MotoGP Aragon J3, Débriefing Marc Marquez (Ducati/1) : Le secret des virages à gauche, le sourire de Valence, le championnat, etc. (Intégralité)

Au Grand-Prix d’Allemagne MotoGP sur le Sachsenring précédant la pause estivale, on pouvait d’ores et déjà dire que Marc Marquez avait réussi son pari de changer de constructeur de motos, abandonnant Honda au profit de Ducati. En Aragon pour le GP éponyme, il a construit LE week-end parfait et se tourne maintenant vers d’autres objectifs, comme il l’explique dans son débriefing…

Bien que dans un team satellite et au guidon d’une Desmosedici de l’an passé, l’octuple champion du monde occupe de nouveau la troisième place du championnat, à 56 points du leader Francesco Bagnaia, alors qu’il en reste potentiellement plus de 400 à inscrire. Autant dire que la fin de saison risque d’être passionnante, aussi bien pour le Catalan que pour nous.

Comme à notre habitude, nous reportons ici ses paroles lors de la conférence de presse, sans la moindre mise en forme, même si cela est traduit de l’anglais.

Mesdames et Messieurs, bienvenue à la conférence de presse d’après course, ici à la fin de la 12e manche du Championnat du monde MotoGP 2024, un Grand Prix GoPro d’Aragon spectaculaire. Le trio de tête, sa première victoire pour Gresini Racing, sa première victoire pour Ducati, et sa première victoire depuis 1043 jours, énormes félicitations à Marc Marquez, qui complète ici les sept pole positions, la victoire au Tissot Sprint et le succès en Grand Prix. Félicitations Marc ! Deuxième place avec une augmentation de son avance au championnat du monde à 23 points, pour Prima Pramac Racing, Jorge Martin. Et un week-end fantastique pour le pilote Red Bull GASGAS Tech3, Pedro Acosta, le premier double podium de Pedro dans sa saison de débutant déjà impressionnante en 2024.

Marc, nous étions assis dans cette pièce jeudi et vous nous avez dit que vous aviez besoin d’un week-end parfait pour vous battre avec les GP24. Le plus rapide lors des trois séances d’essais, la pole position, la victoire au Sprint, la victoire au Grand Prix, c’était le week-end parfait à ce qu’il semble.
Marc Marquez : « Oui, bien sûr, ce fut un week-end parfait. Nous avons mené toutes les séances, juste le warm up où j’ai décidé avec l’équipe de rester dans le box. Mais oui, dans la course, une fois de plus, nous avons eu des sensations incroyables dès le début, et oui, c’était une course super longue, et c’était difficile de contrôler les émotions dans les derniers tours. Mais oui, quand j’ai franchi la ligne d’arrivée, j’ai eu l’impression d’avoir perdu 3-4 kilos parce que cette moto était de plus en plus lourde, et oui, remporter cette victoire était incroyable. Et puis immédiatement, j’ai commencé à penser à tout le processus que nous avons vécu, à toutes les personnes qui m’entourent, à ma famille, ma petite amie, mon frère, et oui, ils m’ont beaucoup aidé, et surtout l’équipe Gresini m’a donné cette opportunité. Je me suis présenté en tant que pilote débutant et j’ai essayé de tout donner. Et nous l’avons fait. Nous avons réussi. Nous nous fixons un autre objectif et maintenant il est temps de continuer à avancer. »

Vous avez donné l’impression que c’était très facile. Nous savons que ce n’était pas le cas parce qu’à chaque fois que vous êtes sortis en piste ce week-end, celle-ci avait changé, les niveaux d’adhérence étaient différents. Alors quand vous étiez devant avec une telle avance, comme vous l’avez dit, Marc, c’était une question de concentration. Je veux dire, à quel point était-ce difficile ?
« Oui, c’était très difficile à comprendre. Chaque fois que nous sortions, les conditions de piste étaient différentes, mais c’est l’un des points forts de mon style de pilotage, et oui, ces conditions m’ont aidé à avoir cette marge pendant la course. Je gérais la situation d’une bonne manière. Et en fait, au milieu de la course, plus ou moins, j’ai vu que durant un tour Martin commençait à réduire mon avance. J’ai alors fait le tour le plus rapide au milieu de la course pour continuer à avancer. Et maintenant, le prochain objectif est d’essayer de trouver la régularité qui est l’une des choses les plus difficiles pour se battre pour le championnat. »

