Rossi arrive à compenser ses déconvenues et coups du sort par un
pilotage absolument magnifique. Malgré quatre courses hors du top
5, il parvient à rester deuxième à moins de 30 points de son ancien
coéquipier. Si Loris Capirossi s’est effondré, Dani Pedrosa et
Marco Melandri peuvent jouer gros. Ils affichent cependant une
moins bonne vitesse de pointe que « The Doctor ».
Puis vient la manche américaine, la fameuse.
Le n°46 partait très loin. Mais en ce jour, sur le
circuit de Laguna Seca, un seul homme pouvait gagner, c’était comme
logique. C’était le festival Nicky Hayden. Dépassements à tout va,
rythme incroyable du début à la fin, la victoire et pour couronner
le tout, un nouvel abandon de son rival. Il nous gratifia
d’un tour d’honneur plein d’émotions resté dans la légende de ce
sport.
Nous pouvons l’avouer sans se tromper : ce jour fut sans doute l’un
des pires de la carrière de « Vale ». Après être parti
dans le peloton, il donna tout pour remonter, sans grand succès.
Le rythme n’y était pas. Mais quand tout semble
aller au plus mal, certains événements peuvent vous faire sentir
comme un chat noir.
Comme si le destin avait jeté son dévolu sur vous. Une casse
moteur en pleine course par exemple. Après ce run de 25 points pris
par Hayden, Rossi va devoir sortir le grand jeu pour
revenir.
Impossible de dire si c’est la rage qui a réveillé Rossi, ou si la
pression était trop grande pour Hayden, mais toujours est-il que
l’américain semble sensible à la pression sur les circuits
suivants. À Brno, dernier Grand Prix européen sponsorisé par un
cigarettier pour l’anecdote, il ne peut pas faire mieux que
neuvième tandis que Rossi franchit la ligne en deuxième place.
En Malaisie, en Australie puis au Japon, Rossi déroule et figure
toujours sur le podium. À l’issue de la tournée outre-mer,
seulement 12 points séparent les deux hommes. En avant
Estoril pour l’avant dernière manche.
Rossi doit frapper un grand coup. L’ambiance est
électrique avant la course, comme annonciatrice d’un grandiose
spectacle. La course suit son cours, mais alors que tout était à
faire, Dani Pedrosa commet l’une des plus grosses boulettes de sa
carrière.
Alors que rien ne pressait, il empale son coéquipier en tentant un
dépassement absolument impossible. Le premier zéro pointé de la
saison pour Hayden allait sans doute lui être fatal. Rossi, auteur
de la pole et jouant devant, ne semblait pas à même de laisser
filer 25 points secs ce jour-là.
Mais au fur et à mesure que le Grand Prix avança, les spectateurs
furent surpris de découvrir un Toni Elías absolument magistral, qui
affichait un meilleur rythme que l’italien. Ce dernier n’était pas
monté sur le podium une seule fois de la saison à cet instant
précis. Arrivant dans le dernier secteur au terme d’une
bataille légendaire, les deux ne purent se départager.
C’est bien l’Espagnol, sorti de nulle part qui vint assassiner
Rossi sur la ligne d’arrivée pour deux millièmes de secondes. Au
final, cela fait toujours 20 points de rattrapés mais l’impact est
psychologique plus qu’autre chose. Tout se décidera à
Valence.
Huit points. C’est ce qui séparait Rossi, leader du championnat
pour la première fois de la saison et Hayden qui avait mené toute
la saison durant, ou presque. Mine de rien, toute la pression était
sur l’italien. Ce dernier, en signant sa cinquième pole de la
saison, s’adjuge un avantage confortable.
Puis vient le départ d’une course irréelle. Grand favori, Rossi
n’arrive pas à rouler. À l’heure actuelle, sa contre performance ne
trouve toujours pas d’explications. Rapidement tombé dans le
peloton, il chuta seul dans un virage lent du tourniquet espagnol.
Une fin amère, qui conclut malheureusement une année de galères et
d’acharnement.
Devant, c’est un Troy Bayliss en mode « vengeur » qui vient
s’imposer devant Capirex et Nicky, qui remporte donc son premier
titre mondial. Puis les pleurs, la célébration, le tour sans
casque, le drapeau américain brandi.
Nicky Hayden nous fit vivre un moment hors du temps ce jour-là.
De l’émotion à l’état pur, des sensations
inoubliables. Cela venait parachever une année à part dans
l’histoire des Grands Prix, où la régularité a battu la
vitesse.
Sept vainqueurs différents, des courses magnifiques, de l’émotion,
bref, cette saison à toutes les raisons de rester dans les annales.
Au dessus de nos têtes, cette étoile brille encore plus fort
désormais. Chaque fois qu’on regarde le ciel, impossible de
ne pas la voir.
Photo de couverture : Box Repsol.