Depuis leur apparition en 2010, ils sont martyrisés en permanence aux quatre coins du monde mais ils ne bronchent pas. Ils, ce sont les moteurs Honda de Moto2 qui tireront leur révérence à la fin de la saison 2018 après neuf années de bons et loyaux services.
Malgré un problème très temporaire concernant le serrage de la queue de vilebrequin et quelques faux points morts de la boîte de vitesses, le brave cheval de trait issue de la CBR600 a en effet fait preuve d’une incroyable fiabilité lors d’une utilisation pour laquelle il n’était absolument pas prévu.
Il la doit à sa conception déjà ancienne, ce qui, au passage, explique la taille surdimensionnée des radiateurs, mais aussi à une préparation et un entretien très rigoureux, tout d’abord de la part de la société Geo Technology puis de ExternPro depuis 2013.
À l’image du moteur Triumph qui va lui succéder, la préparation consiste avant tout en un travail sur les conduits d’admission et d’échappement, et un changement d’arbres à cames, de ressorts de soupapes, d’alternateurs et de pignons de première de la boîte de vitesses. L’équipage mobile, vilebrequin, piston et bielles, reste de série.
Environ 200 moteurs sont préparés chaque année avec une différence de puissance tournant autour de 1 % alors que le contrat avec Dorna tolère jusqu’à 3 %.
Après un montage extrêmement soigné, chaque moteur est passé au banc pendant deux heures. Ses performances et ses compressions sont enregistrées, puis un échantillon d’huile est prélevé pour s’assurer que tout s’est bien passé. Il est alors scellé à quatre endroits pour empêcher tout démontage.
Le moteur est tiré au sort et attribué à un pilote qui l’utilisera pendant trois courses, à la suite de quoi il retournera chez ExternPro sur le circuit d’Aragon pour y être entièrement reconditionné en y montant un vilebrequin, des bielles et des pistons neufs.
Entre-temps, il aura été poussé dans ses derniers retranchements par son pilote à la quête du dernier kilomètre heure. Limité au rupteur à 15 900 trs/min, il lui arrive parfois de dépasser largement cette limite au rétrogradage. Tout cela est consigné électroniquement et transféré par une clé USB à ExternPro. Si cela arrive trop souvent, le pilote est alors prévenu que cela ne présente certes aucun souci de fiabilité, mais que cela finira par entacher les performances de son moteur lors du troisième et dernier Grand Prix. On dépasse effectivement parfois plus de 17 000 trs/min…
La problématique est la même avec la température d’eau que certains teams laissent monter exagérément.
Avec plus de 2 millions de kilomètres parcourus avec une fiabilité exemplaire, le bilan est donc extrêmement positif et il reste maintenant une année à Triumph pour se préparer à prendre cette difficile succession (voir la synthèse des derniers essais ici).
À partir de 2019, les teams auront à repartir de zéro en ce qui concerne les réglages et les astuces d’exploitation du nouveau propulseur, mais également à se familiariser avec une électronique beaucoup plus sophistiquée comprenant entre autres Launch Control, Traction Control et Anti Wheeling : nul doute que les écarts seront alors plus grands !