Pensez-vous que cela pourrait être le début d’une compétitivité accrue pour vous ? Pensez-vous que cela pourrait être la percée ?
« Oui, bien sûr, ce week-end a été très bon. Les sensations étaient incroyables, mais nous devons être réalistes et les conditions étaient très spéciales. Et oui, pour moi, le plus important était le Red Bull Ring GP où je me suis senti très bien et où j’étais à un niveau très proche des meilleurs. Oui, il y a quelque chose qui fait que la valeur de la victoire est très élevée. Maintenant, nous allons essayer de trouver la constance, nous devons comprendre pendant les courses, mais je sais qu’il arrivera un week-end et que nous aurons plus de mal que les autres. Mais ce sera la deuxième clé. »

Puis-je avoir votre opinion objective sur ce qui s’est passé entre Alex et Pecco ?
« J’ai vu les courses entre Alex et Pecco. Et oui, je pense qu’Alex est sorti large, il était dans la piste mais quand vous arrivez dans le virage à droite, il ne s’attendait pas à ce que Pecco soit là, et Pecco était optimiste de le dépasser par l’extérieur, en essayant d’utiliser la trajectoire propre, puisque si vous sortez de la trajectoire propre, cela devient plus risqué. Je pense que c’était une situation très malchanceuse et j’espère que tous les deux vont bien. »

Marc, diriez-vous que vous commencez maintenant à piloter la Ducati de manière instinctive ?
« Vous savez, depuis quelques jours, j’ai commencé à piloter un peu plus naturellement. Pour une raison ou une autre, je commence à mieux comprendre le pneu arrière, mais j’ai hâte d’arriver sur d’autres circuits pour essayer de comprendre si nous continuons à nous améliorer, parce que nous regardions beaucoup la moto 24, mais elle est différente et nous devons piloter avec nos réglages, avec nos performances, et croire en nous-mêmes et en nos techniciens et notre équipe qui fait un très bon travail. Et petit à petit, je commence à piloter plus souplement et à l’instinct, donc cela fait une différence. »

Nous savons que vous avez traversé beaucoup d’épreuves et vous avez dit que le dernier tour a été assez difficile pour vous sur le plan émotionnel et pour rester concentré. Pouvez-vous nous citer quelques éléments qui vous ont traversé l’esprit ?
« Vous savez, dans les trois derniers tours, je pensais déjà au podium (rires). Plus que le podium, au garage Gresini qui est très amusant et joyeux, c’est toujours la fête. Oui, mais à part ça, la première chose, ce sont les gens qui m’entourent. Je veux dire, quand vous êtes dans une situation très difficile, quand vous êtes dans une situation très profonde, si vous n’avez pas une équipe vraiment humaine, des personnes vraiment gentilles qui souffrent plus que moi, et c’est ce qui fait la différence.
Donc oui, c’était une célébration très étrange parce que, vous savez, l’adrénaline était plus élevée dans d’autres courses pour célébrer une deuxième ou une troisième place, alors qu’aujourd’hui c’était comme de l’adrénaline mais l’émotion était plus forte que l’adrénaline. »

Hier, vous avez dit que vous n’aimiez pas vous mettre la pression, alors que vous l’avez subie à de nombreuses reprises au cours de votre carrière. Diriez-vous qu’aujourd’hui vous étiez le grand favori de la course ? Diriez-vous que vous avez ressenti plus de pression que jamais ?
« Oui, c’est vrai. Aujourd’hui, je me suis mis la pression et, comme vous l’avez vu hier après la course sprint, je n’ai pas profité, parce que je savais qu’aujourd’hui était un jour important et je savais que j’avais une opportunité importante. C’est pour cette raison que j’ai essayé d’être concentré, et oui, quand vous avez la vitesse, il semble que vous pouvez gérer la situation, vous êtes régulier, vous êtes brillant et vous êtes une personne différente. Mais vous êtes le même. Voyons donc si nous pouvons avoir une meilleure vitesse lors des prochaines courses et essayer de nous battre ou de nous rapprocher des meilleurs. »

