Ce dimanche 15 août 2021, Brad Binder a répondu aux questions des journalistes depuis le circuit du Red Bull Ring, au terme du Grand Prix d’Autriche.
Nous sommes allés écouter (via un logiciel de téléconférence) les propos du pilote sud-africain, qui a su prendre un gros pari en roulant en pneus slicks sur le mouillé pour aller décrocher sa deuxième victoire dans la catégorie après celle de Brno l’an dernier.
Comme à notre habitude, nous reportons ici les paroles de Brad Binder sans la moindre mise en forme.
Brad, qu’est-ce que cela fait de remonter une nouvelle fois sur le podium, qui plus est sur la plus haute marche, pour la première fois depuis votre première victoire dans la catégorie l’an dernier à Brno ?
« Tout ce que je voulais faire aujourd’hui c’était de décrocher un podium. J’avais l’impression que ça faisait des années que je n’avais pas fini dans le top 3. J’y ai été proche une paire de fois, mais sans parvenir vraiment à mes fins. Pour être honnête je vivais une course vraiment horrible avant que la pluie ne fasse son apparition. Le pneu arrière faisait n’importe quoi : A chaque fois que j’essayais de freiner, il commençait à glisser dans tous les sens, et quand j’accélérais il ne se passait rien. »
« J’étais vraiment en difficulté, mais quand j’ai vu les premières gouttes arriver, j’ai commencé à me rapprocher du groupe de tête. J’ai pris conscience que tous ces gars-là allaient rentrer aux stands quand j’ai vu Marc Márquez regarder derrière lui, et personnellement j’ai pris ma décision quand j’ai vu tout le groupe plonger dans la voie des stands. »
« Mon premier tour a été bon, mais les deux derniers ce n’était pas la même chose… Dans le dernier tour les freins étaient même complètement froids, et je ne pouvais même plus freiner. Je devais donc laisser rouler, quelle que soit la pression que j’appliquais sur le levier de frein. J’ai vraiment eu du mal à rester en piste. Mais que voulez-vous : Parfois il faut savoir prendre un pari, et je suis très content de la façon dont ça s’est déroulé. »
« Je vivais une course vraiment horrible jusqu’à ce que la pluie fasse son apparition »
Quand il s’est mis à pleuvoir, votre rythme était vraiment exceptionnel…
« J’ai vraiment commencé à être excité quand la pluie s’est mise à tomber. J’y ai vraiment vu une opportunité de refaire mon retard et d’en tirer un avantage. A ce moment-là je devais être en sixième ou septième position, je ne sais plus exactement, mais dès que j’ai vu le groupe de tête devant moi je me suis dit que c’était une formidable opportunité. Sachant que c’était notre Grand Prix à domicile, je me devais de prendre ce risque, et je suis vraiment très content que cela a payé. »
Lors des deux dernières courses, c’est surtout Miguel Oliveira qui a brillé dans le clan KTM. Est-ce que cela a été difficile pour vous d’attendre ce revirement de tendance ?
« La chose positive pour moi lors des dernières courses est d’avoir pu constater que la moto était capable de beaucoup de choses, et que tout ce que j’avais à faire était de travailler sur moi-même. Quand vous voyez quelqu’un faire quelque chose, ça rend cette dernière plus facile. Je me suis donc mis à travailler davantage, de sorte de pouvoir atteindre le même niveau que mon coéquipier. C’est toujours bien d’avoir un coéquipier très rapide. Cela vous force d’un côté à l’humilité, et d’un autre vous apprenez beaucoup. Je pense qu’au final cela ne m’a permis que de devenir un meilleur pilote. »
Est-ce que vous avez pris la décision de rester en piste de façon totalement instinctive, ou bien est-ce que vous avez eu le temps d’y réfléchir ?
