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Depuis le début des années 80, Bruno Gillet a été reporter en Grand Prix pour Moto Journal, et c’est sans doute le journaliste français qui nous a le mieux accueilli lorsque la presse internet a « débarqué » en MotoGP. Il a également couvert l’Endurance durant des décennies et réalise désormais des interviews d’anciens pilotes pour le magazine Youngtimers Moto. Dans le domaine de la course moto, il a également travaillé en télévision, radio, documentaires vidéo, publicité, internet…

À travers ce recueil « Dans les coulisses de la course moto », il lève le voile sur les coulisses de ce monde captivant, par le biais de 100 anecdotes. Pilotes, chefs d’écurie, mécaniciens, ils sont nombreux à révéler le dessous des cartes pour livrer le secret de situations souvent inédites !

216 pages à commander sur le site Amazon en version papier (appelé « broché ») pour 12 € + frais de port. Ou en version e-book numérique également disponible sur Amazon (appelé « Format Kindle », 7€), mais en avant-première, Bruno Gillet vous a réservé la primeur de deux des cent anecdotes rapportées…


Jouons des coudes

Si vous prononcez le nom de Jean-Philippe Ruggia, vous aurez toujours un fan de Grand Prix pour vous rappeler qu’il fut le premier à frotter le coude en virage ; or c’est faux.

Le belge Stéphane Mertens, également sur une 250 Yamaha, le fit bien plus tôt, comme il me l’a lui-même confirmé : « Effectivement il m’est arrivé de toucher le coude à partir de 1983 ; je me souviens de la première fois, c’était à Hockenheim dans le droit du stadium, celui avant le droit de l’arrivée, dans la compression de la cuvette. Il faut dire qu’à l’époque certains vibreurs étaient plus haut qu’actuellement. D’autre part je mesure 1,89 mètres donc je roulais beaucoup couché derrière le carénage pour gagner en aérodynamisme face aux pilotes plus petits et plus légers ; donc j’avais la poitrine contre le réservoir pour me cacher le plus possible derrière la bulle et je débordais de partout, j’étais comme un crapaud sur ces TZ, donc mes coudes sortaient très fort. J’ai été surpris la première fois que j’ai touché le coude car je n’aimais pas trop le contact avec le sol. Contrairement à Marquez aujourd’hui je n’utilisais pas les appuis au sol, je n’ai pas été formé à ça, ça ne me paraissait pas naturel, et puis au niveau du cuir nous n’étions pas équipés pour. »

On parle donc de 1983, or Ruggia courait encore en coupe Yamaha-Gauloises en 1985 (il a commencé les GP en 87). Pourquoi la mémoire collective commet-elle cette erreur de penser que Ruggia fut le premier ? Sans doute car le photographe Stan Perec a immortalisé cet instant du Français par un cliché resté célèbre.

Précisons par ailleurs que le coude par terre ne signifie pas systématiquement un angle record en virage : entrent aussi en jeu la taille du pilote (logiquement, avoir de longs bras aide à toucher le coude) et intervient aussi le réglage choisi pour les guidons bracelets : ainsi dès ses premiers tours de roues sur une TZ, Ruggia a cherché une position de conduite pas trop éloignée de celle de la 350 RDLC avec laquelle il venait de remporter la coupe Yamaha-Gauloises, c’est à dire qu’il réglait ses bracelets très ouverts, ce qui en virage rapproche le coude du sol.

Méprise

Chaque début d’année ont lieu les conférences de presse où marques et sponsors présentent aux journalistes leurs écuries pour la saison à venir. C’est l’occasion de découvrir les nouvelles machines dans leurs nouvelles décos et de rencontrer les pilotes de l’année et patrons d’écurie. Fin des années 90, le boss de l’écurie Tech3, Hervé Poncharal, est donc invité à ce genre de pince-fesses : « J’étais à la conférence de presse du groupe Phillip Morris qui présentait à travers ses écuries son engagement dans les sports mécaniques sous les couleurs de Marlboro pour la Formule 1 et de Chesterfield pour les Grands Prix moto, c’est à dire Tech3 ».

Cette année-là c’est à Deauville que ça se passe avec bien sûr la présence des deux pilotes Yamaha-Chesterfield de Tech 3 (Jacque et Nakano) et des deux pilotes Ferrari-Marlboro dont Eddie Irvine venu avec sa sœur qui officiait comme son attachée de presse. La journée se passe bien, chacun fait son petit discours sur une estrade, les appareils photo crépitent, puis un petit cocktail permet à Hervé Poncharal d’échanger quelques mots avec Irvine. Ça parle bien sûr course auto et moto, puis la discussion dévie sur les loisirs :

« Qu’est-ce que vous faites l’hiver, vous avez un peu de temps libre comme nous, non ? » questionne Irvine.

« Exact, on en profite pour refaire les camions, perfectionner l’atelier, et puis prendre un peu de temps libre, on fait du sport, on bouge, on se balade en jet. »

« Ah, tu as un jet ? Moi aussi… »

« Oui, c’est un truc vraiment sympa, on part à plusieurs dès qu’il fait beau et on prend du bon temps. »

« Ouais, j’adore aussi. Il est de quelle marque ton jet ? »

« C’est un Yamaha. »

« Yamaha ? Je ne savais pas qu’ils construisent des jets.  Ce sont des motorisations qu’ils font eux-mêmes ? »

« Oui, c’est un trois cylindres deux temps. »

« Deux temps ???… »

« Oui » répond Hervé un peu étonné, d’autant qu’à l’époque il n’existait aucun jet-ski à moteur quatre temps.

« Et d’un seul coup », se souvient Hervé, « j’ai eu l’illumination : on ne parlait pas du tout de la même chose ! Moi je parlais de mon jet-ski, lui de son jet d’affaire privé… D’ailleurs il était venu à cette présentation aux commandes de son avion depuis l’Irlande, alors je me suis expliqué et on a rigolé un bon coup : on ne boxait pas vraiment dans la même catégorie ! Le soir même, je l’ai accompagné au petit aéroport de Deauville et je l’ai vu décoller car il repartait direct à Dublin pour une grosse fête, mais l’honneur était sauf : en discutant bel et bien jet-ski cette fois, il m’a révélé qu’il possédait par ailleurs un jet à bras Kawasaki, et je me suis senti quand même plus à l’aise pour parler de ce jet-là que de l’autre ! »


Deux journées de ventes/dédicaces auront lieu les 14 et 15 septembre au circuit Carole (93) lors des Trophées Gérard Jumeaux.