Où situez-vous cette victoire dans votre classement personnel ? Et vous souvenez-vous du dernier week-end où tout s’est passé aussi bien que ce week-end ?
« Je situe cela à un niveau très égal à celle de 2021 en Allemagne. Je veux dire que lorsque vous avez beaucoup de blessures, que la période est très lourde, la valeur de la victoire est différente. Il est vrai que j’ai gagné 60 fois, mais ces deux victoires, ainsi que la première en MotoGP, sont les plus importantes, parce que la confiance vous est donnée d’une manière différente et cela vous donne une confiance supplémentaire. Il y a longtemps que je ne me suis pas senti aussi bien, et vous savez, les tours de ce week-end étaient courts: j’ai juste roulé, j’étais facile, j’étais juste fluide, mais j’étais très concentré pour ne pas faire d’erreurs. Comme l’a dit Jorge, on peut être rapide un week-end, Enea l’était à Silverstone, mais l’une des choses que je veux travailler, c’est la régularité, et c’est ce qui est le plus difficile à obtenir. »

Marc, hier Pecco a dit qu’il était incroyable que vous puissiez faire tourner la moto avec beaucoup plus d’angle que lui dans quatre ou cinq virages ici. Et il a essayé de le faire et il a toujours perdu l’avant. Quel est votre secret ? Comment pouvez-vous le faire ?
« Je dirai mon secret s’il me dit son secret pour les virages rapides à droite (rires). Donc quand il me dira son secret pour les virages à droite, je dirai le secret pour les virages à gauche. Chaque pilote a des points forts et malheureusement pour moi, la plupart des circuits sont à droite. Alors oui, dans les virages à gauche, je me sens super bien. »

Marc, y a-t-il eu beaucoup de fois au cours des 1042 dernières journées où vous avez pensé que vous ne seriez pas de retour sur la plus haute marche du podium, et si c’était le cas, à quel moment avez-vous réalisé que c’était cette année que vous alliez revenir ?
« Lors du test de Valence, j’ai réalisé que cela arriverait. Oui (rires). Non, j’ai réalisé que nous aurions nos opportunités. Une chose est de se battre pour le championnat et pour cela nous devons continuer à travailler. Mais à Valence, j’ai commencé à comprendre que tôt ou tard, nous arriverions, et c’est pour cette raison que je suis resté calme et que je n’ai pas trop surpiloté. »

Marc, il reste 8 week-ends et presque 300 points. Pensez-vous qu’il est possible de se battre pour le titre ? Pouvez-vous pouvoir vous battre si vous trouvez cette constance dont vous avez parlé, ou pensez-vous qu’il vous faut quelque chose d’autre ?
« Non, nous sommes loin du compte. Nous avons commencé à perdre des points, de plus en plus, de plus en plus, et nous sommes trop loin. Et ce n’est pas seulement un pilote, il y a deux pilotes qui ont plus de régularité que nous, et un week-end ne changera pas notre vie. Bien sûr, cela aidera notre vie, mais ne la changera pas, et nous sommes trop loin pour nous battre pour le championnat cette année. Mais voyons si nous pouvons nous battre au-delà de cette position, dans le top 3, car c’est un objectif réaliste. Mais oui, il y a encore beaucoup de points, beaucoup de choses peuvent arriver parce que nous savons qu’en Asie, il y a toujours des orages, de la pluie, et on ne sait jamais. Mais nous continuons à prendre du plaisir et c’est le plus important pour moi, et nous allons essayer de continuer à nous battre avec les meilleurs. »