Ce jeudi 30 septembre 2021, Marc Márquez a répondu aux questions des journalistes depuis le Circuit of the Americas, en prélude au Grand Prix des Amériques à Austin, Texas.
Nous sommes allés écouter (via un logiciel de téléconférence) les propos du pilote espagnol, qui aura à cœur de bien faire ce weekend sur l’un de ses circuits fétiches.
Comme à notre habitude, nous reportons ici les paroles de Marc Márquez sans la moindre mise en forme.
Marc, vous ressortez d’une belle quatrième place il y a deux semaines à Misano, et cette fois-ci vous débarquez sur un circuit que vous adorez. Les choses sont bien sûr un peu différentes cette année vous concernant, mais nous avons pu voir par le passé cette saison, sur des tracés allant dans le sens anti-horaire tels que le Sachsenring ou en Aragón, que vous pouviez tout de même afficher un très haut niveau de compétitivité. Est-ce que cela est de nature à rehausser vos attentes pour ce weekend ?
« Il est clair que si on compare Misano et Austin, les approches du weekend sont différentes. Je sais qu’ici je prends énormément de plaisir en temps normal, et c’est donc ce que je vais essayer de faire cette année aussi, car pour l’instant cette saison je souffre plus que je ne prends du plaisir. Nous allons bien voir : c’est une piste difficile, avec beaucoup de freinages, beaucoup de changements de direction, mais le fait que ce tracé tourne sur la gauche va aider, c’est sûr. Mais si je prends du plaisir, il est certain qu’il y aura un bon résultat à la clé. »
« Si je prends du plaisir, il y aura un résultat à la clé »
Les deux journées d’essais réalisées à Misano dans la foulée du Grand Prix de Saint-Marin ont été importantes pour tous les constructeurs, mais peut-être plus encore pour Honda, qui en a d’ailleurs profité pour faire rouler une toute nouvelle moto. Est-ce que vous avez été convaincu par celle-ci, et d’ores et déjà pu identifier des axes de progrès ?
« En effet, nous avons essayé le prototype de la saison 2022, et je dois dire que j’ai senti la différence, la plus grande peut-être depuis que j’ai rejoint Honda. Toute l’équipe travaille dur, et ce fut très intéressant. Nous avons considérablement progressé sur nos points forts, mais bien entendu quand on progresse on tombe ensuite sur d’autres problèmes. »
« Mais nous avons déjà compris certaines choses. Pol Espargaró et moi avons formulé des commentaires assez similaires, et nous avons tous les deux été très rapides avec la nouvelle moto. Mais nous devons continuer de travailler et voir ce que ça donne sur d’autres pistes, et notamment lorsque le niveau de grip est moindre, car à Misano après le Grand Prix ce dernier était bien entendu très élevé. »
Quelle est votre opinion quant aux déclarations de Michele Fabrizio [qui a dénoncé le style de pilotage « à risques » du pilote Honda, dont s’inspirent selon lui de plus en plus de jeunes pilotes] à votre égard suite au décès de Dean Berta Viñales ?
« Avant toute chose, je tiens à assurer de tout mon soutien Maverick, ainsi que toute la famille Viñales. Je les connais, et je peux vous dire que c’est dur. C’est une saison dure et bien triste pour le monde de la moto. »
« Quand je vois le commentaire de cette personne, je dois bien admettre que je ne comprends pas comment elle a pu dire cela, surtout durant cette saison qui est si difficile. Je ne veux pas perdre mon temps sur ces commentaires, car dès que j’ai lu cela je me suis dit que ce n’était même pas la peine de s’appesantir dessus. La meilleure chose à faire est de bien analyser ce qu’il s’est passé pour faire en sorte que ce genre d’accidents ne se reproduisent pas à l’avenir. Le risque sera toujours là en compétition moto, mais nous devons comprendre comment réduire celui-ci. »
Quel est le secret selon vous pour être rapide à Austin ?
« Je n’ai pas à proprement parler de secret, c’est juste que ce circuit convient parfaitement à mon style de pilotage. Je me souviens que lors de la présaison 2013, j’étais déjà deux secondes plus rapide que les autres. Mais je ne saurais vraiment pas dire pourquoi. Après, il faut dire que la piste a beaucoup changé et qu’elle présente beaucoup plus de bosses que par le passé. C’est par conséquent plus difficile de savoir comment y être rapide. »
Compte tenu de votre condition physique, où vous attendez-vous à souffrir le plus ? Dans le premier secteur avec ses changements rapides de direction, où sur les différents gros points de freinage ?
