Qui est le pilote le plus dominant de tous les temps
? Rapidement, quelques noms viennent en tête. La question
est très complexe et nécessite une profonde analyse, ainsi que
l’aide de statistiques. C’est justement l’objet de cet article.
Prendre en compte les victoires d’un tel ou d’un autre n’est pas
suffisant pour établir un classement complet. Le but de l’exercice
est de calculer le pourcentage de point pris sur le maximum qu’un
championnat peut donner. Exemple très simple : En 2019,
Marc Márquez réalisa une année incroyable et
termina avec un total de 420 points sur 475 disponibles. Ceci
représente donc environ 88,4 % des points.
Mais comment déterminer la plus grande période de domination ?
Cela ne se joue pas sur une saison. Ainsi, nous nous focaliserons
sur trois pilotes de trois décennies différentes ayant minimum cinq
titres. Giacomo Agostini, Geoff
Duke ou Mike Hailwood ne peuvent être
retenus car les Grands Prix étaient un tout autre monde. Le sport
que l’on connaît aujourd’hui est né au début des années 1980.
Il s’agira d’étudier les trois plus grandes périodes de domination
de notre sport depuis. C’est à dire la dynastie Mick
Doohan de 1994 à 1998 et la période 2001-2005 de
Rossi. De plus, nous verrons comment Marc
Márquez s’en sort. Dans son cas, seront retenus ses cinq
premiers championnats (2013, 2014, 2016-2018). Ainsi, nous avons
une base solide pour une comparaison viable.
Commençons par Mick Doohan. Les chiffres de sa
domination sur la décennie 1990 sont tout simplement ahurissants. En 1994,
il prend 90,56 % des points que le championnat peut lui offrir.
Comparez ça avec la moyenne de Márquez en 2019. Le pire, c’est que
Doohan fait mieux en 1997, avec
90,66 % ! Des trois hommes, c’est le
seul qui dépasse une fois – deux en l’occurrence – les 90 %.
Malheureusement pour l’australien, la saison 1998 fait plonger sa
moyenne finale.
Mick Doohan prit 82,83 % des points de 1994 à 1998.
Vous avez bien lu. Cela paraît difficile à battre,
mais attendez de voir Valentino.
Ce que l’on pensait imbattable fut balayé moins d’une décennie plus
tard par le natif d’Urbino. Durant cinq ans, Rossi ne descendit
jamais en dessous des 76 % et pointa même à 89,25 % durant son
incroyable exercice
2003 . C’est d’ailleurs le seul qui montre des chiffres
en hausse entre son premier et son troisième titre.
Au total, Rossi ne laisse aucune chance à la concurrence en prenant
84,32 % des points existants entre 2001 et 2005. Si l’on fait
la moyenne des trois meilleurs résultats, cela donne 88,11 %
soit presque autant que Márquez en 2019. Cette statistique est
absolument folle, d’autant plus que Rossi préféra Yamaha à
Honda durant cette même période.
Les résultats concernant Marc Márquez risquent de
vous surprendre. L’espagnol, ultra dominateur depuis son arrivée ne
pointe « qu’à » 71 % de points engrangés sur ce qui était prenable.
L’outil permet de relativiser quand à sa dynastie, qui est sans
doute la plus contestée des trois par d’autres pilotes légendaires.
D’ailleurs, soulignons tout de même la belle année 2013 (74,22%) où
le n°93 s’empara du titre en tant que rookie, montagne qu’aucun des
autres larrons n’a gravi.
Bien sûr, il faudrait également prendre en compte la concurrence,
le matériel, le niveau des autres machines… Mais cet outil permet
d’appréhender l’ère dans laquelle nous vivons. Une ère disputée,
pour notre plus grand plaisir. Márquez peut écraser le championnat
mais sans dominer chaque course de l’extinction des feux à la ligne
d’arrivée. Ceci le rend encore plus redoutable à bien des
égards.
Photo de couverture : Box Repsol