Davide Brivio, ancien team manager de Yamaha et Suzuki, maintenant à la tête d’Aprilia TrackHouse, jette un regard rétrospectif sur la décision de Valentino Rossi de rejoindre Yamaha en 2004, une époque marquée par des luttes internes et des visions opposées au sein du constructeur japonais.
L’année 2004 a marqué un tournant décisif dans l’histoire du MotoGP avec l’arrivée de Valentino Rossi chez Yamaha. Ce transfert, considéré comme audacieux à l’époque, a bouleversé les équilibres du championnat du monde et a permis à la marque japonaise de renouer avec la victoire. Pourtant, derrière ce choix audacieux se cachent des débats houleux et des résistances internes, comme l’a récemment raconté Davide Brivio, ancien team manager de Yamaha.
À cette époque, Rossi était déjà une légende, accumulant les titres mondiaux chez Honda. Pourtant, en quête d’un défi inédit, le Docteur a choisi de quitter l’écurie dominante pour une Yamaha en pleine crise. Un choix qualifié de « fou » par beaucoup, et qui a suscité des divisions au sein de la marque d’Iwata.
« Certains chez Yamaha étaient contre l’idée de le signer », révèle Brivio sur crash.net. « Ils disaient : ‘S’il vient et que nous ne gagnons pas, ce sera la faute de Yamaha. S’il gagne, ce sera grâce à Valentino. En tant que marque, nous n’avons rien à y gagner.’ » Une vision purement corporatiste qui s’opposait à celle de Rossi, bien décidé à prouver que le talent du pilote pouvait surpasser les lacunes d’une machine inférieure à la Honda RC211V.
Davide Brivio : « on a redonné une certaine valeur à l’homme, au sport par rapport à la moto »
L’opposition ne s’arrêtait pas là. Une autre faction au sein de Yamaha clamait qu’ils n’avaient pas besoin de Rossi, persuadés qu’ils pourraient construire une moto capable de gagner avec n’importe quel pilote. Mais la réalité a donné tort à ces sceptiques. Dès sa première saison, Valentino Rossi a renversé la hiérarchie. Il a offert à Yamaha un titre mondial qu’elle n’avait plus touché depuis des années et, surtout, il a réinventé son image. La domination était telle que son coéquipier Carlos Checa terminait à 187 points de lui en 2004.
Brivio admet que, sans Rossi, Yamaha aurait sans doute mis des années à convaincre un autre pilote de premier plan. Mais au-delà des résultats, l’impact de Rossi a été philosophique. Yamaha a appris à valoriser ses pilotes autant que ses machines, un changement qui a permis l’arrivée de Jorge Lorenzo en 2008 et a marqué une nouvelle ère.
Davide Brivio précise : « Valentino a changé la mentalité et la culture, la mentalité de course, au sein de Yamaha. J’en suis très fier car je pense qu’on a redonné une certaine valeur à l’homme, au sport. Je pense qu’à cette époque, nous avions le sentiment que nous avions contribué à équilibrer un peu plus l’importance de la moto par rapport à l’importance du pilote ». Avec Rossi, Yamaha n’a pas seulement gagné des titres : elle a redéfini sa vision du MotoGP. Un pari risqué, mais une victoire totale.