Le monde des Grands Prix reste un univers impitoyable où la frontière entre la gloire et la misère est ténue. La compétition est si grande que chaque sortie sur le circuit est un enjeu. Un trou d’air dans les performances et c’est une carrière qui bascule. Le cas de Lorenzo Baldassarri montre qu’en deux ans seulement, on peut, comme Fabio Quartararo, accéder au MotoGP et devenir Champion du Monde, où sombrer dans l’anonymat jusqu’à reprendre ses études au lycée. L’Italien était pourtant, il y a peu, un protagoniste majeur du Moto2…
Ses cinq victoires en Grand Prix en atteste : Lorenzo Baldassarri n’est pas une tanche. Cependant, en un peu plus de 24 mois, il est passé du statut d’une des figures de proue de la relève italienne à la fosse des espoirs qui ont déçu. Il était de l’académie VR46 qu’il a quittée, mais il n’attribue pas cette déconfiture à ce choix : « après les adieux à la VR46, qui m’a tant apporté à plusieurs égards, j’ai retrouvé un environnement qui m’a apporté tant de sérénité, et en fait je me sens en forme tant physiquement que mentalement » répond-il sur cet aspect lors d’un entretien vérité sur Motosprint. En revanche, l’arrivée d’un nouveau pneu Dunlop auquel il a du mal à s’adapter, et ses choix sportifs, ont pesé lourd dans la balance, l’entrainant dans une spirale négative qui l’englue à présent au fond des classements.
Une situation qui le submerge. On lit ainsi : « en 2021 les choses ont vraiment mal tourné. J’ai un amour sans borne pour les motos, mais cette année j’en suis presque venu à détester le paddock et le sport moto ». L’écueil a été son choix sportif, illustré par un retour dans un stand Forward qu’il avait déjà connu. Mais les choses ont changé : « une marque historique comme MV Agusta a été incluse dans le projet » rappelle-t-il pour expliquer sa motivation à revenir dans l’équipe de ses débuts. « Sur un plan purement technique, la moto présentait quelques lacunes. Je suis sorti plusieurs fois sur la piste avec une moto différente, et petit à petit ma confiance a diminué ».
« Je suis souvent tombé, et tout aussi souvent nous n’avons pas compris pourquoi » déclare Baldassarri. « Malheureusement, lors d’une chute, je me suis aussi blessé, ce qui a contribué à me démoraliser course après course, à tel point que lors des dernières courses je suis vraiment sorti en piste avec le moral bas : heureusement ma famille était proche de moi. Après tout, personne n’aime courir sans être compétitif du tout : comme je l’ai dit, j’aime les motos et j’aime rouler, mais si vous prenez trois secondes face aux leaders, il vaut mieux aller à la plage ».
Lorenzo Baldassarri se souvient de Valentino Rossi chez Ducati
Pour bien se faire comprendre, il ose ce parallèle : « pour Valentino Rossi, les deux ans de Ducati ont pris dix ans de sa vie, tandis que dans le reste de sa carrière, les résultats lui ont permis de courir jusqu’à cette année ». Le voilà à présent sans guidon pour 2022. Qu’envisage de faire Lorenzo Baldassarri ? « Mon envie serait de rester en Moto2 pour continuer à poursuivre le rêve MotoGP, mais pour le moment cela me semble difficile. L’alternative numéro deux serait le Superbike, mais là aussi, il semble qu’il n’y ait plus de selles. Certes, je ne voudrais pas rester les bras croisés, à tel point que j’accepterais aussi une bonne moto au CEV Moto2, avec quelques wild cards en championnat du monde : un pas en arrière pour en faire deux en avant ».
Mais il y a aussi ça : « dans la position où je suis plutôt que d’apporter de l’argent aux équipes, je préfère retourner au travail. J’ai repris mes études. Je me suis toujours dit que tôt ou tard je finirais le lycée, et maintenant je le fais ». Une carrière ne tient décidément à rien et elle peut basculer en peu de temps.