Que seraient les jeunes de l’Équipe de France sans leur coach ? Le mois dernier à Carthagène, l’ancien pilote des Grands Prix, Alexis Masbou, encadrait les trois jeunes représentants français en ETC (David Da Costa, Gabriel Pio et Enzo Bellon), dans le cadre de sa reconversion en tant que coach pour la Fédération Française de Moto (FFM). Nous en avons profité pour l’interroger sur son rôle au sein de la structure, ainsi que sur les projets qu’il mène à titre personnel depuis son retrait du Moto3, après plus de dix années de carrière.
Coach de toutes les générations, et toujours un peu pilote, Alexis Masbou alterne entre différentes casquettes depuis son retrait de la compétition à haut niveau en Moto3, à la fin de la saison 2016. Le Français apprécie désormais transmettre son savoir aux plus jeunes, dans le but de former les champions de demain.
À Carthagène, nous avons essayé de mieux cerner son job au sein de la Fédération, mais aussi ses ambitions. Sans oublier de poser des questions quant aux échéances concernant les futurs Tricolores en championnat du monde.
Bonjour Alexis Masbou, pour ceux qui ne savent pas que
tu travailles pour la Fédération, décris nous ce que tu y fais
depuis maintenant quatre ans ?
Depuis 2021, je suis un des entraîneurs de la filière vitesse. Je
m’occupe principalement du collectif OGP (Objectif Grand Prix.
Ndlr), avec les pilotes Pré-Moto3 et NSF. Je suis aussi
l’entraîneur de l’équipe de France, avec trois pilotes qui sont
soit en European Talent Cup, ou en Moto3 Junior. J’ai souvent été
dans cette recherche de la perfection. C’est un peu la continuité
grâce à la fédération. On se rapproche du professionnalisme d’aunes
sports, avec la préparation psychologique et neurologique
notamment. On n’en est qu’au début chez les jeunes en moto.
C’est important pour toi d’encadrer la nouvelle
génération ?
Encadrer, mais surtout transmettre mon expérience, c’est quelque
chose que j’apprécie depuis très jeune. J’aimais déjà le faire
quand j’étais pilote : parler technique, échanger, et essayer de
trouver les meilleures solutions pour aller vite. Donc j’ai créé
mon école pour transmettre, et puis la Fédération m’a contacté en
2021 pour aider la jeune génération. Forcément, avec mon expérience
des petites cylindrées, je m’y retrouve bien. J’arrive souvent à
les guider, que ce soit en technique sur la piste, ou avec les
techniciens. L’idée, c’est de les mettre dans les meilleures
conditions possibles, pour qu’ils emmènent le meilleur bagage
technique pour la suite.
L’initiative de Johann Zarco, c’est une super
opportunité pour eux…
Je n’ai pas la date exacte, mais je pense que depuis que je suis
arrivé, Johann parraine, ou veut en tout cas aider le projet que la
Fédération a mis en place. Comme on le disait tout à l’heure, c’est
quelqu’un qui aime beaucoup partager aussi. Donc dès qu’il le peut,
comme ici à Carthagène, il partage la piste avec les jeunes. Il
essaie de venir au moins une fois par an avec les collectifs pour
partager son expérience. Forcément, c’est important pour de jeunes
pilotes, d’avoir des pilotes comme Johann Zarco comme référence. Il
leur montre que ce n’est pas si simple. Quand on est au début de sa
carrière, on se dit souvent qu’une fois arrivé en MotoGP, c’est
bon. Le boulot est fait, on a le niveau. Mais Johann, c’est le
genre de pilote qui montre que ce n’est pas du tout le cas. Quand
on est en MotoGP, il faut continuer à travailler. Les autres
n’arrêteront pas de vous pousser dans vos retranchements.
Ses conseils ne se limitent pas à la science du
pilotage…
Non, et c’est le genre de message que je trouve important de passer
aux jeunes. Et c’est plus impactant quand ça vient d’un pilote qui
est encore au meilleur de sa carrière, au plus haut niveau du
mondial moto. Ça a d’autant plus de valeur. C’est presque plus
important que de le voir rouler sur la piste. Leur rappeler que
dans deux ou trois ans, ils seront peut-être au top niveau, mais ce
ne sera que le début de leur nouvelle carrière. Il faut toujours
garder en tête que ça ne s’arrête jamais.
Ça les galvanise de se sentir soutenus par un pilote de
MotoGP ?
Ça les galvanise, ça les stresse. On peut voir ici, que dès qu’il y
a Johann, ils ont une attente d’eux-mêmes un peu plus importante.
Ils sont peut-être plus durs avec eux, ou en tout cas, ils veulent
donner la meilleure impression possible.
Quand Johann parle tout le monde se tait…
Exactement, et puis Johann aime beaucoup parler (rires). Il prend
le temps avec eux, et ils écoutent. Mais c’est le genre de discours
que je leur rabâche toute l’année, donc ils y sont préparés ! Je
pense qu’on a un discours assez similaire avec Johann par rapport à
tout ça. Ils ont cette chance que beaucoup de pilotes s’impliquent
dans leur carrière. Il y a beaucoup de gens qui veulent aider à
former cette nouvelle génération. Et je peux le dire, en quatre
ans, j’ai vu beaucoup de choses se mettre en place, et la nouvelle
génération de vitesse est en train de se forger. Même si on ne le
voit pas encore au très haut niveau, il y a des pilotes qui
arrivent.
Il n’y a pas que les jeunes qui en profitent, Johann
Zarco aussi ?
C’est bien pour les jeunes, mais je pense que c’est aussi bien pour
Johann. Il peut discuter avec les jeunes autour de lui, et ça
apporte de la fraîcheur. Valentino [Rossi] avait fait la même
chose, en mettant plus de jeunesse autour de lui. C’est important,
parce que je vois qu’avec eux, on travaille des choses que je ne
travaillais pas du tout à mon époque, au niveau du pilotage. On est
déjà en train de modeler le futur pilotage du Moto3, et du MotoGP.
Je pense que ça inspire aussi Johann, de voir ce que les jeunes
sont en train d’inventer pour les surclasser. On le voit avec
Acosta en MotoGP, il invente plein de nouvelles choses.
Tu te vois faire ça encore longtemps ?
Ça me plairait bien. Mais le plus intéressant pour moi, après avoir
fait ça pour les jeunes, ce serait de former d’autres coachs. Que
d’autres puissent prendre le relais. C’est un cycle, comme quand
j’étais en Grand Prix. Il faut préparer la suite, et c’est toujours
bien qu’il y ait de la jeunesse. Mais bon, après ça tourne.
L’an dernier, tu avais promis un pilote en Grand Prix au
bout de trois ans…
Ça va, je suis encore dans les temps (rires). Je ne suis pas le
seul à décider. Mais je pense que d’ici deux ou trois ans, on
pourrait voir les premiers faire la transition vers les Grands
Prix. Ils sont même peut-être là (À Carthagène. Ndlr). Chaque
année, on essaie de les emmener de plus en plus loin.
Rendez-vous demain à 12h30 pour découvrir la deuxième partie de notre entretien avec Alexis Masbou, consacré à la suite de son parcours en Endurance…