Dans cette nouvelle rubrique, nous n’allons pas directement
évoquer les Grands Prix motos. À la place, nous allons plonger dans
l’histoire de la plus prestigieuse course au monde : Le
Tourist Trophy. La simple évocation de ce nom
donne des frissons à certains passionnés. Petit rappel, pour les
nouveaux. Le « TT » est une course mythique,
prenant place chaque année sur l’île de Man, une petite dépendance
autonome située entre l’Angleterre et l’Irlande du Nord. Elle se
déroule sur un circuit de plus de 60 km, tracé à même les routes,
depuis 1907.
Pour cet épisode, nous nous permettons une petite folie.
Mike Hailwood est avant tout une légende des
Grands Prix, mais aussi du Tourist Trophy. Les
nombreuses victoires de « Mike the Bike » sur
l’île sont à mentionner, dont une en particulier, et l’on parie que
vous savez déjà laquelle.
Nous avons déjà travaillé sur l’ensemble de sa
carrière, via cette rétrospective en trois
parties.
L’anglais, issu d’une famille aisée, est rapidement attiré par les
courses sur route. C’est d’ailleurs au Tourist Trophy qu’il
découvre cette passion. Après une saison rookie 1958 modeste,
Mike passe la démultipliée. En 125cc, il remporte
sa première course en carrière lors du Grand Prix d’Ulster,
démontrant toute sa maîtrise sur route. La montagne ne peut lui
résister longtemps. L’enfant de Great Milton triomphe lors de
l’édition 1961, comptabilisant trois victoires (125cc,
250cc et 500cc) sur la même semaine, du jamais vu. Pour
rappel, le record historique de Ian Hutchinson (cinq en une
édition) n’interviendra qu’en 2010. À peine croyable.
Les années suivantes sont synonymes de domination, au TT
ou pas d’ailleurs. Chaque fois que « Mike the bike »
enfourche sa MV Agusta, ça fait mouche. En 1964 et 1965, il gagne
100% des courses auxquelles il participe en
catégorie reine. Le changement de constructeur pour Honda n’y fait
rien, ou presque.
Certes, il est déchu du titre 500cc mais s’adjuge la 250cc et la
350cc en 1966, dont deux victoires supplémentaires sur la
Snaefell Mountain course. Le nouveau pilote
montant, un certain Giacomo
Agostini, pense pouvoir le détrôner. Effectivement, ça
sera chose faite.
Mais le TT, c’est son terrain de jeu. En 1967,
Hailwood rend l’une de ses plus belles copies. La bagarre à
distance fait rage avec l’Italien,. Rappelons qu’il y possède déjà
12 victoires, un chiffre absolument énorme.
Certes, la RC181 est moins bonne que son homologue
transalpine. Accusant du retard en début d’épreuve, il remonte
ensuite comme une balle à la poursuite de son rival de toujours,
bouclant un tour à 175 km/h de moyenne. Pour information, le record
ne serra battu qu’en 1975.
Sous pression, « Ago » doit de se surpasser. La légende casse sa
chaîne, résultant en l’une des plus grandes victoires de
l’histoire, bien que Giacomo remporte le général. Cette année 1967
est aussi la dernière d’Hailwood en Grands Prix. Une retraite
prématurée qui laisse du temps à d’autres passions.
En Formule 1, en F5000 ou au
24 Heures du Mans auto, le britannique s’amuse.
Mais il lui manque quelque chose. Une dernière danse. En 1977, il
s’estime apte à reprendre le guidon d’une moto de course. Son choix
se porte sur Ducati, juste pour se refaire la
main.
Les 900SS sont bonnes, mais pas au niveau des
Japonaises. Au fil des semaines, le jovial anglais se questionne.
Est-ce raisonnable de retourner au TT ? Une toute dernière fois ?
Vous connaissez déjà la réponse.
En 1978, il rentre en contact avec un magasin
Ducati de Manchester afin de lui préparer une bête
de course. L’usine s’en mêle afin d’apporter un peu de soutien,
pour qu’il ne soit pas dit que… Les spectateurs sont nombreux,
venus assister à ce qu’ils pensent être une simple procession d’un
vieux champion à la retraite.
À 38 ans passés, Mike n’a rien à jouer. Pourtant, les premières
impressions sont fracassantes. Hailwood caracole en tête, devant le
grand favori
Phil Read. Le public est sous le choc. Pendant la
course, la légende casse le chrono à 177 km/h de
moyenne, nouveau record. Les machines japonaises, alors
supérieures, n’espèrent même pas tenir un tel rythme.
Deux minutes d’avance, c’est le tarif. Hailwood compile 14
victoires au TT en carrière, un chiffre exceptionnel, qui
peut même être considéré comme plus impressionnant que les 26 de
Joey Dunlop en un sens. « Mike the bike », ce sont les
Grands Prix, les monoplaces, les prototypes, mais aussi et
surtout le Tourist Trophy.
Photo de couverture : Krühner