Pour ceux qui s’intéressent à la gestion du matériel d’une équipe impliquée en MotoGP, Christophe Bourguignon en aborde avec détail bien des aspects lors d’une interview accordée à la très intéressante mais néanmoins gratuite revue en ligne OTOR (On-Track Off-Road).
Le responsable technique du team LCR Honda illustre tout d’abord à la perfection l’organisation quasi militaire mise en place par Honda au fil des années.
Christophe Bourguignon : « en décembre, nous
recevons une liste du HRC avec tout le matériel qu’ils vont nous
envoyer. Donc l’année suivante, cette liste au complet devra
retourner au Japon. C’est un gros travail que nous faisons en fin
de saison, car nous devons tout démonter. Par exemple un radiateur
doit être désassemblé de ses entretoises, de ses caoutchoucs, etc.
C’est un travail d’une semaine. Les pièces que nous retournons sont
celles qui ne seront pas utilisées avec la moto de l’année
suivante, c’est-à-dire quasiment tout ! Le HRC est toujours en
train de produire des améliorations, mais nous pouvons conserver
des choses basiques comme des écrous, des vis, des clips, etc.,
soit des choses basiques et universelles. Toute l’électronique et
les pièces moteur doivent être renvoyées, et chaque élément est
marqué et bien organisé. Cela a lieu après le test à Jerez, début
décembre. À ce moment, j’aurai reçu la liste des pièces pour la
moto de l’année suivante et ils me demanderont de faire une
pré-commande des pièces d’usage, comme les échappements ou les
carénages. Donc une commande globale est faite en décembre et nous
voyons les pièces en janvier, quand nous nous rendons au Japon pour
le « schooling », c’est-à-dire le montage des motos. À ce
moment, je réajuste la commande et, peut-être, rajouter ou enlever
différentes choses. Avec chaque moto, le HRC fournit un ensemble de
pièces, indépendamment de ma commande, qui couvrira au moins les
premiers essais ».
« Le niveau d’organisation est tel que s’il y a un changement sur
une pièce qui ne figure pas sur ma commande, elle sera placée dans
le Kit ».
« Nous conservons les emballages originaux de chaque élément. Nous
recevons des stickers du Japon avec les numéros de série des pièces
prêtes à être renvoyées, et si certaines manquent, nous devons
faire une note pour dire où elles sont, puisque certaines pièces
doivent retourner au Japon même en cours de saison pour une mise à
jour ».
« Tout est bien organisé, avec des listes de pièces, des stickers
et des notifications concernant les pièces que nous pouvons
conserver. Nous désassemblons et emballons les pièces moteur et les
pièces châssis, et les mettons dans des caisses avec la moto.
Celle-ci repart également, mais si nous la conservons, nous devons
néanmoins la renvoyer au Japon car elle figure sur un carnet et
nous avons besoin d’un nouveau carnet pour l’année suivante. C’est
un cauchemar ! Le nom des pièces aussi ! Au premier abord, ils ne
veulent rien dire; il n’y a pas de relation avec ce que la pièce
est, mais les personnes au HRC ont une grande habitude de cela.
Elles savent qu’une « plate » indique un ensemble
d’ailerons aérodynamiques. C’est très délicat au début mais
maintenant nous le savons ».
S’en suit la description logistique des premiers essais à Sepang et le renvoi direct de certaines pièces vers les ateliers situés à Misano, puis une information intéressante concernant les éléments en carbone…
Christophe Bourguignon : « au début de la saison, nous commandons X ensembles de carénages et de selles. Dans notre cas particulier, comme nous changeons parfois de sponsors à chaque week-end, nous en avons besoin de beaucoup, à cause des différentes peintures et stickers. Ils nous autorisent à les réparer et à les repeindre, mais nous ne pouvons reproduire aucune pièce en carbone, ce qui est normal puisqu’il s’agit de leur moto. Nous avons une personne compétente qui travaille pour les réparer et les repeindre, et, s’il s’agit seulement de rayures, cela peut être réparé. Pour une équipe satellite comme la nôtre, c’est vraiment bien. Un team d’usine comme Repsol remplacera directement au lieu de réparer. Vous pouvez imaginer que cela peut coûter une fortune avec 2 pilotes susceptibles de chuter plus de 20 ou 30 fois durant la saison, car les pièces en carbone fabriquées au Japon sont vraiment d’une grande qualité, et par conséquent onéreuses. Je dirais que chaque pilote a entre 8 et 10 carénages, et peut-être 5 ou 6 selles ».
Cette interview d’Adam Wheeler est loin de se cantonner à ces deux sujets, et aborde en particulier ce que le team LCR a le droit, ou pas, de faire quant aux suspensions, aux freins, aux roues, etc.