crutchlow | Honda RC213V | 1:58.780 | 0.541 | 0.136 |
7 | 41 | Aleix Espargaró | Aprilia RS-GP | 1:59.022 | 0.783 | 0.242 |
8 | 21 | Franco Morbidelli | Yamaha M1 | 1:59.141 | 0.902 | 0.119 |
9 | 30 | Takaaki Nakagami | Honda RC213V | 1:59.148 | 0.909 | 0.007 |
10 | 46 | Valentino Rossi | Yamaha M1 | 1:59.155 | 0.916 | 0.007 |
11 | 93 | Marc Márquez | Honda RC213V | 1:59.170 | 0.931 | 0.015 |
12 | 42 | Álex Rins | Suzuki GSX-RR | 1:59.180 | 0.941 | 0.010 |
13 | 6 | Stefan Bradl | Honda RC213V | 1:59.368 | 1.129 | 0.188 |
14 | 53 | Tito Rabat | Ducati GP18 | 1:59.485 | 1.246 | 0.117 |
15 | 36 | Joan Mir | Suzuki GSX-RR | 1:59.486 | 1.247 | 0.001 |
16 | 20 | Fabio Quartararo | Yamaha M1 | 1:59.497 | 1.258 | 0.011 |
17 | 5 | Johann Zarco | KTM RC16 | 1:59.640 | 1.401 | 0.143 |
18 | 44 | Pol Espargaró | KTM RC16 | 1:59.751 | 1.512 | 0.111 |
19 | 88 | Miguel Oliveira | KTM RC16 | 1:59.949 | 1.710 | 0.198 |
20 | 17 | Karel Abraham | Ducati GP18 | 2:00.378 | 2.139 | 0.429 |
21 | 55 | Hafizh Syahrin | KTM RC16 | 2:00.766 | 2.527 | 0.388 |
22 | 50 | Sylvain Guintoli | Suzuki GSX-RR | 2:00.990 | 2.751 | 0.224 |
23 | 38 | Bradley Smith | Aprilia RS-GP | 2:00.995 | 2.756 | 0.005 |
24 | 66 | Mika Kallio | KTM RC16 | 2:01.020 | 2.781 | 0.025 |
25 | T2 | Nakasuga/Folger | Yamaha M1 | 2:01.243 | 3.004 | 0.223 |
26 | T1 | Jonas Folger | Yamaha M1 | 2:01.719 | 3.480 | 0.476 |