Dans cette rubrique, nous n’allons pas directement évoquer les
Grands Prix motos. À la place, nous allons plonger dans l’histoire
de la plus prestigieuse course au monde : Le Tourist
Trophy. La simple évocation de ce nom donne des frissons à
certains passionnés. Petit rappel, pour les nouveaux : le « TT »
est une course mythique, prenant place chaque année au moins de
juin sur l’île de Man, une petite dépendance autonome située entre
l’Angleterre et l’Irlande du Nord. Elle se déroule sur un circuit
de plus de 60 km, tracé à même les routes, depuis 1907.
Une fois n’est pas coutume, le pilote sélectionné aujourd’hui n’a
jamais remporté la moindre course au TT. Pourtant,
il n’en reste pas moins l’une de ses plus grands acteurs.
Guy vient au monde en 1981, au sein d’une famille portée sur les
sports mécaniques. Son père Ian courrait déjà le
Tourist Trophy dans les années 1970, ainsi, sa
route était tracée. D’ailleurs, son frère et sa petite sœur
sillonnent également les circuits britanniques. L’anglais est avant
tout passionné par la mécanique, une thématique qui le suivra
durant de longues années.
Il découvre la compétition à 18 ans, à la suite d’un accident
survenu sur route ouverte. Guy ne perce pas instantanément; le
grand public découvre son nom en 2006 après une superbe performance
sur le
GP d’Ulster. Ce n’est qu’en
2008 qu’il fait figure de gros poisson au TT,
épreuve qu’il manque de gagner.
La suite de cet article ne portera pas sur ses exploits sportifs.
Guy était un bon pilote, compte 17 podiums au TT,
des victoires dans d’autres courses majeures telles que la
North West 200, mais il est bien plus que cela. En
effet, Martin ne figure pas dans les cinq meilleurs pilotes de
cette époque. De plus, sa carrière s’est arrêtée « assez
prématurément » (comparé à la norme) en 2017, après avoir été
discret pendant de longues années. Cependant, Guy était la
face du sport.
Son comportement, sa franchise, mais aussi et surtout sa belle
gueule en ont fait une véritable idole. Son
intelligence et ses nombreuses réflexions philosophiques (plus tard
expliquées par le syndrome d’Asperger) l’ont transformé en cible de
choix pour les sponsors, mais aussi pour la télévision.
Si ses premières expériences sur le petit écran remontent à 2009,
c’est bien le fameux documentaire de 2011 TT3D : Closer
to the edge qui le révèle aux yeux du monde. Dans ce
film de 1 h 30, Richard de Aragues suit le Tourist
Trophy 2010 en se concentrant sur la personnalité de Guy
Martin.
Le grand public découvre un sport fou, à la limite de l’acceptable,
ainsi qu’un héros qui ressort facilement à l’écran. En effet, la
majorité des pilotes engagés sont timides, marqués par des
accidents, atypiques et souvent non télégéniques. En revanche, Guy
est stylé, charismatique, se prête au jeu, émerveille avec ses yeux
bleus et son regard profond. Le Royaume-Uni se prend de passion
pour le héros de Grimsby, qui subit, cette année-là, un terrible
accident (visionné 22 000 000 de fois sur
YouTube). Ceci déclenche un raz-de-marée.
Malgré des bons résultats sportifs, Guy devient une personnalité
publique. Pour preuve, son autobiographie sortie en 2014 devient un
best-seller outre-Manche, du jamais vu pour un pilote « local ».
Les producteurs anglais y voient un potentiel énorme. Les
apparitions de Guy se multiplient au fil des années, dans des
programmes divers, tournant presque à l’absurde au vu de leur
nombre. Guy Martin et le mur de la mort, Guy Martin et son tank de
la Première Guerre mondiale, Guy en Russie, Guy en Inde, la
révolution industrielle avec Guy Martin… La liste est
interminable.
Ses activités extra-télévisuelles sont tout aussi variées :
Tantôt mécanicien chez Williams en F1 (le temps
d’une course à Spa en 2017), tantôt homme le plus rapide du monde
(il détient quatre records de vitesse dans le Guinness dont un en
caisse à savon). En clair, ça ne s’arrête jamais.
Malgré la popularité, Guy garde les pieds sur
terre. S’il n’a pas marqué l’histoire du TT grâce à ses
performances, nous ne pouvons nier son impact sur les courses sur
routes en général, qui manquaient cruellement d’un héros après la
mort de Joey Dunlop.
Photo de couverture : Dave Johnson