Nous avons interrogé Guy Coulon sur la façon dont il aborderait le problème pour concevoir une Moto2 à moteur Triumph. Nous employons le conditionnel car le responsable technique des teams Tech3 attend par prudence une confirmation officielle avant d’employer le futur simple, même si nous sommes en mesure d’affirmer que c’est bien le cas.
Guy, comment aborderiez-vous la construction d’une nouvelle Moto2 propulsée par un moteur Triumph ?
« Tout d’abord je tiens à préciser qu’il n’y a eu aucun communiqué officiel, donc ce ne sont que des suppositions. »
Alors supposons que Triumph fasse son arrivée en Moto2 en 2019, comment aborderiez-vous la construction d’une nouvelle Moto2 ?
« Avec quel moteur? »
La base du 765cc, même si la cylindrée n’est pas encore exactement définie pour le Moto2…
« En fait, il faudrait déjà attendre de connaître toutes les caractéristiques précises du moteur. Serait-ce un moteur de série ? Avec sa boîte à air d’origine ou pas ? Existe-t-il déjà ? Quelle cylindrée exacte ? Quelle puissance exacte ? Etc. Tout cela nous déterminerait pas mal de choses dans la géométrie de la moto. La puissance est importante car, avec le Honda, la puissance a tout d’abord été annoncée à 150 cv, pour finalement finir à 120/121 cv. C’est ce qu’on trouve au banc avec un bon moteur. »
Quelle est la relation entre la puissance et la géométrie du châssis ?
« Ça change l’empattement. En principe, plus il y a de puissance, et plus l’empattement est long. »
Une fois l’empattement défini, rechercheriez-vous à mettre le centre de gravité au même endroit que sur les Moto2 actuelles ?
« Le moteur Triumph, je ne le connais pas, mais admettons que ce soit la base du 675cc réalésé et avec une autre course, on aurait sans doute un moteur un moins large mais plus haut: utiliserait-on la boîte à air d’origine ? Ça, plus les accessoires, ce sont des problèmes d’encombrement sérieux. Il faut connaître parfaitement toutes les caractéristiques précises du moteur, en poids, en encombrement et en puissance. Comment sont disposés les organes ? Où est le pignon de sortie de boîte par rapport à ce qu’on a actuellement ? Et si on le met à la même position que ce qu’on a actuellement, parce que c’est une géométrie que l’on connaît bien, peut-on mettre le centre de gravité au bon endroit ? Et s’il faut basculer le moteur avec sa boîte à air, les entrées d’air seront-elles bien positionnées ? Bref, pour le moment, il y a beaucoup de questions auxquelles on ne peut pas répondre. Nous verrons s’ils nous fournissent, comme je l’espère, le 3D du moteur, comme cela avait été le cas avec Honda. Le plus important, ce sont les encombrements et la puissance. »
Imaginons maintenant que l’annonce officielle soit faite au Qatar. Quand vous mettrez-vous au travail et quel est le temps nécessaire pour concevoir et construire une nouvelle moto ?
« Il y aurait moins de travail que quand on a commencé en 2010. On avait commencé les premiers dessins de la Mistral au printemps 2009, tout en faisant notre saison de MotoGP car il n’y avait pas de personnes dédiées à cela. Et on a roulé la première semaine de décembre. En gros, on a tout fait, les dessins, les masters, le cadre et le montage en huit mois, tout en faisant notre boulot par ailleurs. Là, cela irait beaucoup plus vite car on n’aurait pas tout à créer. A cette époque là, il fallait tout faire, le cadre et les carénages bien sûr, mais aussi les roues, les axes de roue, les tendeurs de chaîne, les axes de bras, le système de montage de bras, le système de liaison moteur-cadre, les Tés de fourche, etc. Normalement, on peut conserver toutes ces choses là. On n’a pas de raison de les changer. Pour vous donner une idée, si on avait le couteau sous la gorge, je pense qu’on ferait une nouvelle moto en trois mois. »
Avec l’ECU plus sophistiqué voulu par la Dorna qui gérera le Traction Control, etc, cela va-t-il demander plus de personnel en exploitation ?
« C’est surtout l’ingénieur qui est là qui aurait plus de travail. (rires) »
Cette idée de Moto2 à moteur Triumph, elle vous plaît ?
« Pourquoi pas ? Déjà, ça ferait un bruit nouveau et qui serait unique dans la course moto. Une catégorie avec un trois cylindres, ce serait déjà une bonne chose. Cela donnerait un peu plus d’identité à la catégorie. »