Il ne vous aura pas échappé qu’un team Français fait courir des MotoGP. Tech3 s’est en effet retrouvé au cœur de l’actualité l’année passée, se séparant de ses deux Yamaha habituelles pour désormais engager des KTM RC16. Mais Tech 3 ne date pas d’hier : retour sur cette véritable institution du monde des Grands Prix.
L’histoire commence au début des années 1980, avec l’émergence d’un certain Hervé Poncharal. Ex vainqueur du Guidon A.C.O et du Trophée AGV, il s’oriente très rapidement vers la gestion d’une équipe. Il s’entoure de copains, tels Guy Coulon ou Dominique Sarron, frère de Christian : un tel groupe ne pouvait que fonctionner. Gravissant les échelons, la structure se forme et se fait remarquer peu à peu dans le petit monde des Grands Prix.
C’est en 1990 que l’histoire débute. cette année là, Dominique Sarron revient en 250CC après une douloureuse expérience en catégorie reine. Avec le support de Rothmans et une Honda NSR250 de pointe, le duo Sarron-Tech3 réalise une année en demi teinte, mais qu’ils les marquera à vie. Ceux-ci se débrouillaient, œuvrant dans de petits locaux, mais s’amusaient. Énormément. C’était comme le début d’un rêve en somme.
Certaines rencontres marquent plus que d’autres. Pour l’exercice 1993, Suzuki porte son choix sur le très talentueux John Kocinski, ex-pilote Roberts Yamaha en 500CC. Tech3 alors responsable d’une RGV250, devra évoluer avec l’Américain.
Kocinski était exigeant, et irrégulier : Après une entrée en matière remarquée, il n’arrive pas à confirmer. À Assen, John est en feu dans les derniers tours, et remonte très fort. En bataille avec Tetsuya Harada, il se fait passer tard dans la course pour finir troisième. Il devient fou de rage. Il explose son moteur d’énervement, jette sa moto dans le tour d’honneur et ne se présente pas sur le podium. Du Kocinski dans le texte, viré un jour plus tard.
Tech3 fait exploser des pilotes qui nous ont marqué, positivement cette fois. Le profil type ? Un guerrier, bosseur et charismatique. Le plus représentatif est sans doute Olivier Jacque. En 2000, au terme d’une course exceptionnelle à Philip Island, « Jacque attack » passe Nakano sur la ligne pour donner un titre mondial à l’écurie (et un doublé grâce au Japonais). Un Français est champion du monde, au sein d’une équipe français. L’exploit n’a encore jamais été reproduit. Jacque était l’un de ces purs produits Poncharal : il était dans ses rangs depuis 1995, et ne le quittera qu’en 2003.
Après un passage en 500CC remarqué pour 2001, une vraie relation de confiance s’installe entre Yamaha et les Français. Les années se suivent, avec du bon, et du moins bon. Mais toujours avec des pilotes de grand talent : Marco Melandri, Toni Elias, Sylvain Guintoli et Colin Edwards sont de bons exemples.
Les années 2010 permettent de passer dans une nouvelle dimension. L’équipe voit une opportunité en Moto2, et y remporta même une victoire (la seule). Un Yuki Takahashi en mission en catalogne permit à la Mistral 610 de prendre le meilleur sur les Suter et autres Moriwaki.
Ce châssis a été conçu par Coulon, un véritable sorcier des temps modernes. Un homme discret, humble au possible mais un énorme passionné. Aujourd’hui, impossible de dissocier Tech3 de la chevelure blonde du génie autodidacte.
Récemment, de nombreux pilotes aux caractères bien trempés ont roulé sur les motos noires sponsorisées par une boisson énergisante bien connue. Cal Crutchlow nous livra une saison 2013 d’anthologie, s’affirmant comme l’un des prochains dangers de la catégorie et animateurs du peloton.
Et outre le solide Bradley Smith et le fougueux Pol Espargaró, comment ne pas citer Johann Zarco. Arrivé en 2017 avec deux titres de Moto2 en poche, il brilla rapidement. Au Qatar, pour l’ouverture de la saison, il mène la course devant les meilleurs pilotes du monde. Malheureusement, il ne confirmera jamais, et ne deviendra pas le premier « Tech3 boy » à vaincre sur une course MotoGP.
Et après 20 ans de relation, Yamaha et l’équipe de Poncharal se séparent. Tech3 s’associe à KTM pour un ambitieux projet, avec d’autres horizons. Si les résultats sont pour l’instant timides, Miguel Oliveira montre une belle vitesse naturelle et pourrait s’avérer dangereux dans les années à venir.
Près de 30 ans de Grand Prix dans les jambes, et toujours debout. C’est plus qu’un team. C’est un franc-parler, c’est une fierté. C’est une famille, c’est nos représentants. C’est la pole de Zarco au Mans en 2018, c’est le titre de Jacque. Tech 3, c’est on l’espère, encore 30 ans de bonheur.
Crédits photos de couverture : Bezelkarim