À l’occasion de la fin de la décennie 2010, revenons ensemble sur les dix moments marquants nous ayant fait vibrer, pleurer ou rire. Ces dix moments peuvent être des tournants dans une saison, des transferts ou encore des batailles dantesques. Forcément, les moments des premières années de la décade passée marquent plus, car nous avons le recul pour mieux apprécier leur importance dans l’histoire. Aujourd’hui, étudions l’arrivée en MotoGP du phénomène Márquez, moment charnière de ces dix dernières années.
« Il y a un nouveau shérif en ville ». L’expression, bien connue dans le monde du sport, désigne un rookie, ou tout du moins un jeune, qui vient chambouler l’ordre ainsi que les codes établis. Elle caractérise parfaitement Marc Márquez , faisant son arrivée dans la cour des grands en 2013.
Pour rappel, le phénomène Márquez ne date pourtant pas de cette année. En effet, ce dernier est bien connu des plus petits plateaux. Il fut d’abord titré en 2010 en 125cc, bataillant avec Nico Terol et Pol Espargaró. Dix victoires, accompagnées de douze pole et le titre remporté lors de la dernière manche, à Valence.
En Moto2, la sauce prend instantanément. Il laisse la couronne à Stefan Bradl, et ce en grande partie à cause d’une blessure qui altère sa vision. Le rendez-vous est pris en 2012.
Ça ne manque pas. Pol Espargaró (encore lui) n’arrive pas à contenir son rival. Pour la deuxième fois en trois ans, Marc est titré. Il développe d’ores et déjà ce style de pilotage atypique, très agressif ; Honda fait les yeux doux à « la fourmi », et inversement.
Márquez est l’un des purs produits de la filière espagnole, et a, tout au long de sa carrière, couru sous les couleurs Repsol. De plus, le contexte s’y prête : Casey Stoner vient de prendre sa retraite, et un puissant guidon est libre. Ce n’est finalement pas une surprise, Honda joue de son pouvoir afin de faire venir un rookie dans un team officiel, et les premiers tests se montrent plus que convaincants.
Au Qatar, les choses s’accélèrent. Si Lorenzo écrase la course, le fraîchement élu pilote Honda termine troisième, soit 3,2 secondes devant Dani Pedrosa ! La toute nouvelle Honda RC213V lui va comme un gant. Arrive Austin. Márquez y prend sa première victoire, devenant au passage le plus jeune vainqueur d’un Grand Prix Moto de l’histoire.
En deux manches, la hiérarchie est revue. Lorenzo maîtrise son art, mais un jeune de 20 ans semble lui poser de gros soucis. Et impossible de prévoir un tel renversement : la plupart des médias s’accordaient à dire que le MotoGP entrait dans l’« ère Lorenzo », mais rien ne semblait pouvoir faire tomber le natif de Cervera.
Rien, c’est peu dire. Une chute à plus de 300 km/h en pleine ligne droite au Mugello ? Pas plus que ça. Aller au contact avec des vétérans ? Ça ne lui fait pas peur, Jorge Lorenzo ne nous contredira pas. Personne ne semblait pouvoir l’arrêter, et c’est tout naturellement qu’il fut titré, dans sa première année. Certes, Lorenzo aussi aurait mérité ce titre, mais huit victoires et un exploit à Assen n’ont visiblement pas suffit à freiner l’extraterrestre.
Décrire son style de pilotage en cette année 2013 est finalement assez compliqué. Il joue avec la limite, espérant ne pas la dépasser. Il ne réalise pas autant de sauvetages qu’aujourd’hui, mais calcule aussi beaucoup moins. Sa condition physique lui permet d’absorber des chocs ahurissants, mais bien sûr, le facteur chance rentre aussi en compte. Une pensée à Dani Pedrosa qui se blessa au Sachsenring en chutant à 80 km/h.
Décrire sa vitesse est plus simple. Les chiffres nous donnent un solide indice (neuf pôles), mais le témoignage de ses compères vaut bien plus. Jorge Lorenzo dira, à propos de la séance de qualifications du Grand Prix de Grande-Bretagne :
« J’ai réalisé un des meilleurs tours de ma carrière. Mais ça n’a pas suffit ».
L’arrivée de l’Espagnol en MotoGP est inévitablement l’un des faits marquants de la décennie, pour ce que cela représente. La naissance d’un pilote hors normes, la naissance d’une légende. Le dépassement musclé dans le dernier virage du dernier tour du Grand Prix d’Espagne à Jerez résume bien le propos. Peu importe qui vous êtes, il passera. Si vous ralentissez, très bien, si vous ne le faîtes pas, tant pis. Cette année 2013 fut placée sous le signe de l’éclosion… Mais aussi de la renaissance. La suite au prochain épisode.
Retrouvez la deuxième partie ici