« Quand j’ai vu le groupe de tête rentrer aux stands, j’ai su que c’était une opportunité pour prendre un pari. Ce fut une excellente décision pour le tour suivant, car j’ai pu aller encore très vite dans le premier secteur, même si dans le deuxième ce fut déjà plus compliqué. Au début j’ai tout de même pu m’en sortir sans trop de frayeur, mais dès que les freins ont commencé à refroidir, je peux vous dire que les deux derniers tours ont été très longs. Je me suis aussi souvenu des propos que m’avait tenu mon frère Darryn, qui m’avait expliqué qu’il était impressionné du niveau de grip fourni par les pneus slicks sur le mouillé. »
« Quand les freins ont commencé à refroidir, je peux vous dire que les deux derniers tours ont été longs »
Pourriez-vous décrire votre dernier tour ?
« Pour moi il n’y a pas grand-chose à dire, ce fut un véritable désastre [rires]. J’ai franchi la ligne à l’entame du dernier tour et j’ai vu que j’avais neuf secondes d’avance sur mon tableau de bord. J’ai vraiment fait de mon mieux pour rester en piste. Je freinais, prenais le virage très lentement, et ensuite accélérais en ligne droite jusqu’au prochain enchaînement. »
« Le simple fait de rester en piste dans le dernier tour était quelque chose de quasi impossible. Je dois dire que j’ai pensé que c’était fini pour moi une paire de fois, car dans le virage 3 je ne parvenais pas à m’arrêter dans le virage 3. La seule chose qui ne fonctionnait pas trop mal était mon frein arrière. Je partais en glissade et me retrouvais avec le guidon en butée, tout en essayant de rester par tous les moyens en piste. »
« Je m’attendais vraiment à ce que quelque me dépasse à la volée, mais ce ne fut pas le cas et à la fin quand j’ai vu le drapeau à damier, ce fut un vrai soulagement : Le calvaire était terminé ! Je ne pouvais même pas croire que nous nous soyons imposés aujourd’hui. »
« Quand j’ai vu le drapeau à damier, ce fut un vrai soulagement »
Après tous ces problèmes dans le dernier tour, l’idée de dépasser les limites de la piste dans pratiquement tous les virages vous-a-t-il effleuré l’esprit ? Vous auriez pu être pénalisé pour cela… Est-ce que c’est quelque chose que vous aviez en tête ?
« Ce n’était pas facile de rester sur la piste, et je ne voulais surtout pas dépasser les limites de la piste, vous pouvez en être certain ! Je pense que j’ai rendu mon dernier tour beaucoup plus long qu’il aurait pu l’être. Mais je n’avais aucun contrôle de la situation : Si vous ne pouvez pas freiner, vous ne pouvez pas tourner. Le seul choix qui s’offre à vous c’est de tirer tout droit ou bien de chuter. »
Pensez-vous qu’il soit possible pour les pilotes de s’entraîner à faire face à ce type de situation : Piloter sur le mouillé en pneus slicks ?
« Si vous voulez vous faire mal dans des délais plus ou moins courts, c’est une bonne option en effet [rires]. Non, plus sérieusement ce n’est pas quelque chose auquel vous pouvez vous préparer. »
Vous avez déclaré par le passé que votre plus grand cauchemar était de rouler sur le mouillé. Est-ce que votre victoire du jour va vous amener à réviser votre point de vue ?
« Non, car il ne s’agissait pas de course aujourd’hui, mais de survie. J’ai simplement essayé de finir la course, pas d’être le plus rapide. Pour être honnête j’ai fait plutôt une belle progression sur le mouillé ce weekend. J’ai pu mieux comprendre comment bien piloter une motogp avec les pneus Michelin sur le mouillé. Je suis content de cela. Je dois dire que tout bien pesé, aujourd’hui c’était très effrayant, mais je suis tout de même très content de l’issue. »
Auriez-vous pris la décision de rester en piste si vous aviez été en tête au moment de choisir ? Car aujourd’hui vous n’aviez finalement rien à perdre…
« Le facteur clé pour moi est que j’avais eu avant une première partie de course difficile. Je ne pouvais tout simplement pas piloter à ma main. J’ai donc simplement essayé de faire de mon mieux, et quand j’ai vu l’opportunité de remonter sur le groupe de tête, j’ai simplement décidé d’y aller à fond et de voir ce qui allait se passer. »
Classement MotoGP Autriche Course :
Crédit classement : MotoGP.com