De façon très régulière, et depuis maintenant deux années, Hervé Poncharal nous fait l’honneur de nous partager son point de vue après chaque Grand Prix (Voir ici).
Écouter ses propos qui sont le fruit d’une expérience de 40 ans
est toujours un plaisir, d’autant que l’homme n’a pas sa langue
dans la poche. Nous vous partageons ainsi ses émotions, qui peuvent
fluctuer au fil des épreuves de la déception à la plus grande des
joies, sans pour autant occulter les petits grincements de dents
passagers ou, au contraire, les envolées qui vont bien au-delà du
sport…
Et nous l’en remercions grandement !
Hervé Poncharal, on imagine que le team manager de Tech3 a quitté l’Argentine très satisfait des résultats de ses pilotes, mais comment le président de l’IRTA a-t-il vécu ce dimanche un peu fou ?
« C’est vrai que c’était un Grand Prix fou, comme bien souvent
quand ça se passe dans des conditions climatiques très incertaines.
On s’y attendait, toute la semaine on a été confronté à ça, et on
s’était dit que ça allait être compliqué à gérer. Sur le plan
technique, comme il n’y a plus de pneus intermédiaires, il ne
fallait vraiment pas se tromper sur le choix des gommes. Quand on a
vu la course des Moto2 qui se déroulait en slicks sur une piste
séchante et que la température grimpait, on pensait être à l’abri
pour les MotoGP, et malheureusement, comme bien souvent dans ces
cas-là quand la météo est instable, quelques petites gouttes sont
retombées. On s’est donc retrouvé dans un cas de figure qui est
déjà arrivé mais qui est très difficile à gérer. Sur la grille, les
gouttes arrivent, la réflexion se porte sur le choix des pneus, et
un moment donné, je pense que la Direction de course a pris la
bonne décision, c’est-à-dire de retarder le départ, bien entendu en
en informant tous les teams managers concernés. Dans ces cas-là,
c’est souvent la porte ouverte à la polémique et suggestions
diverses de part et d’autres. Mais au final, il y a une
réglementation, et dans des cas de force majeure comme ça, il y a
la procédure que l’on appelle Quick Restart qui existe. On retourne
au box, on repart pour faire un tour de reconnaissance, il y a
uniquement un mécano pour montrer aux pilotes sa place sur la
grille, puis il y a le tour de chauffe et le départ. Ce qui a
ajouté un petit peu de piment à tout ça, c’est que Marc a calé sur
la grille. Deux staffs de l’IRTA, ce n’était pas des commissaires
comme je l’ai lu, lui ont fait signe de sortir. Dans ces cas-là, il
y a la pression, c’est le départ, tout le monde est sur la grille,
les moteurs peuvent chauffer, les pneus peuvent refroidir, il faut
que la course parte… ils ont vu que Marc ne comprenait pas. Je
pense qu’il y a un minimum d’honnêteté dans le cas de Marc, il n’a
pas tout à fait compris, et avec l’adrénaline « je veux partir, je
veux partir », il a fait une boulette. Il n’aurait pas dû, c’était
un peu limite et il aurait dû sortir, mais je pense que quand on
est compétiteur et qu’on est si impliqué et dans sa bulle au moment
du départ, on peut faire des choses qu’après, avec le recul et dans
des circonstances un peu plus calmes, on se demande pourquoi on les
a faites.
Voilà. Les 2 personnes de l’IRTA sont sorties de la grille, Marc
s’est remis sur la grille, le départ a été donné suffisamment
rapidement pour pas que les pneus refroidissent trop. Et puis la
Direction de course, de manière tout à fait normale et juste, a mis
un ride through à Marc. Une fois qu’il est panneauté, il a 5 tours
pour le faire et il l’a fait tout de suite, ce qui montrait qu’en
voyant le message sur son tableau de bord et en se remémorant ce
qu’il avait fait, il a compris. Encore une fois, c’est toujours
plus facile de juger quand on est derrière son écran de télé ou
derrière le muret que quand on est sur la piste. À mon avis, il ne
faut pas en rajouter dans cette polémique. Il a été pénalisé et
puis voilà. Je pense que tout le monde a fait son métier du mieux
possible, et même Jack Miller, qui aurait pu être plus aigri, parce
que c’est peut-être lui le plus pénalisé, a dit que c’était tout à
fait normal et a donné son quitus et son soutien à 100% à tout ce
qui avait été fait par la Direction de course.
Après, vous allez peut-être me demander ce que je pense de l’incident entre Marquez et Rossi. En tout cas, pour ce qui est de la procédure de départ, cela est peut-être apparu comme un petit cafouillage de l’extérieur mais on a fait du mieux possible. Et quelque part, j’allais dire que cela montre aussi que l’on est des humains et qu’un monde idéal n’existera jamais. Un monde où il n’y aura jamais un petit grain de sable dans des rouages bien huilés, ça n’existera jamais. Donc quand tout se passe normalement, c’est une belle machine qui tourne bien rond, mais après il y a des choses qui font qu’il faut réagir dans l’urgence, il y a de la pression et il y a de l’humain. Il y a évidemment des gens qui essaient de tirer parti d’une situation qui pourrait peut-être les avantager, et il faut gérer tout ça, avec la pression du temps car il y a des créneaux télé et il y a un peu de professionnalisme à avoir. Donc oui, on pourrait toujours dire que les choses auraient pu être faites un petit peu mieux avec un petit peu moins de stress, mais quand on met du cœur dans ce qu’on fait et qu’on essaie de répondre à toutes les questions, ça peut paraître un peu moins carré que ça pourrait l’être, mais c’est ce qui fait que ça reste du sport, et en MotoGP on a toujours mis le sport en avant. On est poussé par notre envie de bien faire, de faire un show qui soit beau à voir mais surtout qui soit joué dans des conditions de sécurité optimum. Cela restera toujours le leitmotif et la priorité absolue ».
Comme vous nous avez tendu la perche, on va se débarrasser tout de suite de toutes les petites questions, qui ne sont pas forcément très agréables, aussi bien pour les pilotes eux-mêmes que pour les spectateurs, concernant les polémiques.
Concernant Marc Marquez, l’avis général des professionnels du paddock n’est-il pas qu’il en a trop fait et que, vu son niveau de performance, il n’y avait pas véritablement de raison d’être aussi frénétique qu’il l’a été ?
A suivre…