De façon très régulière, et depuis maintenant deux années, Hervé Poncharal nous fait l’honneur de nous partager son point de vue après chaque Grand Prix (Voir ici).
Écouter ses propos qui sont le fruit d’une expérience de 40 ans
est toujours un plaisir, d’autant que l’homme n’a pas sa langue
dans la poche. Nous vous partageons ainsi ses émotions, qui peuvent
fluctuer au fil des épreuves de la déception à la plus grande des
joies, sans pour autant occulter les petits grincements de dents
passagers ou, au contraire, les envolées qui vont bien au-delà du
sport…
Et nous l’en remercions grandement !
Vous dîtes que vous êtes triste après ce week-end à Barcelone, mais il y a quand même des points très positifs. Tout d’abord, aujourd’hui (interview réalisée lundi dernier), il y a eu des essais MotoGP qui se sont révélés positifs pour vous, alors que Johann l’avait clairement dit lors de son débriefing, il tenait à faire 2 fois la distance de la course pour ne pas rester sur ce résultat un peu moyen…
« Même si jamais, comme je viens de vous le dire, je les
côtoie depuis plusieurs décennies, c’est là que les pilotes me
bluffent. Parce que quand ils ont vécu un week-end dur nerveusement
et physiquement, le lendemain matin ils ont encore la faim, l’envie
et la forme physique pour rouler et enquiller plus de 70 tours.
Johann est arrivé ce matin avec un état d’esprit hyper positif,
comme quoi il est aussi plus fort que moi pour faire un petit peu
abstraction de ce qui s’est passé, et se projeter sans arrêt dans
le présent et le futur en oubliant le passé. Il s’est mis en jambes
durant quelques tours pour reprendre le feeling puis il a utilisé
la même monte de pneus qu’hier, avec un petit réglage de châssis
différent mais qui n’est quand même pas le jour et la nuit, et il
est parti pour une simulation de course complète qui a été très
rapide. Alors on ne va pas rentrer dans les détails de savoir en
combien il a roulé et où cela l’aurait mis en course, parce que les
essais étaient lundi, mais la course était dimanche. Donc je ne
veux pas rentrer dans ce jeu-là, mais il a bien fait une simulation
de course dans des conditions, piste, température et monte
pneumatique, très proches de celles de la course, et il a fait une
très très belle simulation de course. Certainement que le fait
d’être plus décontracté, moins stressé, moins crispé, moins
agressif sur la moto, ça l’a aidé. Puis il a fait une petite
coupure et il est reparti pour une autre simulation de course, mais
cette fois-ci avec le pneu arrière dur car il avait envie de voir
ce que cela donnait puisque c’est le pneu qu’a utilisé Márquez. Il
a été jusqu’au bout pour voir si sur le dernier tiers ou le dernier
quart de la course cela n’apportait pas un plus, mais le test ne
s’est pas avéré excessivement concluant.
Globalement, il a donc fait beaucoup de tours, ce qui montre encore
une fois sa motivation, sa forme physique et son envie de
progresser. Pour les courses à venir, on verra, mais en tout cas il
est reparti de Barcelone beaucoup plus positif, et je pense
confiant pour Assen, que si on n’avait pas eu cette séance d’essais
le lundi ».
Vous ne pouvez donc pas vous interdire dit espérer de bons résultats d’autant que, rappelons-le, il s’agissait l’année dernière de la dernière victoire de Yamaha en MotoGP…
« Oui, je pense que l’on peut avoir des espoirs pour cette
course car, comme je vous l’ai dit dans une interview précédente,
il y a un jusqu’à présent un quasi copié/collé entre 2017 et 2018.
On avait commencé à souffrir au Mugello, et dans une moindre mesure
à Barcelone, et c’est encore le cas cette année. Mais à Assen, il a
fait la pole et il était dans le groupe de tête quand il a commencé
à tomber des gouttes. Certes, il a fait une erreur stratégique et
psychologique en rentrant tout de suite pour passer sur sa moto en
pneus pluie, et s’est auto-disqualifié de la course, mais on ne
peut pas lui enlever la pole et le fait d’avoir été dans le groupe
de tête jusque-là.
Par contre, il faut modérer notre enthousiasme parce que il a fait
la pole dans des conditions « pneus slicks sur piste sèche
avec des grosses gouttes qui tombaient ». Il a réussi à faire
son tour encore en slicks avant que la grosse averse interrompe la
séance. Donc attendons de voir, mais en tout cas on était
performant l’année dernière à Assen, dans toutes les conditions, ce
qui n’était pas le cas au Mugello et à Barcelone. Donc si on part
du principe que jusqu’à présent on a fait des choses assez
similaires en 2018 qu’en 2017, Assen devrait, je dis bien
« devrait », et quand je vous parle je croise les doigts,
être plus favorable ».
Alors autre motif de satisfaction, même s’il est peut-être un peu tôt pour communiquer là-dessus, la performance de Miguel Oliveira qui s’est encore battu pour la victoire, en étant cette fois parti encore plus loin qu’au Mugello. Il y a quand même là de quoi envisager de belles émotions en 2019…
« Pour ne rien vous cacher, tous les rendez-vous et toutes les négociations que j’ai faits avec KTM jusqu’à présent l’ont été avec Pit Beirer, le directeur Motorsport. Mais je n’avais jamais rencontré Stefan Pierer qui est le propriétaire de KTM. Il était présent à Barcelone, pour la première fois de la saison 2018, avec Hubert Trunkenpolz, le PDG, et ils sont venus me saluer. On a discuté et j’ai souligné le premier tour de folie de Miguel Oliveira au Mugello, après être parti 11e sur la grille, mais je pensais que là, en s’élançant 17e, ça allait être plus compliqué… et bien il m’a fait mentir par ce qu’il a encore fait un départ qui l’a mené aux avant-postes tout de suite, avant de faire une course superbe. On était très très très heureux, parce que vous pouvez imaginer que maintenant, pendant les courses Moto2, on a un œil particulier sur Miguel Oliveira et la KTM. Il est clair que quand celui qui sera ton pilote l’année prochaine performe, cela met la banane à tout le monde. On a accueilli Johann Zarco en tant que champion du monde Moto2 pour ses débuts en MotoGP, et ça serait fabuleux que le prochain Rookies qui arrive chez Tech3 soit aussi champion du monde. Et ce n’est pas impossible, puisqu’il a réussi à revenir à un point de Bagnaia, donc tout reste ouvert. En tout cas, il roule de façon très intelligente. Je n’ai pas trop l’ennuyer et le perturber dans son équipe, et je n’ai pas d’explication, mais les essais sont plus compliqués depuis quelques courses. Par contre, en course, il fait des départs incroyables et il est dans le rythme dès le début. Au Mugello et à Barcelone, il a fait deux courses magnifiques, des courses qui te donnent du baume au cœur car on va recevoir un cador l’année prochaine ».
A suivre…
Retrouvez tous les autres débriefings d’Hervé Poncharal ici !