« C’est vrai que je vais sans doute souffrir dans les changements de direction, mais si je parviens à garder mon calme durant le weekend, je suis sûr que je vais réussir à tirer mon épingle du jeu. Je pense que je serai le plus en difficulté dans les longs virages à droite du secteur 4. Mais au-delà de ça, je ne veux pas penser à mon épaule, je veux juste prendre du plaisir en piste. Je souffrirai sans aucun doute de nouveau à Misano. »
Est-ce plus difficile de piloter sur les circuits antihoraires ?
« Je préfère bien sûr les virages à gauche, mais je pense que cela dépend aussi beaucoup de la moto. Par exemple sur la Honda on utilise beaucoup le frein arrière, ce qui est plus aisé dans les virages à gauche. Et puis je fais tellement de motocross que j’ai pris le pli des virages à gauche, et je suis même très à l’aise dans les dérapages de ce côté-là. »
Pouvez-vous nous en dire plus sur la nouvelle Honda ? Quels sont ses points forts et points faibles ?
« Cette nouvelle moto est plus douce, elle procure plus de grip et elle est plus agile en virage. Elle est meilleure dans tous les secteurs, mais cette année notre point faible se situe dans le frein arrière, et c’est sur ce point-là que nous concentrons la grande majorité de nos efforts. Nous avons d’ailleurs considérablement progressé à ce niveau. »
« Le fait est que si nous progressons sur nos points faibles, nous perdons en revanche dans d’autres secteurs où nous étions plus à l’aise jusqu’ici, telles les entrées de virage. Pour l’instant, les chronos sont sensiblement les mêmes entre la nouvelle et l’ancienne moto. Mais c’est justement rare d’être d’emblée aussi rapide avec une nouvelle machine sans s’être encore penchés sur les réglages. Mais il est temps à présent d’analyser tout cela. »
« Notre point faible se situe au niveau du frein arrière »
Maverick Viñales a pris la décision de ne pas courir ce weekend suite à ce qu’il s’est passé la semaine dernière [le décès à Jerez de son cousin Dean Berta Viñales en Supersport 300]. Selon vous, le championnat fournit-il un soutien suffisant aux pilotes dans ce genre de situation ?
« Je pense que Maverick a pris la bonne décision. A sa place j’aurais fait la même chose. En ce qui concerna la Dorna, ils essaient de nous protéger de tout cela. Ils font tout ce qu’ils peuvent pour améliorer la sécurité, que ce soit sur les circuits, les combinaisons, les casques… Mais le risque ne peut pas être éradiqué de la compétition moto. »
« Une fois qu’on a dit ça, c’est vrai que si on regarde par rapport à il y a 20 ans, on constate qu’il y a deux fois plus de catégories, deux fois plus de pilotes en piste. Quand les gens disent qu’ils cherchent à faire émerger toujours plus de jeunes talents, cela implique d’avoir toujours plus de catégories, de pilotes en lice, et donc plus de risques. C’est quelque chose qui est difficile à appréhender, c’est difficile de trouver le bon compromis. A présent nous avons tellement de catégories qu’il ne se passe plus un weekend sans qu’il n’y ait une course : MotoGP, Superbike etc. Cela signifie qu’on multiplie les risques par rapport au passé. »
« Le risque ne peut être éradiqué de la compétition moto »
Vous faites offices de shériff à Austin au vu de votre nombre de victoires. Compte tenu de votre palmarès ici, pouvez-vous analyser les points forts et faibles de Fabio Quartararo et Pecco Bagnaia sur cette piste ?
« Les deux sont très rapides, et comme nous avons pu le voir à Misano, ils sont véritablement sur une autre planète. Quand vous vous battez pour le championnat, vous parvenez à vous donner encore plus que d’habitude. Vous ne savez pas comment, mais vous avez ce petit truc en plus au niveau de la concentration notamment. »
« Le point fort de Quartararo, c’est qu’il a deux courses d’avance. Même s’il abandonne ici il sera toujours dans le coup pour le titre. A l’inverse, c’est le point faible de Pecco, car il ne peut se permettre de faire la moindre erreur. Le point fort de Pecco, ce sont les circuits de type « stop-and-go », alors que pour Fabio, ce sont les virages fluides. »