De passage à Carthagène, dans le cadre des essais privés organisés par Johann Zarco, au mois de décembre, Paddock-GP a eu la chance de rencontrer le papa de Pedro Acosta sur son bateau de pêche, amarré dans le port de la ville. Au cours de nos échanges, dont la première partie a été publiée ce dimanche, nous avons pu évoquer un large éventail de sujets, du monde de la pêche à celui de la moto, en se concentrant sur le parcours de son fils jusqu’au MotoGP, où il évolue désormais dans l’équipe d’usine de KTM.
La deuxième partie de notre entretien avec le papa de Pedro Acosta, se concentre cette fois sur les débuts de l’Espagnol. Il y évoque ainsi tous les efforts mis en place par sa famille pour que Pedro puisse vivre sa passion au maximum, en passant par ses premières courses.
Tu ne voulais pas que Pedro soit pêcheur, et il a choisi
la moto…
« Oui, le secteur de la moto est arrivé. On ne l’a pas fait en
pensant que Pedro allait participer au championnat du monde, loin
de là. On l’a fait pour le loisir, parce qu’on aimait ça. On s’est
bien amusé, vous voyez ce que je veux dire ? En fin de compte, les
années ont passé. Il y a des gens qui m’ont dit que mon garçon
était très bon, et qu’il y avait beaucoup de possibilités
d’atteindre le championnat du monde. »
Tu te rendais compte qu’il avait le potentiel pour aller
loin ?
« Quand des gens qui vivent dans ce monde, et qui ont passé toute
leur vie dans ce monde de la moto, comme Julián Miralles ou Jaime
Alguersuari, ou Aspar vous le disent, tu arrives au moment où tu y
crois, non ? Nous avons donc pris ça plus au sérieux. On a fait une
série de choses pour que Pedro puisse y arriver. J’ai dû investir
beaucoup d’argent. »
Tu as absolument tout fait pour qu’il y parvienne
?
« Oui, oui, bien sûr. Le bateau, je l’ai hypothéqué. J’ai fait un
prêt avec le bateau pour Pedro. Et ça a bien marché, parce que si
ça n’avait pas marché, il faudrait continuer à payer le prêt sans
rien avoir. Mais en fin de compte, je le referais, tu sais. Parce
que je ne voulais pas avoir de regrets. C’était juste, c’était très
juste avec l’argent, donc j’ai décidé d’essayer. Avec le
consentement de la famille, de mon père et des autres. Parce que ce
bateau, c’est le nôtre, à mon père et à moi. »
C’était un grand risque…
« Un gros risque. Nous avons joué avec l’argent de la famille, car
toute la famille dépend de ce bateau. Tu vois ce que je veux dire ?
Toute notre vie, nous avons été pêcheurs, nous avons vécu et nous
avons ce que nous avons grâce à la mer, et à notre travail sur le
bateau. Ma femme est fille unique, moi aussi, je suis fils unique,
je n’ai pas de sœur, je n’ai personne et cela nous appartient
vraiment. Mais quand Pedro était en championnat d’Espagne, mon père
m’a dit : ‘Le petit garçon gagne toutes les courses, on ne peut
pas laisser Pedro tomber.’ Moi j’avais peur qu’il arrive quoi
que ce soit. Si on casse quelque chose. Il faut avoir de l’argent
pour payer. Mais il m’a donné carte blanche pour faire ce que
j’avais à faire. Il m’a dit : ‘Le petit doit continuer à
courir.’ Et c’est ce que nous avons fait. Le reste appartient
à l’histoire et à Pedro. »
Votre famille n’était pourtant pas impliquée dans la
compétition moto…
« La famille non, il n’y avait aucun pilote, même pas amateur, ni
aucun fan. Quand j’étais petit, je l’ai toujours été inspiré par
Schwantz et Rainey. Depuis qu’il est petit, je lui répète que la
limite, il se la fixe lui-même, dans sa tête. La limite, c’est ce
que chacun se met dans la tête, c’est ce qu’il pense pouvoir faire.
Rien n’est impossible, il suffit de se donner à 100 % pour ce que
l’on aime le plus dans ce monde, et d’essayer de l’atteindre. Mais
il faut le faire en prenant du plaisir. »
Tu te souviens de ses premières
courses ?
« Je m’en souviens. La deuxième ou troisième course qu’il a faite
en minimoto, il pleurait, il était nerveux. Avec le temps il s’en
est remis, mais c’est vrai que la deuxième course qu’il a faite, il
était avant-dernier des deux groupes, L’avant-dernier. Il pleurait
et ainsi de suite, mais je lui ai dit : ‘Non, Pedro, ça ne va
pas comme ça. Écoute-moi, nous venons ici pour nous amuser. Je me
fiche de savoir qui est le dernier ou le premier. Je veux te voir
t’amuser. Je veux que tu fasses un effort, que tu transpires. Si tu
es avant-dernier, c’est bien, au moins tu as fait un effort. Mais
je ne vais pas dépenser l’argent pour te voir pleurer. Si c’est
pour ça, on reste à la maison.’ »
Les choses ont changé par la suite ?
« C’est vrai qu’à partir de ce moment-là, il a changé, même si
c’était un petit garçon, ça a changé. Je l’emmenais pour le voir
s’amuser, et je m’amusais aussi. On en profitait en famille.
C’était un sport qui le passionnait. C’est ce qu’il y a de mieux
dans le monde de la moto. Pendant toutes ces années, le meilleur,
c’était le chemin qui mène au championnat du monde. La route que
vous empruntez avec votre fils, c’est tout. Personne ne vous
l’enlèvera jamais, personne. Parce que quand vous arrivez en
championnat du monde, il y a plus d’intérêts, plus de pression,
c’est différent. C’est déjà professionnel. »
À suivre…
Dans la dernière partie de notre interview avec le papa de Pedro Acosta, il vous racontera l’ascension du ‘Requin de Mazarron’ vers le MotoGP, et ses impressions quant à la première saison de son fils en catégorie reine.
Le papa de Pedro Acosta
avec Luca Bartolomeo dans le port de Carthagène