Mais comment Fabio Quartararo va-t-il s’en sortir dans cette saison 2022 de MotoGP avec cette Yamaha ? L’intersaison de cinq jours a comme démontré qu’il était jeté en pâture dans une arène qui n’a peut-être été jamais aussi hostile sans le moindre atout à faire valoir. Honda a totalement revu sa copie, Ducati fignole la sienne déjà proche de la perfection, Aprilia a un pied dans la cour des grands et Suzuki montre qu’un quatre cylindres en ligne n’est pas une fatalité. Il n’y a que KTM qui a encore beaucoup de travail à faire qui peut consoler une usine Yamaha qui a donné l’impression d’avoir pris un congé sabbatique. Le Français ne devra compter que sur lui-même…
Fabio Quartararo cravache et reste politiquement correct, mais il est aussi bien obligé de constater l’évidence. « Ce qui est décevant, c’est qu’avec autant de temps pour développer le moteur, nous n’avons rien », a déclaré le Français à l’issue de la dernière journée d’essais en Indonésie. « Je ne comprends pas pourquoi sur n’importe quelle piste on est toujours en moyenne 10 km/h moins vite » El Diablo sera obligé de répéter le scénario de l’année dernière pour réussir : partir de la pole position sera nécessaire, résister aux assauts de Marquez et des Ducati sera une tâche difficile. La réponse à la valeur du M1 viendra probablement au Qatar. Traditionnellement, l’ouverture de la saison est favorable à Yamaha : si ce n’était pas le cas, ce serait comme l’annonce d’une année très compliquée à subir.
Certes, le Champion du Monde a terminé second à Mandalika grâce à un dernier assaut face au chrono. Mais le manque d’amélioration de la vitesse de pointe est resté une préoccupation. Le Français a exprimé sa satisfaction quant à sa vitesse avec les pneus usés, mais quelque chose manque avec les nouveaux pneus tendres. « Nous devons savoir pourquoi ». C’est ce que Quartararo a déclaré le deuxième jour. Mais lors de la troisième journée, le numéro 20 a déclaré qu’il se sentait « bien » alors que les essais touchaient à leur fin, affichant un sourire, même si lui et l’équipe attendaient plus du nouveau moteur.
Honda est sorti de sa coquille alors que Yamaha reste dans sa bulle
Pour préserver ses chances, il devra absolument se qualifier sur les deux premières lignes. Or, rien ne sera plus compliqué. A défaut, il ne pourra pas faire valoir son atout maître qu’Andrea Dovizioso, toujours aussi chirurgical dans ses analyses, a ainsi identifié : « Fabio fait la différence dans les changements de direction, il roule comme un fou » assure Dovi. « Il est tellement réactif, il accélère avant et prépare mieux la moto pour les sorties de virage ». Pour jouer comme ça, il faut être seul devant. Avec cette Yamaha, ce ne sera pas simple car le Français l’a affirmé : elle est déjà à 100% de ses capacités. Or, Bagnaia, dans la même évaluation de sa machine, a estimé que sa Ducati GP22 n’était qu’à 85% de ce qu’elle peut donner. Et c’est déjà très rapide…
Maintenant, cette histoire d’une Yamaha atone n’est pas nouvelle lorsque l’on parle de la M1. Tout pilote ayant couru à un certain niveau avec Yamaha, aussi bien en 500 qu’en 250 et même en Superbike peut le confirmer : à Iwata, ils ont toujours produit des motos équilibrées. Des motos pilotables, avec une intégration de performances substantielle entre moteur et châssis, mais rarement brillantes en termes de puissance ou de vitesse maximale. Par ailleurs, Yamaha a toujours eu tendance à s’asseoir sur ses lauriers quand il y avait un pilote dans l’équipe qui pouvait vraiment faire la différence.
Lorsque l’on se souvient de ces données historiques, il n’y a rien de surprenant à constater que Yamaha n’investit pas dans un nouveau moteur. Reste maintenant à savoir si cette ligne traditionnelle est encore tenable dans un MotoGP moderne où Ducati a réécrit les exigences techniques. Honda a répondu à cette interrogation en avouant être « sorti de sa coquille » pour proposer une RC213V totalement revue. Le verdict du Qatar, au soir du 6 mars, est décidément très attendu…