Programmée le vendredi midi du Grand Prix de Valence, cette conférence des représentants des constructeurs présents en MotoGP est passée sur le moment complètement inaperçue.
Pourtant, les propos qui y ont été tenus étaient tout à fait intéressants et on en retrouve fréquemment des bribes, ici ou là et déformées. Aussi, avons décidé de nous retrousser les manches et de nous lancer dans sa transcription intégrale avant, vu sa longueur, de la publier en plusieurs parties.
Étaient présents Livio Suppo (Repsol Honda team Principal), Paolo Ciabatti (Ducati MotoGP Project Director), Lin Jarvis (Yamaha Motor Racing Manager Director), Davide Brivio (Suzuki Team Manager), Romano Albesiano (Technical and Sporting Aprilia Racing Manager) et Pit Beirer (KTM Motorsport Director).
Première
partie : chacun des six représentants des
constructeurs dresse le bilan de la saison
2017 (rappelons-le, avant que le Grand Prix de Valence se soit
déroulé)
Deuxième
partie : retour des avantages pour Suzuki et
la moto 2018 de Zarco
Troisième
partie : teams satellites 2019 et
Ducati vs Yamaha
Livio, Lin et Davide, on a parlé d’une possibilité que vous ayez un team de test européen. Qu’en est-il vraiment ?
Livio Suppo : «
Nous l’avons envisagé, mais pour le moment rien n’est décidé. »
Lin Jarvis : « De
notre côté, nous n’avons pas de plan. Il y a beaucoup de rumeurs
créées par quelques uns, mais certainement pas par nous. Je pense
qu’au contraire, il y a un mouvement général pour faire des
économies en évitant des essais excessifs. La position de Yamaha
est d’avoir en priorité notre team de test au Japon, comme Honda en
fait, et si vous démarrez un nouveau team de test en Europe, cela
demande de considérables dépenses supplémentaires. Et je pense
qu’avec la nouvelle réglementation concernant les essais, à partir
de maintenant et dans le futur, qui est plus raisonnable pour tout
le monde, espérons qu’il ne soit pas nécessaire de dépenser tant
d’argent et de temps dans ces essais excessifs. »
Davide Brivio : «
Nous y avons pensé, mais pour être honnête, il est déjà maintenant
très difficile de tout contrôler avec 19 courses. Nous n’avons pas
tellement de ressources et nous devrions déplacer une partie du
personnel qui participe normalement au championnat pour faire des
essais. Cette année, nous avons parfois utilisé Sylvain Guintoli,
et oui, nous avons pu en retirer certains bénéfices. C’est donc une
chose à laquelle on pense mais ce n’est pas facile à organiser. Les
discussions continuent. »
Davide, vous dites que votre saison a été affectée par le fait d’avoir eu deux nouveaux pilotes. Referiez-vous le même choix aujourd’hui ?
Davide Brivio : «
Concernant la décision des deux pilotes, oui, je pense que nous
referions le même choix. Nous avons démarré notre projet en nous
appuyant sur Maverick et nous avons pris Aleix pour développer la
moto car c’était un expert. Et soudainement, ce projet s’est arrêté
car Maverick a décidé de partir. Nous avons donc décidé de
redémarrer de nouveau le projet et Andrea est un pilote capable de
faire un podium et d’obtenir de très bons résultats. Et je pense
qu’il peut le faire si nous sommes en mesure de régler tous les
problèmes. Et pour Alex Rins, nous essayons de faire progresser le
potentiel d’un pilote pour le futur, et je crois qu’Alex est
celui-là. Je suis donc heureux du choix et maintenant nous devons
juste faire que tout fonctionne. Oui, comme je l’ai dit,
probablement que l’hiver était trop tôt pour qu’ils prennent des
décisions (concernant le développement) et c’est un risque que nous
avons pris, mais d’un point de vue sportif, c’était une bonne
décision et je pense que l’on devrait en voir certains bénéfices
l’année prochaine. »
Pit, pourquoi avez-vous reconfirmé Smith pour la saison prochaine ?
Pit Beirer : «
Tout d’abord, parce qu’il un contrat pour l’année prochaine, donc
il n’a jamais été question qui ne roule pas l’année prochaine. D’un
autre côté, il a eu beaucoup de pression car ses résultats n’était
pas très bons, et bien sûr je sais cela, mais vous devez aussi voir
que les pilotes ont pris un très gros risque en s’insérant dans un
nouveau projet, sur une nouvelle moto et avec une nouvelle équipe.
Quand les pilotes ont signé avec nous, il y avait juste des
morceaux de papier et ils n’ont même pas pu voir la moto. Il y
avait donc de gros risques pour les pilotes à croire en notre
projet, en venant d’une moto très compétitive. Et également, cela
n’aurait pas été fair-play de mettre à pied un pilote a la moitié
de la première saison. Donc nous avons clairement décidé de lui
laisser le temps de progresser. Je sais qu’il est meilleur que ce
qu’il montre. Quelque chose ne fonctionne pas et je me sens mal
pour lui qu’il ne performe pas comme il devrait performer. La
pression est devenue de plus en plus grande, et avant qu’il parte
pour la tournée Pacifique, j’ai saisi l’opportunité de confirmer
que nous honorerions notre contrat et qu’il aurait sa place, afin
d’alléger sa charge. Parce que comment voulez-vous performer quand
vous arrivez dans le paddock et que la première question est
« combien vous reste-t-il d’heures avec cette équipe avant
qu’il ne vous jette dehors ? ». J’ai donc juste voulu
souligner notre soutien durant la tournée outremer, et nous avons
déjà pu voir qu’après simplement cette confirmation, il a fait
trois courses avec de très bons résultats. Je suis heureux et
reconnaissant envers les trois pilotes que nous avons, Pol, Bradley
et Mika, ils font tous un travail fantastique car c’est très dur
pour le moment. Ça a donc été un plaisir pour moi de confirmer
qu’il resterait avec nous et ferait partie de notre équipe l’année
prochaine. »
Livio, Lin et Paolo, êtes-vous satisfaits de la nouvelle réglementation concernant les essais pour 2019 et 2020 ? Pensez-vous que 20 courses seraient un maximum et, dans ce cas, auriez-vous besoin de davantage de moteurs ?
Livio Suppo :
« Concernant la réglementation des essais, comme
Lin l’a dit avant, je pense que la situation est maintenant OK. On
ne peut pas à la fois toujours demander des réductions de coûts et
faire des essais partout. Et en considérant que maintenant, il y a
six constructeurs, dont trois au Japon et trois en Europe, il est
correct d’essayer d’avoir une sorte d’équilibre pour faire des
essais en Europe et ailleurs, car il y a beaucoup de courses en
Europe.
Concernant les 20 courses, je suis d’accord avec les pilotes ;
c’est plus qu’assez (rires) ! Il faut aussi considérer
cela : quand vous avez 20 courses, il n’est pas facile de
trouver une semaine pour encore faire des essais. Je pense donc que
la limitation des essais est la bienvenue.
En ce qui concerne les moteurs, honnêtement, je ne suis pas un
ingénieur et je n’en sais rien. Je ne veux pas dire quelque chose
qui serait probablement faux (rires). Comme toujours quand je parle
technique (rires). »
Lin Jarvis : « Je
suis d’accord avec les commentaires de Livio concernant les essais.
En terme de saison, 20 courses c’est beaucoup, pas seulement pour
les pilotes mais aussi pour chacun de vous (les journalistes), pour
nous tous et pour tout le personnel. Faire la tournée Pacifique est
toujours un problème exténuant pour tout le monde à la fin de
l’année. Et la première course supplémentaire (Thaïlande) sera
aussi en dehors de l’Europe. Donc assurément, nous ne voulons pas
en faire plus de 20, et je pense que si l’on en fait 20, nous
devrions également réduire quelques essais. Je crois que le plan
est d’enlever un test hivernal pour que ce soit un peu plus
équilibré.
En ce qui concerne les moteurs, probablement que oui. Nous avons
maintenant sept moteurs pour faire 18 courses, et si nous en avons
20, la logique voudrait que l’on n’augmente ce nombre à huit. C’est
ce que j’imagine, mais ce n’est pas vraiment un gros problème car
c’est une question de reconditionner les moteurs que l’on a
déjà. »
Paolo Ciabatti : «
Je commence par la fin, et comme Lin l’a dit, on devrait
probablement avoir besoin d’un moteur de plus. Mais je pense que
quand il sera temps, la MSMA se réunira et trouvera la meilleure
solution, comme nous l’avons fait dans le passé.
Concernant la limitation des essais, je pense qu’en principe Ducati
est d’accord avec l’idée, mais nous ne sommes pas d’accord avec le
fait que la décision ait été prise un mois avant le début de la
nouvelle saison. Nous pensons que c’est une sorte d’irrespect
envers les sociétés qui ont déjà planifié leurs essais et également
leurs allocations de motos entre les teams d’usine et les teams
satellites. Et nous sommes contre le fait que ce changement ait été
décidé au Japon, alors que la nouvelle saison commençait un mois
après. »